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mardi 25 septembre 2018

Daté Atavito Barnabé-Akayi : « […] on se rend compte de l’immensité de son ignorance au fur et à mesure qu’on s’approche de la Connaissance […] »


Suite à son dernier séjour parisien 

Quarantenaire tout frais, quarantenaire d’une réelle nouveauté avec le personnage qu’il est, vu que le lundi 24 septembre 2018 sonnait exactement le ’’jour pour jour’’ authentique de sa venue au monde, mais étant né un dimanche, Daté Atavito Barnabé-Akayi a accepté de s’ouvrir à notre Rédaction, la formulation de la demande de ses réflexions ayant été fondée sur la conquête par lui d’un Grand Prix, le second de l’année 2017, celui de la Meilleure fiche pédagogique, la sienne, proposée, mise en une évaluation internationale avec vingt-trois autres, au niveau de six pays de l’Afrique francophone. D’une part, succès, dans son métier d’enseignant, vulgarisateur, de vocation, de la connaissance liée à la discipline, respectivement dénommée ’’Français’’ et ’’Lettres’’, dans les collèges et les lycées du Bénin. D’autre part, lui échoit, vers la fin de la même année, la récompense littéraire la plus prestigieuse du Bénin : le Prix du Président de la République ! Avec ’’Le chroniqueur du Pr’’. Un brûlot subtil, un ton insidieusement acerbe, notamment, de la gouvernance politique au Bénin, en vigueur depuis avril 2016. Une rechute. Il avait déjà habilement tancé le prédécesseur de l’actuel Chef de l’Etat, avec ’’Les confessions du Pr’’. Un atypique, donc, dans un conformisme, dans un caractère conventionnel qui l’habite quotidiennement, en tant que fonctionnaire de l’Etat et père de famille. Un atypique, dans ses principes, dans sa capacité à vivre la littérature, à retracer son historicité : inévitablement, Daté Atavito Barnabé-Akayi aura été – sous la réserve d’une enquête sérieuse à mener – l’un des rares apprenants béninois de la classe terminale, de son époque, à avoir, son Baccalauréat en poche, sacrifié l’année suivante, par ses propres fonds, pour s’offrir le redoutable itinéraire de personnages comme ce que lui-même devient, les années aidant : Ad’jibid’ji, Mamadou Keita, Tiémoko, Bakayoko, entre autres, à Bamako, Sounkaré, Doudou, Penda, notamment, à Thiès, sans oublier les redoutables Ramatoulaye et Mame Sofi, le méprisable El-Hadj Mabigué, parmi tant d’autres, à Dakar. Le parcours du Dakar-Niger ! Dans ’’Les bouts de bois de Dieu’’ d’Ousmane Sembène. Daté se l’est donné, ce parcours, en a respiré les senteurs intimes de la route, des différents moyens de locomotion ! Un atypique, dans son dos qui reste droit, dans sa tête qui garde sa forme ordinaire, en dépit de ces différentes consécrations, en dépit de huit années d’un exercice littéraire intense, prolifique, qui le rend père d’une vingtaine d’ouvrages, tous genres confondus : théâtre, poésie, roman, nouvelle, essai, pédagogie, guide scolaire, … Cet atypique, ce conformiste, donc, cet insaisissable, a bien voulu nous accorder la présente interview, à son retour de Paris, en septembre 2018. Elle résonne d’une humilité, d’une densité devant faire école, laisser tâche d’huile …     

Daté Atavito Barnabé-Akayi, à Cotonou, au cours d'échanges à bâtons rompus

Le Mutateur : Bonjour Daté Atavito Barnabé-Akayi. Vous êtes Professeur de Français et de Lettres, et vous revenez d'un séjour en France que vous a valu un prix. De quel prix est-il question ?

Daté Atavito Barnabé-Akayi : « De nature, je n'aime pas les concours ; ça me laisse voir un grain de prétention et peut-être même de vanité. Mais, je conçois celui-ci autrement : c'est une manière de montrer au monde ce qu’on fait, une manière de se laisser critiquer. Or, moi, j'ai fondé ma vie sur la critique. Pour faire plus clair, c'est comme se laisser visiter par un CP (Conseiller Pédagogique, Ndlr) ou par un Inspecteur ou, simplement, c'est comme [se] laisser critiquer par ses élèves !
Je crois que j'ai bien envie de me jeter à l'eau.
Et, je crois que tous les collègues devraient participer : au pire (il n'est pas de pis, en réalité), ils prendront leurs 'malheureuses' fiches pour faire leurs cours.
J'espère me libérer après les examens et m'y consacrer. Je souhaite de même aux collègues ».

