jeudi 21 février 2019

''Oraisons pour un vivant'' : « C’est la société béninoise qui est métaphorisée, qui est poétisée […] », explique Jérôme Michel Tossavi

Dans le cadre du lancement de son premier roman

L’après-midi du samedi 23 février 2019 donnera à assister au lancement de son premier roman par le jeune écrivain béninois, Jérôme Michel Tossavi. Ce sera à 15 heures précises à la Grande paillote de l’Institut français de Cotonou, sous le couvert de l’activité intitulée ’’Les entretiens de la paillote’’. Dans le but de nous toucher un mot sur ce qui devrait exciter le public à faire le déplacement de la manifestation, le créateur littéraire nous a accordé une courte interview, ce qui laisse pressentir un contenu explosif pour ce roman …

Jérôme Michel Tossavi et, ''Oraisons pour un vivant''
Le Mutateur : Bonjour Jérôme Michel Tossavi. Selon vous, qu’y a-t-il d’inouï, d’inédit ou d’original qui devrait amener le public à faire massivement le déplacement de la cérémonie de lancement de votre premier roman intitulé, ’’Oraisons pour un vivant’’ ?

Jérôme Michel Tossavi : J’invite officiellement le public à faire le déplacement, parce que, l’ouvrage, ’’Oraisons pour un vivant’’, au-delà d’une fiction, au-delà d’une imagination, constitue un cliché, un cliché qui dresse le miroir de notre vie. Chaque lecteur, quelle qu’en soit sa sensibilité, quel qu’en soit son degré d’appartenance sociale ou son origine, doit pouvoir se repérer dans les nombreux micro-récits qui jalonnent ce roman. ’’Oraisons pour un vivant’’ parle, en fait, des lecteurs, parle de chaque Béninois. Donc, c’est notre roman ; au-delà de la narration, sans trop exagérer, c’est un roman national.
Faire le déplacement de ce lancement, le samedi 23 février prochain, à quinze heures à l’Institut français de Cotonou, c’est une question de nationalité, c’est une question de patriotisme ; il faut venir s’y approprier notre identité, notre vraie identité, accouchée sur du papier, tel que nous aimons que cela soit fait, sans détour, pour parler de nous-mêmes, pour nous révéler à nous-mêmes, pour montrer notre état de déshumanisation mais, en même temps, notre état d’humanité, celui que nous cherchons.

L'Affiche officielle de l'événement

C’est la société béninoise qui est métaphorisée, qui est poétisée, sur 135 pages, lesquelles pages développent chaque aspect : la gratuité de la méchanceté, la facilité de nuisance mais, aussi, la naïveté et l’innocence d’une société qui végète, mais qui trouve toujours ses portes de sortie, quelle qu’en soit la teneur de sa méchanceté et de sa fraternité.

Propos recueillis par Marcel Kpogodo

jeudi 7 février 2019

Yvon Ekué, une poignante révolte contre la fermeture sociale

Dans le cadre d’un spectacle qu’il a tenu à Cotonou

Le samedi 2 février 2019 a permis de prendre part à un spectacle de danse contemporaine qui s’est effectué à l’Espace dénommé ’’Urban dance center’’ (Udc), situé à Cotonou. Au menu de l’action, le jeune Yvon Ekué aura frappé par son audace du rejet du conformisme professionnel, très ambiant.

Yvon Ekué, au cours du spectacle ''Avoundé''
Traits crispés, visage fermé, muscles des bras tendus, chute du corps comme, tout d’un coup, métamorphosé en une boule de nerfs, brève roulade comme en gymnastique, trouvaille d’un équilibre sur les deux membres inférieurs et abord d’un enchaînement de mouvements coordonnés. Le ton qu’a donné Yvon Ekué au spectacle de danse contemporaine intitulé ’’Avoundé’’, pour protester contre le manque d’acceptation de la profession de danseur artistique, dans le milieu de l’après-midi du samedi 2 février 2019, à l’Espace culturel ’’Urban dance center’’ (Udc), situé au cœur du quartier de la Haie-vive, à Cotonou.
Le regard, tantôt d’une dureté frappante, tantôt d’une perplexité déroutante, régule les mouvements du danseur qui, par les gestes de ses mains, laisse voir des doigts empressés comme demandant des explications ou en en donnant ; ce regard exprime ce que les paroles, le dialogue, les mots, tout simplement, n’ont pas droit de cité, ici, pour manifester. Les quinze premières minutes sont d’une telle tension qu’on sent un conflit du personnage avec d’autres, avec, semble-t-il, la société. Dans le cas contraire, comment expliquer ces gestes peu conciliants dans les doigts, ces chutes, ces relèvements brusques, ces tournoiements, entre autres, comme dans une ’’break dance’’ ayant fait fureur, tout au moins, dans la première moitié des années 1980 ? Ainsi, à l’aide de ses mouvements démultipliés, décomposés, c’est comme la déstructuration de sa personnalité que relaie le danseur, évoluant dans un décor tout en fond noir, dans des espaces latéraux de blanc peints. L’expression d’un deuil ? Du deuil d’une joie perdu, de l’épanouissement compromis, de la paix détruite ? Si oui, par rapport à quoi ?

