mardi 22 mars 2022

Asprina défend la cause de Tassi Hangbé, l’unique reine dahoméenne

Dans le cadre du vernissage d’une exposition à Ouidah

Le vendredi 4 mars 2022 a eu lieu le vernissage de l’exposition, ’’Le retour ancestral’’. Il s’est déroulé au Centre culturel de Rencontres internationales (Ccri) John Smith, à Ouidah. Il a, ainsi, été lancé la découverte des œuvres de quatre artistes visuels béninois de la nouvelle génération : Nina C. Prisca Assogba, alias Asprina, Alice Falhonne Ogoun, Laurent Gbèhoun, alias Makambo et Mathias Tossa. L’attraction de la manifestation a été la performance d’Asprina. Par cette activité, elle a voulu attirer l’attention sur la nécessité de réhabiliter Tassi Hangbé, l’unique reine de l’ex-Dahomey.


Asprina en Tassi Hangbé, par la magie de la performance

Une artiste peintre figée en une statue de reine. Le résultat de la performance qu’a donnée à voir Nina C. Prisca Assogba, alias Asprina, dans le début de la soirée du vendredi 4 mars 2022 au Centre culturel de Rencontres internationales (Ccri) John Smith, à Ouidah, lors du vernissage de l’exposition, ’’Le retour ancestral’’. Cette métamorphose s’est opérée après plusieurs minutes d’un processus pendant lequel Asprina est passée de la femme-artiste à Tassi Hangbé, la reine-guerrière, l’unique femme souveraine de l’ex-royaume du Dahomey. 


Par conséquent, devenue une statue faite de papier et de ciment, elle était armée d’un fusil et de sabres. Un symbole remarquable, surtout que Tassi Hangbé, de son vivant, a régné sur le royaume mentionné de 1707 à 1711, brutalement obligée de se voir intronisée reine, suite au décès inattendu de son frère jumeau, le roi Akaba, à la veille d’une expédition guerrière contre le royaume des ’’Wémènou’’, à Porto-Novo. Par la suite, elle a dû abdiquer face aux intrigues des princes de la cour pour la démettre du trône. 


Le passage de cette reine à la tête de l’ex-Dahomey a été rendue inoubliable par la mise en place du corps de ses garde-corps, de véritables femmes guerrières, les ’’Agbodjié’’, plus connues sous le nom d’amazones. Après son abdication, Tassi Hangbé a été bannie de la généalogie dynastique des souverains de l’ex-Dahomey et, ainsi, portée à être oubliée.


Asprina, à travers sa performance qui a impressionné plus d’un, dans le public, a voulu faire passer un message clair : la réalisation d’un monument national à l’effigie de la reine indiquée, sur le fondement de la réclamation de la réhabilitation du nom de Tassi Hangbé sur la liste officiel des souverains de l’ex-Dahomey. Asprina est aussi à l’origine de l’exposition, ’’Le retour ancestral’’, dans le but de soutenir le gouvernement béninois dans sa concrétisation et de al célébration du retour au Bénin des 26 biens royaux d’Abomey. Cette exposition est prévue pour s’achever le 15 avril 2022.

                                                                                                                                              Viviane Savi

 

 

« Pourquoi […] pas une statue […] pour Tassi Hangbé ? », s’interroge Asprina

 

Dans le cadre d’une interview accordée à notre rédaction

En marge du vernissage de l’exposition, ’’Le retour ancestral’’, qui s’est déroulé le vendredi 4 mars 2022 au Centre culturel de Rencontres internationales (Ccri) John Smith, à Ouidah, a accepté de répondre à nos questions Nina C. Prisca Assogba, alias Asprina. En effet, elle a tenu une performance en l’honneur de la seule reine du Dahomey, Tassi Hangbé. Explications de l’artiste performeuse …  

 

Stars du Bénin : Nous avons assisté au vernissage de l’exposition, ’’Le retour ancestral’’, à une performance où l’on vous a vue passer d’Asprina à la reine Tassi Hangbé. Quel message avez-vous voulu véhiculer à travers ce spectacle ?


Asprina : Dans le passé, nous avons eu une reine qui a régné pendant quatre ans mais dont le nom a été effacé de l’histoire du Danxomè. C’est cette injustice que j’essaie de dénoncer à travers ma performance. Pourquoi le Président Talon n’érige pas une statue digne du nom pour honorer la mémoire de la reine Tassi Hangbé ?