Voilà, en partie, le courriel que j’adressai au groupe géré par Roger Koudoadinou, le Président de l’Association des professeurs de français du Bénin (Apfb), qui fait relayer le vendredi 2 juin 2017 l’information selon laquelle un concours proposerait aux enseignants de français béninois de concevoir une fiche pédagogique pour leur classe et de la proposer à francparler-oif.org . C’était un message reçu le lundi 29 mai 2017 de Fanny Kablan, la chargée de projets pédagogiques et multimédias de la Fédération internationale des professeurs de français (Fipf).
Dénommé « Tour d’Afrique en 24 fiches », le concours a regroupé six pays africains francophones : le Bénin, le Congo (Rdc), la Côte d’Ivoire, le Maroc, la Tunisie, le Sénégal. Il revenait à chacun de ces pays de dégager, dans un premier temps, quatre gagnants. Vous pouvez consulter les quatre gagnants béninois et leurs fiches sur ce lien-ci http://www.francparler-oif.org/concours-tour-dafrique-en-24-fiches-les-4-enseignants-beninois-laureats/ . 
Les Béninois ont puisé dans la banque de textes ( http://www.francparler-oif.org/1990-2015-25-ans-25-textes-de-lafrique-francophone-au-sud-du-sahara-et-de-locean-indien/), mise à notre disposition et ont pris pour appui des extraits d’auteurs comme Florent Couao-Zotti (’’Charly en Guerre’’), Véronique Tadjo (’’Loin de mon père’’), Ahmadou Kourouma (’’Allah n’est pas obligé’’), Sami Tchak (’’Place des fêtes’’). Les 4 enseignants béninois lauréats et les fiches qu’ils ont proposées rejoignent les autres pour former les 24 fiches (qui comprenaient le portrait du gagnant, le descriptif de l’activité, sa fiche pédagogique, sa fiche d’activités). Et, c’est parmi ces 24 fiches qu’un jury international a élu ma fiche meilleure.
C’est donc un Grand Prix attribué au concepteur de la meilleure fiche du Concours organisé avec le soutien de l’Organisation internationale de la francophonie (Oif), du CAVILAM-Alliance française et avec l’aide des Commissions Afpa-Oi (Association des professeurs de français d’Afrique et de l’Océan Indien).
Comme prévu, le grand gagnant que je suis devenu, a joui d’un stage de deux semaines (13 août-24 août 2018) au CAVILAM-Alliance française de Vichy en France, durant l’été 2018, dans le cadre des Rencontres pédagogiques du CAVILAM – Alliance française, tous frais compris (transport aller/retour, stage pédagogique, hébergement en famille).



A quoi avez-vous alors consacré votre séjour en France ?

J’étais donc fondamentalement en France pour jouir de ce Grand Prix, à Vichy. Mais, j’en ai profité pour me familiariser, à Paris, avec Sami Tchak dont le texte m’a porté chance. En réalité, je le lisais sans le connaître physiquement. Kangni Alem, par le truchement du Festival malien d’Ibrahima Aya, me l’a fait rencontrer en février 2017. Mais, le temps nous a manqué pour refaire le monde et discuter. Nous avons promis de nous voir le vendredi 3 mars 2017 à Lomé, lors de l’hommage que l’Etat togolais lui consacrait. Nous nous y sommes vus sans pouvoir véritablement discuter. En mars 2018, au Livre de Paris Porte Versailles, la situation ne s’est pas vraiment améliorée. Or, sitôt que j’ai su que je serais en France à l’été 2018, je l’ai tenu informé avant que le Ministre de la Culture ne nous envoie à Paris en mars 2018.

Entre autres, de gauche à droite, Sami Tchak, Daté Atavito Barnabé-Akayi, une amie et l'écrivain Gauz
Aussi dois-je préciser que le chroniqueur LaRéus Gangoueus, rencontré au Salon du Livre de Paris, m’a consacré un entretien lors de ce séjour, après avoir publié trois articles sur mes œuvres : https://gangoueus.blogspot.com/2018/08/interview-de-lecrivain-date-atavito.html ; https://gangoueus.blogspot.com/2018/07/date-atavito-barnabe-akayi-le.html ; https://gangoueus.blogspot.com/2018/07/date-atavito-barnabe-akayi-errance.html 



En quoi les acquis de ce séjour de prix vous aideront à être davantage bon dans votre métier d'enseignant ?

