dimanche 5 octobre 2014

Selon Denis Abiona : « [...] quand on ne parvient pas à tirer le drap de son côté, on sème le désordre … »

Dans le cadre de l'élection manquée des représentants du secteur théâtral au Ca/Fitheb


Plus de trois semaines après l’élection manquée des représentants des comédiens, des metteurs en scène et des dramaturges dans le Conseil d’administration (Ca) du Festival international de théâtre du Bénin (Fitheb), Denis Abiona, candidat favori des metteurs en scène, a accepté de se confier à nous pour faire partager son analyse des événements, en appelant au consensus.


Denis Abiona
Stars du Bénin : Bonjour M. Abiona. Nos informations nous permettent de croire que vous étiez le favori, pour le compte des metteurs en scène, lors de l’élection qui devait se tenir le vendredi 12 septembre dernier, dans le cadre de la désignation des représentants des comédiens, des metteurs en scène et des dramaturges dans le prochain Conseil d’administration (Ca) du Festival international de théâtre du Bénin (Fitheb). Finalement, cette élection n’a pas eu lieu. Pouvez-vous nous dire ce qui s’était passé ?

Denis Abiona : Ce qui s’était passé réellement, c’est que, à l’entrée, ce jour-là, les membres du bureau de vote ont d’abord commencé par vérifier les agréments, ce qui leur a permis d’éliminer, déjà, tous ceux qui n’appartenaient pas au secteur du théâtre. Donc, ils ont fait entrer tous ceux qui avaient un agrément lié à la danse et au théâtre ; c’est ceux-là qui ont été acceptés dans la salle, pour les élections.
Mais, force est de constater que quand les choses sérieuses devaient commencer, les amis ont commencé à soulever un certain nombre de préoccupations que j’avais trouvé légitimes, parce qu’ils ont parlé du décret ayant fixé les conditions de déroulement de l’élection. C’est vrai qu’au niveau de ce texte, il y a des choses qu’on peut corriger, mais, là, le moment n’était pas opportun pour le faire. Quand le débat a évolué, j’ai compris qu’en réalité, les amis s’attaquaient à ma personne ; ils disaient me voir plus dans le domaine de la danse que du théâtre, alors que, moi, je suis metteur en scène, chorégraphe, artiste chanteur et compositeur, je suis Directeur artistique et pédagogique du Centre artistique et culturel (Cac) ’’Oshala’’. Or, dans cette structure, nous faisons du théâtre, de la danse, de la musique, un peu de tout ce qui concerne les arts de la scène.
Donc, ils ont commencé à contester ma présence dans la salle, puisqu’ils prétendaient que mon électorat venait plus du milieu de la danse. Prenons, par exemple, Adolphe Alladé, qui est, certes, connu pour la danse, mais, qui a quinze dates de tournée nationale, chaque année, pour le théâtre. Nos amis disaient que nous avons amené des gens du ballet, alors qu’Adolphe fait de la danse et du théâtre. Des gens comme Stanislas  Dègbo aussi étaient là.
En bref, comme mes amis ont vu que j’étais quand même avec un nombre d’électeurs, qui allait me permettre de gagner, ils ont commencé à faire du bruit … Mais, je dis à mes amis qu’il y a un malentendu entre nous parce que, même quand je prends la danse, il y a une mise en scène qui se fait ; surtout quand vous faites de la danse thématique, vous travaillez autour d’un thème. Donc, il y a une mise en scène qui se fait. En dehors de cela, nous faisons aussi du théâtre, dans son genre populaire et, même au sein du Cac ’’Oshala’’, nous faisons le genre classique ! Voilà que les amis disent que nous sommes seulement du côté de la danse ; cela a fait que les élections n’ont pas pu se dérouler.
Personnellement, j’attends. J’ai appris qu’ils ont écrit et j’ai consulté ma base, parce que, après tout, je suis membre de la Fédération nationale des troupes de danse et de théâtre du Bénin. Nous attendons de voir quand la Direction de la Promotion artistique et culturelle va convoquer le corps électoral pour le déroulement des élections.


Nous avons entendu dire qu’à cette élection, il y avait plus de votants dans le camp du ballet et de la danse que dans celui du théâtre classique. Est-ce que vous confirmez cela ? Comment avez-vous fait ?

Comme vous le savez, quand il y a une élection, il faut battre campagne. Moi, de mon côté, comme je suis de la danse et du théâtre, j’ai contacté les amis qui font la même chose que moi et, ils ont répondu présents, ils sont venus là pour me soutenir. C’est vrai que, si l’élection s’était passée, ceux qui étaient là auraient voté pour moi. Et, même ceux qui font du théâtre classique sont aussi venus  voter pour moi. Donc, j’avoue que j’avais la majorité, ce jour-là. 


Est-ce que vous confirmez qu’il y a une différence entre les hommes du ballet et du théâtre, d’une part, et ceux du théâtre pur, d’autre part, surtout qu’on entend dire que les premiers n’ont pas fait de longues études, qu’ils n’ont pas un niveau intellectuel élevé, qu’ils sont plus brutaux, plus instinctifs, alors que les seconds seraient plus intellectuels ?