A quoi nous ramène l’exposition, ’’Le retour ancestral’’ ? Pourquoi avoir choisi Ouidah pour l’organiser ?

On a choisi de faire cette exposition au Centre culturel de Rencontres internationales (Ccri) John Smith, à Ouidah, Ouidah étant une ville touristique, parce que l’exposition des œuvres d’art est d’actualité aujourd’hui. On parle essentiellement du retour des trésors royaux au Bénin. Et, je profite de l’occasion pour remercier le président de la République pour avoir ramené nos pièces précieuses. L’idée m’est donc venue d’organiser une telle activité afin d’accompagner le gouvernement dans l’exposition des 26 trésors royaux qui a lieu, en ce moment, à la Marina (Présidence de la République du Bénin, Ndlr), pour qu’on puisse vivre aussi le retour des trésors royaux à Ouidah. D’ailleurs l’exposition se poursuit jusqu’au 15 Avril 2022. 


Vous présentez une quinzaine de tableaux  dans le cadre de l’exposition, ’’Le retour ancestral’’. De quoi parlent vos œuvres ? 

Mon domaine de prédilection, c’est la lutte contre les violences faites aux femmes. Je réalise essentiellement des performances, à travers mes œuvres, pour m’exprimer, pour dénoncer un acte ou revendiquer un droit.

Comme illustration, vous verrez, parmi mes œuvres, deux tableaux d’une femme vêtue en blanc, intitulés ’’La mère de toutes les divinités’’, Tome 1 et Tome 2. Elles sont comme une performance qui parle de l’approche du pouvoir de la femme. La femme est, avant toute chose, une divinité qui a mis au monde toutes les divinités.

 

L'une des oeuvres ...


Du ’’Egoun-goun’’, du ’’Zangbéto’’ aux autres divinités, c’est une femme qui les a tous mises au monde avant qu’elles ne soient considérées comme telles.  La femme est donc la mère de l’humanité et, malgré cette place que la religion traditionnelle lui reconnaît, elle reste encore profane pour ces divinités. 

 

... d'Asprina, au cours de l'exposition, ''Le retour ancestral''

 

Etant une artiste engagée dans la lutte contre les inégalités à l’égard des femmes, quel message pensez-vous adresser aux femmes, dans le sillage de la célébration de la Journée internationale des Droits de la femme, le 8 mars 2022 ?

C’est une journée que j’aime particulièrement et je tiens toujours une performance chaque 8 mars pour faire passer un message. Je souhaite une bonne fête des droits de la femme à toutes les Béninoises et je leur souhaite également plein de courage dans leurs défis quotidiens car ce n’est pas facile d’être une femme et de faire preuve de fermeté. 


Quels sont vos projets ?

J’ai plusieurs projets d’exposition à Cotonou et à Porto-Novo, toujours dans le cadre du retour des trésors royaux. Aussi, je pense continuer à m’occuper de l’éducation des enfants abandonnés et démunis à Porto-Novo. 

                                                                                                          Propos recueillis par Viviane Savi

vendredi 4 mars 2022

« [A ’’Emblèmes’’, Coline-Lee Toumson-Vénite] a échangé personnellement avec les artistes », dixit Salinas B. Hinkati

Dans le cadre du vernissage de l’exposition concernée


Le vendredi 25 février 2022 s’est effectué le vernissage de l’exposition, ’’Emblèmes’’, au ’’Lieu unik’’, situé au quartier de Tohizanly, à Abomey. Parmi les personnes et les personnalités ayant participé à l’événement se trouve Coline-Lee Toumson-Vénite, Chargée de Mission au Tourisme, à la culture et aux arts du Chef de l’Etat, Patrice Talon. Elle a marqué sa présence par l’intérêt particulier qu’elle a manifesté aux artistes exposants, ce que nous rapporte Salinas Berthold Hinkati, membre du Comité d’Organisation du vernissage indiqué, qui a bien voulu accorder à notre rédaction une interview dans laquelle il nous explique le déroulement du vernissage.


Coline-Lee Toumson-Vénite, au vernissage d' ''Emblèmes'' au ''Lieu unik'' d'Abomey - Crédit photo : Carlos Sodokpa

Stars du Bénin : Bonjour, Salinas Berthold Hinkati. Par rapport à l’exposition, ’’Emblèmes’’, en combien d’étapes s’est déroulé son vernissage qui a eu lieu en fin d’après-midi, le vendredi 25 février 2022 à l’espace artistique et culturel dénommé ’’Lieu Unik’’, à Abomey, vous qui y avez participé en tant que membre du Comité d’Organisation ?