On ne finit jamais d’apprendre. Et, quelles que soient les expériences acquises, on aura toujours à apprendre.  En réalité, dans le processus d’apprentissage, ce qui m’apparaît de plus en plus clair, est qu’on se rend compte de l’immensité de son ignorance au fur et à mesure qu’on s’approche de la Connaissance.
Mon séjour à Vichy peut être considéré comme des vacances de travail. J’ai suivi, comme le rappellent les diverses attestations signées de Damien Chabanal (Université Clermont Auvergne), de Michel Boiron (Directeur Général de Cavilam Vichy-Alliance Française) et de Grégoire Lasne (Directeur Adjoint Responsable du Département de Français Langue Etrangère) diverses formations, différentes conférences et une rencontre littéraire.
Je précise que le Cavilam se définit comme le Centre d’approches vivantes des langues et des médias, pour rappeler que les 62 cours intensifs que j’ai suivis sont, entre autres, appuyés par des outils audiovisuels et par une connexion Internet permanente sauf, peut-être, la rencontre littéraire avec l’auteur Abdelkader Djemaï.
Que ce soient les formations intitulées ‘Les outils numériques pratiques pour faciliter la vie du professeur’, ‘Créer des séquences pédagogiques à partir de documents authentiquement oraux’, ‘Créer des séquences pédagogiques à partir de documents authentiquement écrits’ ou ‘Lexique et grammaire en action’, que ce soient les séances « Découvertes » intitulées ‘Faire entrer les arts dans la classe’, ‘Enseigner le FLE avec des marionnettes’ ‘Activités théâtrales simples pour la classe’ ou que ce soit la participation aux conférences comme ‘La France et les 70 ans de la Déclaration universelle des droits de l’homme (avec Christophe Rouge)’ ou ‘La culture : ce qu’elle nous fait, ce qu’on en fait (avec Jean-Marc Dépierre), les acquis de ce séjour sont énormes.
Au plan relationnel, j’ai été en contact avec plusieurs enseignants de divers degrés, de diverses nationalités d’Europe, d’Asie et, bien entendu, d’Afrique. J’ai vu des gens des deux Corées s’entendre et s’amuser ! Au plan pédagogique, je me souviens de Bachelard qui souligne que la science n’a que l’âge de ses instruments de mesure. Les conditions de travail et de vie de l’enseignant européen, tout le monde le sait, ne peuvent se comparer à ce qu’on continue de voir ici, au Bénin où, à l’heure de l’Approche Par Compétences, nous avons des établissements sans infrastructures scolaires (bibliothèques, médiathèques, vidéothèques, discothèques, laboratoires, équipements sportifs, …). Le système éducatif tend vraiment à la démocratisation de la Connaissance qui est pédocentrée, quand, nous autres, enseignants, ici, ne sommes guère guides.

De gauche à droite, Michel Boiron et Daté Atavito Barnabé-Akayi
Et, en tant qu’enseignant de français, ce qui frappe, ce sont les nombreuses possibilités qu’offre la Compétence disciplinaire N°1 : Communication orale : il suffit de se souvenir des usages qu’on puisse faire des documents filmiques, du journal télévisé, et même de la météo (Cf. Michel Boiron)… ! Les situations d’apprentissage convoquent véritablement tous les sens, le bon sens, y compris !
J’avoue avoir beaucoup appris, même si l’absence de connexion Internet et des Tic, dans nos classes et/ou dans nos bibliothèques, ici, saborde, sacrifie toute initiative innovante.
C’est ici que je remercie ma famille d’accueil Martine et Jacky Chaput.



L'année 2017 s'est révélé particulièrement brillante pour vous ; elle vous a vu remporter aussi le Prix du Président de la République, avec "Le chroniqueur du Pr". Vous sentez-vous particulièrement béni, chanceux ?

Chanceux, je le suis. Béni, je ne sais pas, car parler de bénédiction peut sous-entendre la présence d’un Dieu qui m’eût choisi parmi tant d’autres et m’eût béni et, dans ce cas, la question que j’aime à me poser : qu’ai-je fait, en particulier, pour mériter cette bénédiction ?
Je préfère m’intéresser à ce que je semble comprendre : la Chance. Je crois que je suis chanceux ou, alors, je veux bien parler comme Jacques Monod, quand il écrit, dans Le hasard et la nécessité, où il attribue à Démocrite : « Tout ce qui existe dans l'univers est le fruit du hasard et de la nécessité ».
J’ai eu de la chance mais la pièce elle-même la véhicule. J’ai eu de la chance d’avoir des lecteurs, des critiques, des aînés, des professeurs, des CP, des inspecteurs, des ministres et même du Président de la République, …, qui me soutiennent. Je remercie encore tous ces jurés qui m’ont lu et qui ont plébiscité cette pièce.



Comment parvenez-vous à être aussi bien un bon dramaturge qu'un bon professeur de Français ?

Il est le travail. Le travail perpétuel. J’ignore si je suis ‘bon’. Je crois plutôt que mon travail vient de ce que je suis convaincu que j’ai plus à donner qu’à recevoir de mon pays. Mais, à la vérité, je donne moins que mon pays le Bénin me le rend. Même si le véritable bilan se fait par le public, me rappelle l’Aîné Jérôme Carlos qui plaisante à dire qu’il susciterait une pétition contre ma plume si j’arrêtais d’écrire à 40 ans, je continue de dire, à plusieurs endroits, qu’autour de 40 ans, je ferai un bilan :
« Mais ce qui est certain, c’est que j’ai prévu d’arrêter d’écrire autour de 40 ans. Un arrêt pour faire le bilan de mes ouvrages. Ai-je évolué ? Ai-je contribué, d’une manière conséquente, au débat littéraire de mon pays ? Et, surtout, répondre à la question : ai-je encore quelque chose à dire ? Si la réponse est négative, je dois faire éteindre ma plume. Mais pour le peu de temps qu’il reste, je prévois d’embrasser d’autres genres tels que le roman, le conte, …
Profession de professeur ? Je préfère parler d’enseignant. Et, parlant d’enseignant, si j’arrive à poursuivre mes études, je crois savoir que l’avenir me réserve des surprises. Mais, mon métier
d’enseignant n’aura aucun avenir si, lors de mon bilan autour de mes 40 ans, je réalise que c’est un métier qui obstrue la voie pour m’épanouir et pour garder en sécurité ma petite famille. Mais, jusque-là, c’est un métier que j’ai choisi et qui me rend gai. » (in Apollinaire Agbazahou, Daté Atavito Barnabé-Akayi, Horizons osés et contagieux, Cotonou, Laha Editions, 2016, p.134).



