Dans le cadre d’une
interview qu’il nous a accordé
La soirée du samedi 9
juillet 2016, à la petite paillote de l’Institut français de Cotonou, s’est
trouvée entièrement dédiée à la poésie. Un public immense débordant de partout
et occupant tout l’espace disponible et indisponible, assoiffé de déclamations
chaudes et envolées, comblé ou dégoûté, selon le cas, par des noms désormais
conventionnels de la poésie béninoise : Florent Eustache Hessou, Daté
Atavito Barnabé-Akayi, Basile Dagbéto, Armand Adjagbo, Louis-Mesmin Glèlè,
Marcel-Christian Ogoundélé, Constantin Amoussou, Jean-Paul Tooh-Tooh, Edwige
Chekpo, Esther Doko, Djamile Mama Gao, Toussaint Djaho … Sous le couvert de ’’Poésie
et engagement’’, le thème de la 2ème édition de la ’’Nuit poétique’’.
Par ailleurs, les petits plats ayant été mis dans les grands, 20 minutes d’un
spectacle vivant sur l’évolution de la poésie béninoise, de sa naissance à nos
jours, présenté par l’Association ’’Katoulati’’, a planté le décor de la
densité des effervescences et des effluves verbales, selon un fondement
thématique d’une variété à défier les imaginations les plus fécondes, en cette
soirée bénie des mots durs et forts, des paroles douces et condescendantes,
venus du tréfonds des cœurs. Des anges de la musique, deux générations
conciliantes, Dag Jack et Meschac Adjaho, ont fait monter la tension de l’esprit
des spectateurs, tous sexes et tous âges confondus, les deux artistes, à la guitare,
Bonaventure Didolanvi, de ’’Wood sound’’, à la batterie, l’homme de théâtre,
Anicet Adanzounon, officiant à la platine … L’Institut français du Bénin, le
Fonds d’aide à la culture et ’’Darimage’’, partenaires de cette réussite,
devront se frotter les mains d’avoir fait confiance à l’Association culturelle,
’’Mignon-tourbillon’’, ayant orchestré l’existence de cette voix forte de la
poésie béninoise, la ’’Nuit poétique’’, un événement par rapport auquel lequel Jérôme
Tossavi, le manager principal, a accepté de partager avec nous ses idées …
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Jérôme Tossavi, Président de l'Association, "Mignon-tourbillon'' |
Journal
’’Le Mutateur’’ :
Bonjour à vous, Jérôme Tossavi. Vous êtes le Président de l’Association
’’Mignon-tourbillon’’ qui a organisé la 2ème édition de la ’’Nuit poétique’’, dans la soirée du
samedi 9 juillet 2016. Cet événement a été un véritable succès, avec la
déclamation musicalement accompagnée de près d’une quinzaine de poètes béninois
parmi les plus talentueux, cette séquence de près de 3 heures de temps,
précédée d’un spectacle d’une vingtaine de minutes sur l’historique de la
poésie béninoise, sans oublier que les 8 et 9 juillet, un atelier de formation
en écriture poétique a été offert aux lauréats de l’appel à textes, lancé dans
le cadre du projet concernant la ’’Nuit poétique’’. En outre, la ’’Nuit
poétique’’ a drainé un monde impressionnant à la petite paillote de l’Institut
français de Cotonou, qui débordait de tous les alentours. Comment
expliquez-vous ce succès retentissant ? Les Béninois sont-ils si férus de
poésie ?