Yvon Ekué, dans l'une des acrobaties, forte, liée au spectacle
Et, à un moment donné, ces doigts assez expressifs, tournés vers sa poitrine, donnent l’impression, chez le personnage, d’une introspection, d’un retour à soi, d’une adresse, de remontrances à soi. Pourquoi ? Auto-culpabilisation ? Auto-flagellation ? Traduit du français en mina, une langue parlée au Togo, ’’Avoundé’’, qui signifie ’’Bataille’’ semble devoir proposer des pistes d’interprétation …
En attendant de baigner les participants dans un océan propice d’analyses, le personnage continue son histoire qui, au bout de la quinzaine de minutes, prend, radicalement, une tournure plus conciliante, plus positive, plus douce, plus gentille, plus joyeuse.
En donne le ton un violent, « Hé, Togbé ! », lancé anonymement du public, ce qui ouvre la voie à une musique instrumentale de reggae, elle qui, subitement, asperge le danseur d’une bonne dose de sérénité, d’une force de spasmes menaçant de le bouleverser mais, qui, progressivement, le stabilisent, l’assagissent, l’adoucissent, le calment, l’épanouissent. Tout un coup, un autre homme prend forme : le sourire prend plus de place sur son visage. Ses bras et sa poitrine, son dos, ruisselants de sueur, semblent devoir commencer à se sécher et, sa culotte longue en tissu imprimé plus rouge, se prolongeant sur des genouillères blanches, à se froisser moins. Rien de cela n’est donné puisque la tête, les épaules, les bras et les pieds ont gardé d’un rythme qui, désormais, est canalisé, est domestiqué et est assagi par la musique reggae, comme si, la formalité de l’expression de son mal-être ayant été exprimée dans la violence précédente des mouvements, le soulagement et la paix étaient venus prendre siège dans esprit. Un dernier « Hé, Togbé ! » dicta sa loi et sonna la fin du spectacle. Vingt-cinq minutes venaient d’être égrenées.
De gauche à droite, Yvon Ekué, présenté au public par Nourou-Deen Eniola, Coordonnateur de l'Udc
En réalité, si ’’Avoundé’’ est le spectacle inaugural ouvrant la saison artistique à l’Udc, pour l’année 2019, il a donné l’occasion de voir s’exercer un certain niveau de réussite chez le jeune danseur contemporain, Yvon Ekué : sa capacité, par la mise en scène des gestes et des mouvements, des enchaînements, bien organisés, dans une symbiose de coordination, de traduire des sentiments forts comme la révolte, le dépit, la souffrance et l’humiliation, notamment ; il a fait sentir que le personnage qu’il incarnait était tourmenté. « ’’Avoundé’’ est l’histoire d’une bataille des artistes danseurs contemporains », a précisé l’artiste, « d’abord, contre eux-mêmes puisque, face au rejet de leur entourage, ils doutent, ils se demandent s’il faut continuer ou raccrocher. Ensuite, ils se battent contre la société qui n’accorde pas de l’importance à leur métier ». Dans cette longue explication apparaît la substance d’un spectacle, sa compréhension et sa direction, sans oublier qu’un autre jeune créateur en assuré la mise en scène : Yannick Amoussou.


L’Udc, une expérience déjà endurante

Nourou-Deen Eniola, Ezéchiel Adandé, Abênie Omontécho et Anita Vignigbé. Quatre esprits émanant des structures artistiques estudiantines qui ont décidé de conjuguer leurs efforts pour mettre en place un creuset pouvant leur permettre de concrétiser leurs initiatives de tous genres pour le développement de la danse contemporaine affiliée à celle urbaine : l’ ’’Urban dance center’’ (Udc) dont les activités ont été lancées en novembre 2018, à Cotonou, au siège de la structure culturelle, sis quartier Haie-vive de Cotonou. Sans tarder, ils font valoir un cahier de charges consistant les amenant à tenir des cours, à leur Espace, en danses modernes, en afro-contemporain hip-hop, en ’’dance-hall’’, en ’’street dance’’, en ’’break dance’’, en ’’new style’’, en ’’hip-hop girly’’, en ’’fun dance’’, en afro-fusion, en danses africaines traditionnelles et en danse contemporaine, sans oublier la pratique, aussi, de la danse classique, de la salsa et de la ’’kizomba’’. En outre, très proche de cet univers, le sport y trouve sa place, dans la programmation, par des cours que le client pourrait recevoir en aérobic, en ’’martial fitness’’, en ’’strong fitness’’, en ’’zumba’’ et en ’’mix cardio’’. Ses membres peuvent aussi se rendre utiles dans beaucoup d’autres domaines comme la motivation, le coaching et le développement personnel.

Marcel Kpogodo