Comment s'annonce, pour vous, l'année scolaire 2018-2019, en termes de projets ?

Parfois, moi qui ne suis pas fataliste, j’aime bien me laisser guider par le Vent !


Et si l'on vous demandait de prodiguer quatre conseils de réussite aux apprenants, en particulier, et à la jeunesse, en général ?

Pour être franc, je n’ai pas été un élève modèle. J’éviterai de donner, donc, des leçons. Il y a juste que mes professeurs et mes camarades de classe ou d’amphi, qui, pour la plupart, sont vivants, pour témoigner que j’arrivais parfois à m’illustrer avec de meilleures notes.
Mais, j’ai fait une remarque fondamentale : les apprenants contemporains manquent d’attention. Et, de plus en plus, ils brandissent les conditions difficiles des parents, comme un argument suffisant, pour ne pas travailler. Je crois que, justement, parce qu’on vient d’une famille modeste, on doit avoir beaucoup plus de raisons pour briller. Je pense, spécialement, à Aimé Césaire et à cette description de la machine à coudre, ’’Singer’’, de sa mère, dans Cahier d’un retour au pays natal.
Si je recommande à l’apprenant d’ouvrir tous les sens à l’enseignement que lui suggère le guide, à la jeunesse, je souhaite le travail, la persévérance, le sacrifice et la patience. Quand j’étais en Chine, j’ai cherché à saisir la psychologie des jeunes que j’ai côtoyés ; il y en a, sans doute, en Chine, qui rêvent de l’argent facile, mais ceux que j’ai interrogés sont plus préoccupés à servir la Chine au point qu’ils n’ont même pas le temps de se plaindre. Il faut que la jeunesse béninoise en arrive là ; il faut qu’elle en arrive à trouver des modèles en dehors des ploutocrates. Nous avons tous besoin d’argent, et Gandhi s’est fait bien clair : on a besoin du minimum pour être vertueux. Mais, la timocratie ne conduit nulle part. Ce n’est pas l’argent qui doit créer l’homme, c’est l’homme qui crée l’argent. Et, tant que notre vie se résumera à des machines à sous, on ne peut prétendre au développement. On doit éduquer la jeunesse à produire ; la consommation seule ne suffira jamais, qui nous rapproche d’ailleurs de l’animalité. Nous ne produisons rien et, c’est pourquoi, on doit privilégier, dans l’éducation, la production. Grâce à elle, on peut parvenir à l’autosuffisance et oser exporter pour tendre vers une balance commerciale harmonieuse.


Que pensez-vous qu'il puisse être fait pour une nouvelle année scolaire apaisée ?

