dimanche 4 avril 2021

"Awòli", l'ésotérisme multidimensionnel sous le prisme des arts visuels

Dans le cadre du déroulement d'une exposition atypique


Dans la soirée du vendredi 19 février 2021 s'est tenu le vernissage de l'exposition, "Awòli", au "Centre" de Lobozoukpa. A l'origine de cette entreprise de présentation artistique, Violaine Lochu et Marcel Gbèffa ont fait connaître, de manière, à la fois, commune et individuelle, le résultat de plusieurs jours d'une quête ayant cherché à cerner la substance du rapport de l'être humain à l'indéfini et au sacré s'annonçant comme pourvoyeurs de bonheur, d'équilibre et de paix.

De gauche à droite, un visiteur de l'exposition "Awòli", face à Violaine Lochu

Différents outils ésotériques, des objets de divination, toutes cultures confondues, du matériel de purification de l'atmosphère, une sorte de silence propice au recueillement et, notamment, une succession d'actions de manifestation de l'une ou l'autre des situations précédemment évoquées. Ce qui justifie qu'en entrant dans l'exposition "Awòli", qui s'est officiellement ouverte dans la soirée du vendredi 19 février 2021, il fallait se déchausser purement et simplement, pour entrer dans le lieu sacré, saint qu'est devenu, pour la circonstance, le grand hall d'exposition du "Centre" de Lobozounkpa.

Cette formalité préalable réalisée, le public, par petits groupes, rencontre Violaine Lochu, circonstanciellement imprégnée d'une technique de divination du Sud-Bénin ou d'une culture occidentale ou, encore, d'une obédience asiatique. Les gestes parlent plus fortement que les paroles qui n'expliquent pas mais qui exécutent comme un rituel sacré. A un moment inattendu, un long cri lui échappe, un souffle se matérialise, des murmures se font jour pendant qu'entre temps, des tiges d'encens brûlent, libérant une fumée fine dont l'odeur apaise. 

Les petits groupes de visiteurs, qui découvrent ces postures profondément et diversement initiées de Violaine Lochu ne mesurent pas, à coup sûr, la portée de leur chance, de leur opportunité de communication, de symbiose et de communion instantanées avec l'artiste, vu que ceux qui leur succéderont les jours d'après le vernissage ne découvriront les mêmes circonstances qu'à travers une vidéo, celle très précieuse de la relation des actions de maîtrise de faits d'initiation.

Généreuse, la performeuse n'entend pas sortir de ces expériences sans partager quelque chose avec le public. Elle sollicite que certaines personnes choisissent une carte de divination, quitte à leur faire connaître un verdict de prévision de vie. Elle amène d'autres à souffler dans une sorte de récipient par le biais d'un tuyau, ce qui donne lieu à une évocation de vie, s'imprégnant de la situation spécifique du souffleur, ce qui occasionne la prédiction en lien avec le système d'oracle dont elle se tient dans la tentative de l'expérimentation.

Le petit groupe peut alors passer à une autre étape d' "Awòli" qui, en langue béninoise fon, signifie "le chemin de l'initiation".

Ce chemin, Violaine Lochu, la "femme hérisson", l'a parcouru, ce dont renforce le témoignage le deuxième petit compartiment de l'exposition, dans sa présentation d'objets d'ésotérisme avant que la deuxième grande curiosité ne livre ses éléments d'identification.



A la révélation de l'art propitiatoire


Cette fois-ci, Violaine Lochu est accompagnée. Marcel Gbèffa et elle s'engagent sur un parcours très ordinaire dans un pays comme le Bénin, celui de l'art propitiatoire, celui du rituel permettant à l'humain de communiquer avec les divinités appropriées afin qu'elles le délivrent des pesanteurs de toutes sortes bloquant son bonheur, son épanouissement ou son évolution dans un secteur donné de sa vie. Des pas feutrés de ses pieds toujours nus, le public pénètre dans la pièce de la deuxième grande étape de l'exposition, "Awòli".

Un extrait de la vidéo ...


... que les visiteurs, en position couchée, visualisent ...

... dans un contenu de dépôt du symbole d'un composant propitiatoire à un carrefour

Toujours recueilli comme dans un temple, dans une église, dans un lieu de culte, sous la direction inspirée et autant recueillie d'un guide, le public, toujours en un nombre réduit, est invité à prendre céans sur un lit afin de lire une vidéo sur un écran fixé au plafond, cet instrument environné et couronné d'habits débordant de leurs diversités de couleurs de longueurs, de textures, sûrement, l'incarnation d'êtres humains, potentiels solliciteurs de services de propritiation : Violaine Lochu et Marcel Gbèffa sont les personnages principaux des images, comme engagés dans une performance sur différents carrefours d'un certain quartier ; par l'escale qu'ils réalisent à chacun d'eux, ces deux acteurs de l'instant symbolisent le sacrifice propitiatoire traditionnel propre à la religion vodoun. Le deuxième niveau d'une initiation sacrée, surtout que, dans sa réalité, elle est menée par un prêtre ancré, initié.

Par rapport à la troisième et dernière étape, Marcel Gbèffa s'y réalise seul, comme en symétrie à Violaine Lochu, au début. Les visualiseurs de la vidéo ont, encore, entre temps, laissé leur place couchée à d'autres. "Mémoires d'Océan", la destination finale.

Vue sur le "bac" à découvrir concrètement

Il est impérieux pour le nombreux public non encore dans l'économie du déroulement d' "Awòli" d'effectuer le déplacement pour découvrir de quelle manière, dans un « bac d'eau », Marcel Gbèffa, l'artiste béninois  très connu de la danse contemporaine, capitalise un nombre incommensurable de souffles, ceux de toutes les âmes noires ayant perdu la vie dans leur traversée, contrainte ou volontaire, de la mer afin d'atteindre des contrées lointaines d'exploitation de force de travail par l'esclavage, ou de quête des fruits de l'Eldorado par l'immigration clandestine. A l'instar d'un mausolée aquatique, l'installation de Marcel Gbèffa interpelle concernant la lecture que chaque visiteur se fait de l'oeuvre, d'où la nécessité d'aller découvrir "Awòli" jusqu'au 22 mai 2021, pour ceux qui ne l'ont pas encore fait.

Marcel Kpogodo Gangbè

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