Salinas Berthold Hinkati : Bonjour et, merci, pour votre question. Effectivement, j’ai participé à l’organisation de l’exposition, ’’Emblèmes’’, qui réunit, au total, 12 artistes contemporains.

En ce qui concerne le vernissage qui a eu lieu le vendredi 25 février 2022, il s’est déroulé en quatre étapes.

La première est la performance in situ de l’artiste, Gratien Zossou. Il a peint un tableau en plein air ; il est intitulé ’’La jarre des dynasties’’. Il a débuté la réalisation de l’œuvre avant 17h30, le moment indiqué aux visiteurs pour le démarrage du vernissage. La deuxième étape est le transport de 45 apprenants vers le ’’Lieu Unik’’ et leur participation à la manifestation. 



Ils provenaient des Complexes scolaires Sathia Saï et Blaise Pascal, du Collège d’Enseignement général 1 et du Lycée Houffon, tous à Abomey. En troisième lieu, il y a eu la distribution à ceux-ci du magazine, ’’Spiruline’’. Nous avons fait d’une pierre deux coups. La dernière étape est celle du positionnement de chaque artiste contemporain exposant devant ses œuvres, à partir de 17h30. 

 

Salinas Berthold Hinkati - Crédit photo : Carlos Sodokpa

 

Pourriez-vous nous donner des détails selon chacune des étapes que vous avez évoquées ?

Premièrement, nous avons eu la performance du Doyen, Gratien Zossou qui s’est mis sous un arbre à proximité des salles d’exposition pour peindre un tableau. Cet acte a permis aux visiteurs qui, déjà, à partir de 14h, venaient à compte-gouttes, de comprendre le procédé de réalisation d’un tableau d’art et, la manière dont l’artiste reçoit l’inspiration et, automatiquement, l’applique. Il leur a aussi permis de comprendre qu’une œuvre d’art est unique en son genre, qu’il est difficile de réaliser la même œuvre en quantité industrielle ; l’inspiration arrive et l’artiste la matérialise au fur et à mesure.

Sur ce tableau de performance, on a remarqué du collage, celui des emblèmes des différents rois du Danxomè. On y a vu aussi la représentation d’une jarre que porte un couple. Selon ses explications, l’œuvre raconte, en filigrane, l’histoire de la dynastie royale d’Abomey. Gratien Zossou l’a achevée après 17h30.

Deuxièmement, nous avons l’arrivée et la visite des scolaires. Le ’’Lieu Unik’’ d’Abomey a mis à disposition son bus pour le transport de 45 apprenants des écoles et des établissements que j’ai mentionnés précédemment. Ils ont parcouru les salles d’exposition et se sont montrés très satisfaits, ayant posé des questions pertinentes auxquelles a répondu le médiateur culturel qui est aussi le responsable de la ’’Belle bibliothèque’’, M. Jonas Kounou.


Les apprenants indiqués, en possession de leurs exemplaires du magazine, ''Spiruline'' - Crédit photo : Carlos Sodokpa

Cette visite a laissé place à la distribution de différents numéros du magazine, ’’Spiruline’’, destiné aux enfants de 8 à 12 ans. Depuis plusieurs mois, le ’’Lieu Unik’’ procède à cette distribution gratuite, grâce à son partenaire, l’Ong, Aad-Fund. Les élèves sont entrés en possession de ce support de culture en présence de leurs encadreurs. Ce fut aussi un moment de divertissement. On a pu avoir droit à un spectacle de théâtre, à de l’interprétation musicale, à des séances de diction de contes par une association qui exerce dans ce domaine. Il s’agit du Festival international de Contes d’Abomey (Fithéca). 


L'artiste, Renaud Rémadon, dans l'explication de ses œuvres à des visiteurs - Crédit photo : Carlos Sodokpa


En réalité, la distribution indiquée devait bénéficier à 150 apprenants. C’est symboliquement que nous l’avons faite à l’endroit des 45 écoliers et élèves. Les numéros restants du magazine ont été remis aux directeurs des différents écoles et établissements pour qu’ils puissent les remettre aux autres apprenants qui ne sont pas arrivés au ’’Lieu Unik’’.

Enfin, à partir de 17h30, tous les artistes sont partis se positionner devant leurs œuvres respectives. Ils en donnaient des explications approfondies aux visiteurs qui allaient à eux. Le médiateur culturel, par moments, renchérissait la présentation des artistes. 

