Dans le cadre de l’ouverture de son atelier au public
Sika
da Silveira, artiste contemporaine béninoise, ouvre au public, depuis le
vendredi 19 mai 2023, son espace de travail, dénommé ''Atelier Sika'', sis quartier d’Akogbato, à Cotonou, la
capitale économique du Bénin. Elle y montre une trentaine d’œuvres d’art
variant entre peintures, photographies et installations. Cette ouverture, par
la créatrice, de son espace de travail, montre d’elle une réalité remarquable. Elle prend le leadership de
l’engagement pour des relations responsables entre l'être humain et l’univers.
Sika da Silveira, dans ses explications au public - Extrait photographique réalisé à partie d'une photo originale de Carlos Sodolpa |
Vaste,
étendu, espacé, diversifié, coloré, lumineux, radieux, suggestif ! Décor enchanteur, le reflet de
la personnalité de Sika da Silveira à la mesure de ces valeurs de son ''Atelier Sika'',
situé au quartier d’Akogbato, dans le 12ème arrondissement de la ville de
Cotonou, au Bénin, cet atelier qu’elle a décidé d’ouvrir au public, en début de
soirée, le vendredi 19 mai 2023. L’objectif de l’artiste plasticienne et
performeuse est d’exprimer la complémentarité entre les êtres vivants, incitant
l’humain à en prendre conscience, pour la sauvegarde de l’environnement.
Le visiteur, dès son entrée, découvre une série d’œuvres d’art, qui interpellent. Des photographies, réalisées dans une technique mixte, des toiles à la charnière de l’abstrait et du figuratif et … une installation ! Majestueuse. Qui impose qu’on s’y arrête pour l’interroger, pour la laisser se faire découvrir et appréhender.
Une trentaine d’œuvres
occupent l’attention du visiteur. Selon l’artiste, son travail reflète la
relation intime existante entre l’univers planétaire et l’homme. « Nous sommes
des microcosmes, donc, nous portons des petits gènes du grand cosmos à
l'intérieur de nous », introduit-elle. Elle approfondit : « Le noyau de mon
travail, c'est toujours l'équilibre de l'homme, son équilibre spirituel. Il
nous faut prendre conscience de cela pour mieux composer avec notre univers ».
Cette préoccupation de l’artiste d’appel
à la conscience se lit, de façon omniprésente, d’une œuvre à une autre.
Les
tableaux abstraits comme ‘’Elévation’’, ‘’Expansion’’ et ‘’L’incarné’’
traduisent, à en croire l’artiste, les « manifestations énergétiques » internes
à l’humain ». Il est question de sortir pour aller à cet atelier de Sika da
Silveira afin de comprendre l’analyse qu’elle réalise des œuvres précitées. «
Ici, ce sont nos univers intérieurs que je traduis. Je parle ici, - d'accord !
- mais s’il était possible de taire les mots, il y a des manifestations
énergétiques que nous ne voyons pas et ce sont ses mouvements que je symbolise
», avance-t-elle. Elle se fait sentencieuse : « Le jour où il n'y a plus de
mouvement, c'est la mort ; c'est cette vie que je traduis ». « Ça bouge et ça
descend, ce n'est pas plat, c'est de la danse », explique-t-elle, le regard,
tout d’un coup, rayonnant. « Il faut aussi prendre en compte l'écriture dans ce
travail. C'est une écriture intuitive qui vibre avec chaque partie de l'homme
», oriente-t-elle.
Rappel
de la connexion cosmique
Les
photographies, captivantes, entrent en accord avec l’expression par Sika da Silveira de la
relation externe de l’homme avec son univers, le cosmos. Elles combinent figuratif et abstrait. A travers la série intitulée ‘’Zoun man bou’’, il se
découvre des visages d’hommes, avec une omniprésence des « arbres matures », en
arrière-plan. Le prétexte créatif pour un plaidoyer de l’artiste : « C'est pour
rappeler la vie de ces arbres parce qu'aujourd'hui, on détruit des arbres
centenaires qui portent la mémoire de l'histoire, des arbres centenaires qui
participent à notre équilibre, sans qu'on ne s'en rende compte ». Elle aborde la
conséquence mortifère d’une telle option humaine. « Lorsqu'on les détruit, on
détruit peu à peu notre équilibre. C'est donc pour rappeler que ce sont des
êtres vivants qu'on tue », clarifie-t-elle. L’artiste fait ressortir le lien
spirituel unissant l’homme à son environnement, dans sa série de tableaux,
dénommée, ‘’Mystique’’ et ‘’Le Vivant’’ puis à travers l’installation évoquée.
’’Les
gardiens de la terre’’ …
Elle est l’unique installation à aller voir de très près. Elle symbolise comme la maturité créative de l’artiste. Sika da Silveira y matérialise adroitement les connexions cosmiques. L’artiste plasticienne y exprime les liens invisibles qui soutiennent l’interaction entre l’homme et les autres entités du cosmos. Elle l’évoque : « J'ai représenté les gardiens de la terre par les sculptures qui sont au nombre de 40 + 1». Quarante sculptures, par dizaine, entourent la terre, l'eau, et le feu, que représentent, respectivement, un bloc de terre, une petite jarre remplie d’eau et un tas de charbon.
Comme pour se départir de tout fondement de jalousie de la part des éléments naturels, autour de l'installation, un autre groupe de dix sculptures identifie les gardiens de l'air. Au centre de l'installation se trouve la
quarante-et-unième sculpture traduisant la lumière. « Ce 41ème gardien,
ça peut être vous, moi ou quelqu'un d'autre qui a su se relier à ses autres
entités et, à travers lesquels, il peut agir sur terre. Parce que la Terre est
un organisme vivant au sein duquel nous vivons, […] il nous faut prendre
conscience de cela pour notre propre équilibre, en retour », explicite-t-elle.
L’exposition restant ouverte jusqu’au 9 juin 2023, aucune sorte de justification ne remplacerait le déplacement des visiteurs pour une rencontre inédite et unique avec l’esprit créatif de Sika da Silveira. Cet esprit s'est développé dans la durée. D'abord, exerçant comme perleuse, elle entre dans l'univers de l'art contemporain par la performance déambulatoire. Elle connaît, ensuite, le Cénacle expérimental, qu'initie Charly d'Almeida, en avril 2015. Continuant son chemin, elle s'affirme. Plusieurs années plus tard, un autre baobab de l'art contemporain béninois la repère: Dominique Zinkpè. Il la fait participer à ''Transe'' au ''Lieu unik'' d'Abomey, en 2022. Désormais, Sika da Silveira se construit en toute autonomie.
Son atelier, se situant à quelques mètres du bureau de la Caisse locale de Crédit agricole mutuelle (Clcam) du quartier d’Akogbato, est accessible du lundi au samedi, de 9 heures à 19 heures.
Léandre
Houan / Marcel Gangbè-Kpogodo