Le rêve du Ministère de l’Enseignement secondaire, auquel j’appartiens, est de voir une année apaisée. Les députés, s’intéressant à la chose, ont opté pour un encadrement des débrayages. Je ne pense que les partenaires sociaux soient d’accord. Je ne pense pas non plus qu’ils veuillent paralyser le système éducatif : il suffit de jeter un coup d’œil en arrière pour se rendre compte qu’ils ont toujours œuvré à ‘sauver’ l’année scolaire in extremis. Je crois que, ce qui les dérangerait, c’est de constater une goutte de mépris à leur endroit ; je dirai même qu’ils se sont sentis dupés.
Il semble qu’ils aient accordé un moratoire au Gouvernement pour régler un certain nombre de points non négociables de la plateforme revendicative mais, à leur grande surprise, ils apprennent, comme tout le monde, ce que vous savez. J’espère que ne s’engagera pas un bras-de-fer entre les deux parties. Mais, ce que je veux bien croire, c’est que le Président de la République et l’actuel Ministre de l’Enseignement secondaire, quoi qu’on puisse dire, savent éviter le pire et sauront améliorer les conditions de vie et de travail des enseignants car, à la vérité, les conditions sont déplorables.
Mais, ce qui me surprend souvent, c’est le mutisme de l’Association des parents d’élèves. On dirait que ses membres sont peu préoccupés par la vie de ceux qui prennent soin de leurs enfants.  Ce n’est pas le lieu de demander aux syndicalistes d’éviter l’influence du « diviser pour régner ». Ce n’est pas le lieu, non plus, de leur demander de s’unir pour la bonne cause : ils le savent mieux que quiconque.
En réalité, c’est une question qui me tient à la gorge car, depuis que j’enseigne, il est rare qu’on passe une année sans mouvements de grève. Dans mon roman Errance chenille de mon cœur (2014), je fais dire à un personnage cette analyse, qui n’est pas loin de ma position :
« Sans contester la plateforme revendicative, ni condamner la stratégie de presser le patronat à satisfaire nos exigences, je voudrais croire qu’on peut inventer d’autres méthodes pour avoir gain de cause, au-delà de la cessation de travail partielle. A voir de près, et en me basant sur le statut particulier de l’enseignant (peut-être faut-il encore apprécier la constitutionnalité de mes inquiétudes), je réalise que les 72 heures (et bientôt plus ?) de grève font plus de mal aux enseignants (qui sont aussi parents d'élèves) qu’à personne d’autre ! En temps normal, vu la pléthore des classes, les questions d’infrastructures, de scolarité, le manque de capital humain bref les conditions difficiles des situations d’apprentissage, l’enseignant a du mal à finir le programme et à apprêter l’apprenant aux bons réflexes des situations d’évaluation. Depuis l’année blanche d’avant 1990, les grèves chroniques ont ramené les apprenants à un tel niveau qu’il est difficile à une âme honnête d’en présenter un bilan positif (en tout cas, en ce qui concerne les apprenants).
Or, rappelle Jean Piaget, quand l’élève échoue, c’est l’enseignant qu’il faut fesser !
Je le répète : je n’ai rien contre l’amélioration des conditions de vie et de travail des enseignants. Au contraire, il faut revoir le sort tragique du système éducatif, le dépolitiser par moments (puisqu’on ne peut pas toujours empêcher l’œil de l’exécutif de voir) pour des débats techniques sous l’esprit tutélaire des inspecteurs, des conseillers pédagogiques et des spécialistes en éducation. Au contraire, je martèle qu’il faut que le guide pédagogique soit heureux en vue de transférer cet heur sur chaque jeune cerveau auquel il a affaire dans sa classe et son environnement. Les grèves, telles qu’elles se sont déroulées jusque-là, y ont participé. Cependant, je voudrais qu’elles soient plus efficaces avec des dommages collatéraux moins nocifs. Car, comme beaucoup d’autres enseignants, j’accueille toujours avec peine quand à la fin, les responsables syndicaux qui ne sont pas forcément corrompus, disent : on va sauver l’année. Le recours au verbe sauver  n’est pas qu’hyperbolique ni métaphorique. C’est un verbe qu’il faut prendre surtout dans son sens dénotatif. Ce qui présuppose que ces responsables sont conscients que lorsqu’il est grève, le système éducatif – c’est-à-dire le développement – est en danger. En fait, qu’il soit apolitique ou non, l’enseignant n’est pas n’importe quel agent de l’État. Il est tel un président de la République respectable, muni d’un projet de société et soumis à un mandat déterminé. Qu’il ait bien réussi ou non, après son mandat, aucune prolongation n’est possible, en principe. Pourquoi alors s’infliger la torture de prolonger l’année scolaire, d’affronter quotidiennement les pluies diluviennes et les inondations de juin et de juillet, d’organiser comme précipitamment les examens de fin d’année à un moment où le système nerveux est épuisé et souhaite de belles vacances (quoique, hormis le repos et/ou le divertissement, ce soit la période par excellence pour remettre à jour ses connaissances) !
Mon rêve, tant que le patronat ne sera réceptif qu’à la menace des grèves, est que nous réfléchissions à ce que les responsables syndicaux délégués à la négociation nous amènent à faire pression sans risquer dangereusement d’abîmer le niveau intellectuel des apprenants, sans risquer de fabriquer des générations  sauvées, sans risquer de tester l’élasticité de l’année scolaire ni de réduire nos vacances. En conséquence, il faudra qu’on fasse grève sans jamais cesser d’administrer les cours. Et s’il faudra, malgré tout, invalider l’année scolaire, nous aurons au moins le sentiment d’avoir accompli notre mission de faire reculer l’ignorance. Dès lors, les délateurs ou les briseurs de grève qui estiment que la grève est un alibi pour prendre des pauses hebdomadaires en dehors du week-end, manqueront d’arguments : le débrayage ne peut être symptomatique de la paresse des enseignants. Et la question de défalcation se poserait en d’autres termes. Et parents d’élèves, et élèves (et même le gouvernement qui comprendrait plus d’un enseignant) sauront que la lutte des enseignants est la leur et ne vise nullement à instaurer le chaos ».

Propos recueillis par Marcel Kpogodo

lundi 16 août 2010

Littérature au Bénin

Daté Atavito Barnabé-Akayi, l'auteur du recueil









Parution à Cotonou d'un recueil de pièces de théâtre








L'auteur Daté Barnabé-Akayi, expliquant l'ouvrage : "[...] c'est vrai que l'Afrique est de la tradition orale, mais il faudrait parfois qu'on laisse de côté cette tradition orale pour rester dans la tradition de la pratique"





Chaque jour au Bénin, l’univers littéraire s’enrichit. C’est ainsi que sous le sceau des Plumes Soleil vient de paraître un recueil de deux pièces de théâtre, Amour en infraction et Les confessions du PR, écrites par Daté Atavito Barnabé-Akayi. Grâce à la générosité de ce jeune professeur de Lettres, nous entrons exclusivement dans l’intimité de ce livre, par l’entretien qu’il a bien voulu nous accorder. Sans qu'il en laisse rien paraître, Barnabé-Akayi est un boulimique de l'écriture.