Les visiteurs étaient de plusieurs catégories : les scolaires dont je vous ai parlé, d’autres aussi étant venus d’eux-mêmes, des conducteurs de taxi-moto d’Abomey, une délégation d’artistes contemporains venus de Cotonou, ceux d’Abomey et de Bohicon.

Une visite-surprise a été celle de la Chargée de Mission du Président de la République dans les domaines du Tourisme, de la culture et des arts, Madame Coline-Lee Toumson-Vénite. Elle a parcouru toutes les œuvres, a posé des questions à des artistes, a voulu en savoir plus sur chaque œuvre exposée et a félicité le comité d’organisation de l’exposition pour le travail méticuleux qui a été fait pour montrer au public les œuvres.


Au centre, Dominique Zinkpè, au vernissage d' ''Emblèmes'', posant en compagnie de quelques artistes visiteurs - Crédit photo : Carlos Sodokpa

Elle a profité de l’occasion pour féliciter personnellement M. Dominique Zinkpè, le Directeur de l’espace artistique et culturel, le ’’Lieu Unik’’ d’Abomey. Même après avoir vu les productions, elle a échangé personnellement avec les artistes. C’était fabuleux. Sa visite les a ragaillardis parce qu’à travers elle, c’est tout le gouvernement qu’ils voyaient, c’est le Président Patrice Talon lui-même, qu’ils voyaient. Sa présence donnait l’impression que le Président de la République en personne avait fait le déplacement de l’exposition, ’’Emblèmes’’.

 

Selon vous, quelles sont les difficultés que le vernissage a connues ?

Je n’aime pas trop m’attarder sur les difficultés parce que, dans toute œuvre humaine, il y a un peu de peine. Et, c’est quand on les surmonte qu’on a les résultats escomptés. Nous n’en avons pas connu beaucoup. Cela a été un travail proactif, l’exposition ayant commencé à être préparée plus d’un mois et demi à l’avance. Cela a donné le résultat que nous avons constaté le jour du vernissage. Donc, personnellement, je n’aime pas m’attarder sur les difficultés parce que cela fait partie de la vie. Cela appartient aux œuvres humaines. L’essentiel reste que les résultats soient atteints.

En parlant de l’exposition, ’’Emblèmes’’, nous les avons atteints. De par la catégorie des visiteurs que nous avons eus, je pense que nous sommes en droit de nous auto-féliciter. Quand on considère que les conducteurs de taxi-moto, les apprenants, leurs parents et même des marchandes, sont venus, sans oublier, entre autres, la Chargée de Mission du Président de la République, quand on voit les artistes venir soutenir leurs collègues qui exposent, je pense que nous avons réussi. Nous espérerons d’autres réussites dans les jours à venir parce que d’autres expositions s’annoncent.   

 

En guise de mot de fin, quelles leçons tirez-vous de la tenue du vernissage indiqué ?

L’exposition, ’’Emblèmes’’, a fait ressortir une réalité que rappelle toujours M. Dominique Zinkpè : Abomey est une ville artistique et historique dans laquelle les populations connaissent la valeur de l’art. Même les conducteurs de taxi-moto se sont déplacés pour venir voir l’exposition, de même que les marchandes, les écoliers et les élèves. Cela montre qu’Abomey demeure une ville artistique.

L’autre leçon : quand il y a la qualité, les gens vous le disent et sont prêts à revenir ; des visiteurs de l’exposition précédente nous ont rejoints pour voir ’’Emblèmes’’. Si cela a été le cas, c’est parce qu’ils voient la qualité de l’équipe de travail du ’’Lieu Unik’’, de même que la qualité de ce qui s’y fait.

C’est un challenge pour nous de continuer dans cette lancée et, surtout, de ne pas les décevoir. D’autres expositions s’annoncent et, chaque fois, il faut se battre pour faire un peu plus. Tel est notre leitmotiv. Nous ne sommes jamais satisfaits. Après chaque événement, nous faisons des analyses, à l’interne, afin de voir les forces, les faiblesses, les menaces et les opportunités puis nous en tirons les conclusions. Nous avons fait ce travail à notre niveau pour offrir d’autres expositions de qualité supérieure comme celle en cours, ’’Emblèmes’’.

Merci beaucoup aux journalistes qui s’y sont intéressés, à toutes les couches sociales qui ont fait d’elle une réalité. Je rappelle qu’elle continue et qu’elle s’achève le 18 avril 2022.

Propos recueillis par Marcel Kpogodo Gangbè