Franck Hantan est un artiste
béninois tenturier, peintre et sculpteur. Dans sa démarche de travail, il franchit
ses paliers, traversant des étapes, explorant, chaque fois, de nouvelles
phases, pour un but à deux bras, qui, lui, manifeste sa persévérance : l’immersion
dans la pratique séculaire de la tenture par ses ancêtres d’artistes, et la remise
au goût de l’actualité de pratiques que la religion africaine, dénommée le ’’vaudun’’,
retient comme salvatrices pour l’homme. Ce second aspect, qui valorise la
démarche artistique de ce créateur, fonde une nouvelle affinité de toiles que
Franck Hantan soumet à la découverte du public : ’’La série des initiés’’. Plus de
détails dans cette interview …
Franck Hantan |
Le Mutateur
: Bonjour Franck Hantan. Vous êtes un artiste peintre et, un peu sculpteur, qui
s’affirme par la pratique modernisée de l’art de la tenture, hérité des
ancêtres, ce qui s’est rendu remarquable par votre dernière exposition du 21
octobre 2017 à Cotonou, intitulée ’’Succès’’. Presqu’un an après cet événement,
quel bilan pouvez-vous faire de cette exposition ? A-t-elle été un succès ?
Franck Hantan
: Ma dernière exposition du 21 octobre 2017, à Cotonou, intitulée ’’Succès’’,
était déjà un succès avant d’être car, le succès, pour moi, est l’avancement
dans ma création et l’ouverture qu’elle m’apporte. Je peux donc dire que cette
exposition a été un succès car elle m’a permis de décrocher d’autres
expositions en Europe.
En mars 2018, vous avez
tenu une autre exposition à Paris. Dans quelle galerie l’avez-vous organisée ?
Quel en était le thème ? Quelles œuvres pouvait-on y voir ?
Le 26 mars 2018, j’ai
tenu une autre exposition à Paris, sous la direction de la Galerie ’’Arts
Design Africa’’. Le thème de cette exposition était ’’Houindonomboua’’, ce qui
veut dire, en langue fon, « La culture
ne s’éteint jamais ». On pouvait y voir quelques œuvres de ma collection
’’Succès’’ et de ’’La série des initiés’’.
En ce début du mois de
septembre 2018, la Page Facebook de la ’’Galerie Hantan’’ laisse admirer de
nouvelles œuvres, celles de ’’La série des initiés’’. Une nouvelle démarche
semble se dessiner, celle de la rentrée. Pouvez-vous nous expliquer ?
Pouvez-vous nous décrire cette nouvelle démarche ?
’’Les initiés’’ est une
série sur laquelle je travaillais avant l’exposition du 26 octobre 2017. Cette
inspiration vient des divers aspects de Gbôzunmê, la forêt sacrée où vivaient
mes ancêtres avant d’être capturés comme esclaves par le roi Agadja, et aussi de
mon attachement à l’environnement sain, au terreau.
Apparemment, ces œuvres
abordent des réalités historiques et culturelles typiquement béninoises.
Pouvez-vous les évoquer ?
« La culture nous
apparaît comme la connaissance de ce qui a fait de l’homme autre chose qu’un
accident de l’univers », a affirmé André Malraux, pour signifier l’importance
de la culture en chaque être humain.
Platon ira plus loin en affirmant qu’ «
une culture est le mode de vie d’une société ». Chaque individu, chaque peuple
n’existe donc qu’à travers sa culture. La culture étant vaste et très
diversifiée, surtout, dans mon pays aux multiples facettes comme le Bénin, il
paraît judicieux de l’aborder au travers d’un de ses pans les plus importants,
notamment, le ’’vaudun’’.
Quel message
voulez-vous faire passer par ces œuvres ?
''Le temple des pythons'' et ... |
''Place Agondji'', deux toiles de ''La série des initiés'' |
Dans cette série, je
veux expliquer que l’initiation dans le vaudun comporte plusieurs étapes :
l’isolement, l’initiation, les initiés, la danse des initiés et, les jumeaux,
qui sont un peu spéciaux.
Elles vous ont demandé
combien de temps de travail ?
Il m’a fallu environ
trois mois pour les réaliser.
Pour vous qui vivez et
travaillez en France, quel est le sens de votre recours à ces réalités
historiques et culturelles typiquement béninoises ? Nostalgie ? Excitation de
vos compatriotes à un retour aux sources ? Rappel historique ?
Je veux révéler les
valeurs culturelles, cultuelles et historiques de mon pays, le Bénin, pays de
l’Afrique de l’ouest, à travers le monde entier.
Ces œuvres montrent
l’abandon de l’art modernisé, à votre goût, de la tenture. Cet abandon est-il
momentané ou définitif ?
Non, ce n’est pas un
abandon, car il y a toujours la présence de l’histoire des tenturiers, Hantan et
Zinflou, dans chaque œuvre créée. Les fils tissés que j’applique sur mes œuvres
constituent l’héritage que j’ai gardé de l’art de mes aïeux.
Il nous a semblé que
vous vous lancez simultanément dans la sculpture. Qu’en est-il ?
Oui je fais aussi de la
sculpture à partir de mes pots de colle et de peinture. Je sculpte surtout
quand je n’ai pas beaucoup d’inspiration pour peindre.
Avez-vous des projets
pour le Bénin ? Lesquels ? Dans quelle durée ?
En août dernier, j’ai
été reçu par Madame Gaëlle Baujean qui est conservatrice au Musée ’’Jacques
Chirac’’, à Paris. Lors de cette rencontre, j’ai découvert trois tentures
réalisées par mes ancêtres vers les années 1800. Reprendre ces tentures, dans
une nouvelle technique, puis en faire une grande exposition itinérante, en
commençant par mon pays, est mon objectif. Le sens de cette exposition sera une
plongée dans l’histoire du Danhomè. Et, je pense la faire vers la fin de 2019.
Propos recueillis par
Marcel Kpogodo
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