Journal Le Mutateur : M. Daté Atavito Barnabé-Akayi, bonjour. Professeur de Français, vous vous illustrez par la pratique de l’écriture et, c’est en ce sens que vous venez de faire paraître un recueil de deux pièces de théâtre, Amour en infraction et Les confessions du PR. De quoi s’agit-il, respectivement, dans chacune d'elles ?





Daté Atavito Barnabé-Akayi : Merci. Dans ces deux pièces de théâtre, il s’agit dans Amour en infraction, de l’histoire de Saïd, un élève qui ne travaille pas trop en mathématiques et qui, régulièrement, à la fin de chaque cours, est prié d’attendre mais, à la fin, le professeur de maths, qui lui faisait cette demande, ne lui disait rien de précis. Alors, c’est ce qui s’est passé dans le premier tableau. Dans le second, nous avons Saïd en compagnie d’une élève avec qui il a rompu mais, celle-ci n’est pas trop d’accord pour cette rupture et est venue le menacer de lui créer des soucis, si jamais ils ne reprenaient pas ensemble. En réalité, Saïd a rompu parce qu’il a découvert qu’elle était sa belle-tante, c’est-à-dire la femme de son oncle ; il a estimé que c’était de l’inceste et qu’il ne pouvait pas cautionner cela. Finalement, la jeune fille a mis sa menace à exécution. Donc, nous sommes dans un troisième tableau où on présente Saïd qui remerciait le professeur de mathématiques qui lui demandait souvent d’attendre à la fin du cours, pour l’avoir sauvé, parce que la jeune fille qui était sa belle-tante et en même temps l’élève de madame Wali a accusé Saïd devant la police d’être un ’’Gayman’’, qui veut dire, chez nous, au Bénin, ’’Arnaqueur’’, ’’Cybercriminel’’, ce qui fait qu’on l’a emprisonné. Mais, grâce aux relations de Mme Wali, il a été libéré. Donc, c’est chez cette femme finalement que Saïd a compris que celle-ci était amoureuse de lui. Entre temps, Raïna, qui est la jeune fille, est venue, a essayé de tuer ces deux personnages et s’est aussi suicidée. Enfin, nous avons un quatrième tableau dans lequel Saïd se réveille et réalise que tout ce qui vient de se passer est simplement un rêve.



Dans la deuxième pièce, Les confessions du PR, il s’agit d’un président qui est venu se confesser à un prêtre qui lui posait des questions, parce que le président lui a demandé qu’il l’aide à répondre à des questions. Dans ce processus, le prêtre a abordé sa gestion du pouvoir, ses relations avec ses collaborateurs, sa vie privée, sa vie avec sa femme. Finalement, le vrai motif de ces confessions, c’est que le président voulait informer le prêtre qu’il avait mis une petite fille de douze ans en état de grossesse. Et, il se fait que, justement, dans son plan, il devait tuer l’homme d’église après que celui-ci aura reçu ses confessions, ce qui constituait pour lui une garantie que personne ne sache rien de ce genre de bassesse. Or, il se fait que le prêtre, en réalité, n’en est pas un vrai mais, le père de la fille avec qui le président a eu des problèmes de caleçon. Lorsque le chef d’Etat s’est rendu compte de la vraie identité du prêtre et aussi de sa qualité de chef de l’opposition avec qui il a de sérieux problèmes politiques, il décide de le tuer. Mais, l’opposant lui démontre qu’ils sont en direct sur des chaînes de radio et de télévision. Et, le président a compris qu’il ne pouvait pas commettre un meurtre en direct sur les grandes chaînes.







Au niveau des Confessions du PR, on constate beaucoup de situations qui se rapprochent un peu de ce que nous vivons au Bénin en politique, la tension politique, la prise d’ordonnances, par exemple. Est-ce qu’on peut dire que le président de la pièce incarne l’actuel chef d’Etat du Bénin ?

Il n’y a pas d’écrivain qui écrive en l’air ; ce sont forcément des faits réels qui l’amènent à écrire, mais l’autre problème aussi, c’est que, moi, je fais partie de ceux qui pensent qu’il ne faut pas tout écrire quand on écrit et qu’il faut respecter le lecteur, lui laisser la possibilité de deviner des choses, de penser à des choses, de dire que tel acte s’attache à telle personne ou à telle autre, de telle sorte que si vous, après la lecture, vous considérez que le président qui est décrit ressemble à un président que vous auriez reconnu, je crois que je dois respecter cette position.