Jérôme Tossavi : Ce succès que vous
évoquez est le fruit d’un travail acharné pour offrir une belle vitrine à la poésie
béninoise en léthargie. L’association ’’Mignon-tourbillon’’, que je pilote, a
simplement voulu offrir aux spectateurs la ’’Nuit’’ de tous les frissons. Ce
désir ardent nous a poussés à braver toutes les obstacles pour asseoir une
vraie foire aux mots et aux maux, autour de l’idéologie de la poésie et de
l’engagement. On pensait avoir affaire à un projet de grande faisabilité. Mais,
très vite, nous nous sommes aperçus de la grande difficulté à porter ce rêve
commun en réalité. Du coup, on a visité tous les couvents de la bonne poésie
pour faire le difficile casting des plus brillants poètes de notre terre et
ciel. Puisqu’on tenait à la qualité, nous avons subi une forte pression dans la
programmation mais, au finish, nous nous sommes entendus sur la vaste projection
de notre slogan qui prise la nuit de tous les rêves. C’est ainsi qu’on a pu
réunir sur la même scène et, autour du même micro, une douzaine de poètes tous
engagés et enragés, pour porter la plaie d’une société en pleine chute. Cette
deuxième saison nous a particulièrement motivés à aller plus de l’avant, vu la
forte mobilisation nationale constatée pour porter au pinacle ce projet de
grande valeur humaniste. En initiant cette soirée unique de rêves et
d’émotions, nous étions loin d’imaginer qu’elle déboucherait sur une telle
effervescence nationale. Mais, en toute surprise, nous avons reçu l’appel du
peuple à cette ’’Nuit’’ qui n’a pas fermer les paupières de la soirée. Nous
avons vu des enfants, des adolescents, des jeunes comme des personnes âgées, qui
ont résisté à l’insomnie de la ’’Nuit’’. Pour nous, c’est une vraie réussite, car
parvenir à rassembler le peuple béninois, mutilé par les problèmes sociaux autour
de la parole, relève, à notre avis, d’un vrai mérite. Deux raisons
fondamentales justifient ce succès éclatant que vous évoquez si bien. La
première est relative à la grande envie étouffée des Béninois de plus en plus assoiffés
de vraies distractions jouissives, faute de canaux de loisirs artistiques, en
manque terrible dans le pays. La deuxième est liée à la méconnaissance totale
du répertoire poétique béninois. Je pense que la ’’Nuit poétique’’ a gagné
cette bataille en misant sur ces deux aspects de la réussite de tout grand
événement qui doit chercher à être ludique et utile.
Quelles
perspectives vous tracez-vous pour la 3ème édition de l’événement, l’année
prochaine ?
D’abord, nous nous
donnons comme prochaine priorité de parvenir à positionner la ’’Nuit poétique’’
sur l’échiquier international. Pour une telle réalité, il nous faut davantage
habiller l’événement et le rendre plus consommable. Et, sur ce plan, nous
comptons désormais créer et mettre à profit un site web entièrement dédié à la
manifestation. Ceci nous assurera la nette visibilité, au plan mondial, car
beaucoup de poètes, à travers le monde, nous écrivent pour réserver leurs
places pour la 3ème saison qui se tiendra en mars 2017.
La 3ème
saison sera encore plus belle, avec une large ouverture sur l’international. Nous
attendons une forte délégation de poètes africains et européens. Et, sur le
sujet, nous avons déjà une forte demande de participations de grands poètes
français, canadiens et africains, de tous les cabanons. Nous ferons le
nécessaire pour mettre en scène les grandes voix de la poésie béninoise encore
vivantes, et pour rendre les hommages les plus mérités aux poètes béninois qui
ont rendu l’âme, plume et verbe dans la bouche. Le volet ’’Formation et
initiation en techniques d’écriture poétique’’ sera encore au rendez-vous, lors
de la 3ème saison. La ’’Nuit poétique’’ prendra, ainsi, de plus en
plus, l’allure d’un grand festival international, avec la prochaine
construction, à Sékou (à quelques encablures de Cotonou) de la première
résidence internationale des poètes du monde. La ’’Nuit poétique’’ se servira
donc de cette résidence pour mettre en place la première maison d’édition
entièrement dédiée à la poésie, en Afrique.
L’Association
’’Mignon-tourbillon’’ est l’organisation par laquelle vous avez tenu la ’’Nuit
poétique’’. Pouvez-vous définir le concept ’’Mignon-tourbillon’’ ?
L’Association ’’Mignon-tourbillon’’
est d’abord une plateforme de diffusion et de promotion des œuvres littéraires
et poétiques, au Bénin et en Afrique. Elle se présente comme un conglomérat de
jeunes dynamiques et engagés dont le seul objectif est de parvenir à
révolutionner le milieu littéraire et poétique béninois, par des actes très
positifs. Elle vient de voir le jour et dégage déjà une forte température
d’adhésion, de partout. Elle privilégie la créativité fertile autour des œuvres
littéraires et artistiques bénéfiques, pour l’avancée de notre culture.
L’association ’’Mignon-tourbillon’’, dont je suis le Président, s’investit
aussi dans le domaine éducatif et social, à travers son concours d’excellence
littéraire en milieu scolaire, dénommé ’’Challenge les amis du livre’’, qui
sera à sa quatrième édition, en mars 2017. Elle est apolitique et ouvre ses
portes à toute bonne volonté épousant les mêmes réalités que nous.
Propos recueillis par
Marcel Kpogodo