En ce qui concerne la structure des deux textes, elle est complètement dépouillée, il n’y a pas d’actes ni de scènes, pas de tableaux, pas de titre au niveau des fragmentations. On a donc l’impression d’avoir affaire à un jeune dramaturge de la nouvelle génération qui s’inscrit dans une logique de nouvelles écritures …

Oui, c’est une très belle remarque ; il s’agit d’une nouvelle écriture sur plusieurs plans, comme vous l’avez noté : absence de didascalies, de scènes. C’est une nouvelle manière de rédiger la pièce de théâtre, ce qui permet au metteur en scène d’être relativement libre dans la mise en scène, dans les costumes, le décor, le bruitage, dans tout ce qu’il aura à faire. Donc, je crois quand même qu’aujourd’hui, il faudra essayer d’évoluer avec son temps et, c’est justement dans cette logique que je me suis permis de violer quelques lois classiques du théâtre. Si vous faites un peu attention, vous verrez d’ailleurs que l’origine du théâtre, c’est « Drama », « L’action ». Mais, quand on prend la première pièce, c’est-à-dire Les confessions du PR, on constate qu’il y a beaucoup plus de dialogues, beaucoup plus de paroles que d’actions ; c’est vers la fin qu’on sent quelques traces d’actions. Donc, c’est un moyen pour l’auteur de montrer qu’en politique africaine, il y a beaucoup plus de paroles que d’actions et, donc, qu’il faudrait qu’on pense à faire un peu plus d’actions pour faire prospérer le continent africain.







Finalement, quel est le message qui se dégage de chacune des deux pièces ?

Le message qui se dégage de la pièce Les confessions du PR, je crois que c’est un message de respect de sa parole, de respect de l’autorité de soi, c’est-à-dire que c’est un président mais, quand on voit ce qu’il a commis dans la pièce, ce n’est pas relativement digne d’un président. Donc, il s'agit du respect de soi et le respect de l'autorité par elle-même d'abord. Ensuite, on pourrait penser à l'exhortation des chefs d'Etat, des hommes politiques à l'action. La pièce étant venue juste après 50 ans d'indépendance, visiblement, au niveau du bilan d'actions, on n'a pas beaucoup de choses à se mettre sous la dent. En revanche, au niveau du bilan de paroles, on en a et, je crois qu'il faut qu'on quitte l'état des paroles ; c'est vrai que l'Afrique est de la tradition orale mais, il faudrait parfois qu'on laisse de côté cette tradition orale pour rester dans la tradition de la pratique.

Par rapport à la deuxième pièce, Amour en infraction, je l'aime bien, parce qu'elle traite de la jeunesse. Etant enseignant, c'est une pièce qui traite de l'éducation ; je crois que lorsque l'individu a la chance d'être bien éduqué dès le bas-âge, il peut éviter un certain nombre de choses quand il grandira. Donc, c'est une exhortation à la bonne éducation, tout simplement.

La pièce, Amour en infraction, par le dénouement, me rappelle un peu une autre pièce, Certifié sincère de Florent Couao-Zotti. Peut-on dire que tu t'es inspiré de lui pour exécuter le même dénouement ?

Florent Couao-Zotti a lu Amour en infraction, mais il n'a pas cru y reconnaître sa pièce ; Florent Couao-Zotti est un écrivain béninois que je respecte, que j'aime, que je consomme à satiété et, peut-être que, puisque toute la pièce est un rêve, peut-être que dans mon inconscient, sans m'en rendre compte, j'ai fait un clin d'oeil à Florent Couao-Zotti mais, au plan de la conscience, c'est une pièce que j'ai inventée de toutes pièces et je n'ai pensé à aucun écrivain en l'écrivant. Si, en tant que critique, vous estimez que cette pièce est inspirée de Couao-Zotti, je n'en sais rien.

Avez-vous d'autres écrits à votre actif ou en projet ?

Oui, bien évidemment. Vous savez, ce recueil de pièces que j'ai fait paraître est un accident, parce que mon voeu le plus cher était de faire sortir mon recueil de nouvelles, qui est mon premier ouvrage personnel ; sachez que, il y a à l'actif de deux collègues enseignants et amis qui me sont très chers, Anicet Mègnigbèto et Armand Adjagbo, et moi, des ouvrages d'ordre pédagogique. Mon voeu, au plan personnel, est de faire paraître un recueil de nouvelles, qui est, je crois, auprès des Editions Ruisseaux d'Afrique depuis l'année passée ; j'attends impatiemment ce livre intitulé L'affaire Bissi, sous-titré Il y a mieux que la neige, qui a d'ailleurs reçu la bénédiction, l'introduction de Florent Couao-Zotti et les post-faces de Claudine Nicolas, d'Apollinaire Agbazahou et même d'un professeur à la retraite à Bordeaux. Donc, c'est un recueil qui promet beaucoup de choses, qui montre mon côté traditionnel de l'Afrique, parce que c'est un recueil qui parle essentiellement de la tradition africaine, qui montre que je suis, non seulement progressiste, mais un progressiste qui pense qu'on doit s'inspirer de notre tradition. Au niveau du théâtre, je crois que, d'ici un à deux mois, nous aurons une nouvelle pièce intitulée : Quand Dieu a faim.

Espérez-vous faire carrière dans le monde de l'écriture, parallèlement au métier d'enseignant ?

Je suis un peu comme Apollinaire Agbazahou qui n'aime pas trop qu'on l'appelle écrivain ; il écrit par pédagogie, il écrit parce qu'il pense que ses élèves pourront facilement lire, étant donné qu'il est connu. En réalité, les élèves n'aiment pas trop les écrivains parce qu'ils estiment que ce sont des hommes un peu extraordinaires, alors que, lorsque vous connaissez quelqu'un qui écrit, vous avez plutôt tendance à lire ce qu'il écrit ; là, cela peut réellement aider à lire les autres qu'on ne connaît pas.

Donc, mon but, en écrivant, est pédagogique ; mes pièces ont déjà été mises en scène dans les écoles, et j'en ai d'autres, écrites, mais qui ne sont pas encore publiées et qui seront mises en scène ; faire une carrière d'écrivain, ce n'est pas mon rêve, mais plutôt écrire. D'ailleurs, j'ai toujours écrit dans ma vie.

Cela veut dire l'écriture, pour toi, aujourd'hui, est le résultat d'un processus qui a commencé depuis le bas-âge ...

Je crois que c'est le résultat d'un processus qui a commencé depuis le bas-âge ; depuis quand j'étais gosse, il y avait mon père qui était un grand lecteur de tout, il lisait les Zembla, les Amina, les Lancio Color, les revues scientifiques et même les revues bibliques Réveillez-vous des Témoins de Jéhovah, et même la Bible. En tout cas, mon père lisait un peu de tout et, moi, je m'étonnais qu'à tout moment, mon père soit avec un livre : même en mangeant, en allant aux toilettes, il lisait. Et, quand il finissait et qu'il déposait l'ouvrage, je le prenais à son insu et je le lisais. C'est comme cela que j'ai découvert la lecture. A l'école, je n'étais pas trop nul en lecture non plus, et quand je suis devenu collégien, les petites lettres d'amour étaient obligatoires en notre temps, parce qu'il n'y avait pas les sms, il n'y avait pas de portable ; forcément, il y avait de petites notes qu'on s'échangeait. Ensuite, je me suis décidé à l'écriture, j'ai écrit, mais je n'ai jamais pensé à me faire publier ; mon rêve, en réalité, était de me faire publier après ma mort, j'ai toujours aimé les Pensées de Blaise Pascal, qui ont été publiées après sa mort. J'ai bien envie d'avoir des oeuvres posthumes. Mon voeu d'écrire était vieux, mais celui de publier est vraiment récent ; il est né après l'ouvrage que j'ai conçu avec mes amis Anicet Mégnigbèto et Armand Adjagbo. Quant j'étais étudiant, j'écrivais dans la presse, j'avais travaillé avec L'aurore et avec d'autres organes de presse, mais je n'avais vraiment pas envie de publier, j'écrivais juste comme cela.

Et si tu étais un homme politique célèbre, tu serais qui ?

(Rires). Sans vous mentir, je n'ai jamais rêvé d'être un homme politique, mais, comme nous sommes dans l'imaginaire, j'ai bien envie de ressembler à Mandela.

Et si tu étais un roman ?

J'ai des goûts bizarres ; il n'y a aucun roman qui me plaise à 100%, je n'ai pas un roman réel en tête, mais je dirai que c'est la somme de plusieurs romans.

Un parfum ?

(Rires). C'est bizarre ; il y a l'odeur de cola qui éveille beaucoup de choses en moi.

Une couleur ?

J'aime le blanc et le noir, ou bien, je cherche l'intermédiaire entre le blanc et le noir.

Un repas ?

J'aime beaucoup l'escargot fait avec "amala" (Ndlr : pâte de coussettes d'ignames). Ce n'est pas une nourriture de chez moi, mais j'aime ça.

Une pensée ?

J'aime l'extrait des Pensées de Blaise Pascal qui dit : "Pour fare la grandeur de l'homme, travaillez à bien penser".

Une idéologie ?

Je crois que l'idéologie à laquelle je pense est défendue par Voltaire, Aimé Césaire, par beaucoup de gens, et je vais résumer cela à la liberté, la tolérance.

Un idéal de vie ?

Peut-être l'amour, l'amour prôné par les hommes, l'amour réel, pas l'amour propre, mais l'amour sale, l'amour humain, c'est-à-dire l'amour qui aime et qui haît à la fois, mais qui ne fait pas du mal parce qu'il est préconçu, parce qu'il est prémédité ; c'est l'amour qui fait du mal sans s'en rendre compte.

Une femme ?

Bien sûr, ma femme ! (Grands rires).

Un homme inoubliable pour toi ?

Sans mentir, beaucoup d'hommes m'ont marqué, mais celui qui m'a le plus marqué, c'est quelqu'un que je ne connais pas : Dieu.

Une ville ?

Lagos.

Une carrière ?

Bien sûr, celle que j'ai, l'enseignement.

Propos recueillis par Marcel Kpogodo