Ecoutez, à quoi comparez-vous l’intellect ? Ce jour-là, mon électorat n’avait pas le manteau de danseurs. Je ne voulais même rien dire … Quand certains se voient plus intellectuels, ils veulent me dire que, parmi eux, ils ont tous des diplômes universitaires ? Quand on fouille, ce n’est pas vraiment le cas ! Moi, de mon côté, j’ai fait au moins un Bac+2 ! Donc, on ne peut pas me dire que je ne suis pas un intellectuel … C’est vrai qu’au niveau du théâtre populaire, il y en a beaucoup qui n’ont pas fait de grandes études, ce qui fait qu’on a l’impression que ceux-là sont des gens qui ne réfléchissent pas, alors que l’intellect n’est pas synonyme de diplôme. Moi, je ne veux pas entrer dans ce débat. Quand ils disent que, dans notre groupe, nous n’avons pas de grands diplômes, je le leur concède. Mais, dans ce que nous faisons, on se connaît ; quand on entre dans le domaine du théâtre classique, on sait qui fait quoi et qui a quel diplôme ; on se connaît …
Donc, avec cette affaire de diplôme, ils cherchent tout simplement des prétextes pour distraire l’opinion publique, dans je ne sais quel objectif …


Est-ce que vous pouvez présenter un peu votre parcours ?

J’appartiens au Centre artistique et culturel ’’Oshala’’, ’’Oshala’’ qui veut dire ’’La grande divinité’’. Mais, je n’ai pas commencé mes expériences avec cette structure, j’étais le metteur en scène et le chorégraphe de l’Ensemble artistique et culturel ’’Towara’’, que tout le monde connaît. C’est à ce niveau que j’ai commencé à faire de la mise en scène. Par la suite, j’ai décidé de prendre mes responsabilités et, c’est là où j’ai mis en place le Centre artistique et culturel Oshala, en 2006 ; nous y faisons de la danse, du théâtre, de la musique moderne d’inspiration traditionnelle. Chacun de ces domaines constitue une section avec, à sa tête, un responsable. Concernant le Cac ’’Oshala’’, j’en suis le Directeur artistique et pédagogique. Nous nous sommes lancés dans la formation des élèves, une des activités du Centre, puisqu’ils constituent la relève efficiente de demain.


Avez-vous un appel à lancer ?

Nous avons l’obligation de nous mettre ensemble pour que la politique n’entre pas dans la culture, parce que tout se passe de telle sorte qu’aujourd’hui, on veut tout politiser si bien que quand on ne parvient pas à tirer le drap de son côté, on sème le désordre. L’appel que j’ai à lancer est que, nous sommes dans le domaine et nous y resterons, donc, si nous sommes divisés, on ne peut rien ; il faut que nous restions soudés et que nous nous entendions. Il faut que nous cultivions l’écoute ; quand l’autre parle, il faut que son interlocuteur ait la patience de l’écouter. Pour finir, je dirai que « ce qui nous réunit est plus fort que ce qui nous divise ».



Propos recueillis par Marcel Kpogodo

samedi 4 octobre 2014

Lettre à François Mensah

« Nous t’avons laissé t’enliser … et mourir … Nous sommes des criminels ! »




Cher François,

Si, désormais, nous appelons ton numéro, ce n’est pas ta voix qui nous répondra. C’est fini … C’est définitivement fini … C’est cruel, mais, c’est comme ça !

Ce qui me fait pleurer, ce qu’à quelque niveau que l’on se trouve, nous sommes responsables de ton départ tragique et définitif …

Nous t’avons vu t’enliser et nous n’avons rien fait … Nous t’avons laissé t’enliser et … mourir … Nous sommes des criminels et je n’en dirai pas plus.
Tous ceux qui me lisent savent de quoi je parle, ce qui fait que je n’ai aucunement besoin d’entrer dans les détails.
Nous sommes responsables de ta mort, parce que, dans toute cette grande corporation journalistique, que ce soit de la presse écrite, de la radio, de la télévision ou de la presse en ligne, aucun d’entre nous n’a su trouver la méthode pour toucher ton cœur et pour contribuer, par ce fait, à ce que tu ne t’enlises pas.

Hé, hé !

Du côté des puissants, de ceux qui ont le pouvoir, quel qu’il soit,
Du côté de ceux qui ont d’énormes moyens financiers,
Du côté de ceux qui peuvent produire un impact, un résultat direct, positif et efficace sur toute situation, d’un simple claquement de doigts,
Du côté des grands,

Vu ce que tu étais – Pourquoi je dis « étais », tu es ce que tu es éternellement ! Donc, je me reprends –
Vu ce que tu es,
Vu ta carrure intellectuelle et professionnelle,
Vu ta mémoire à nulle autre pareille sur les faits sportifs d’archives, une mémoire aussi éléphantesque et fondamentale que celle de ce BAOBAB béninois de la presse sportive, ce MONUMENT, cette ICÔNE – Tu comprends bien que je parle de l’inoubliable et inclassable, Félix Sohoundé Pépéripé,
Vu ta manière exceptionnelle de développer, de traiter l’information sportive, aux côtés de l’autre excellent de Canal 3, en la matière, Sulpice Oscar Gbaguidi,
Vu tes chroniques sociales des vendredis, toujours attendues, émouvantes et ’’interpellatives’’, comme celles, pointues et remuantes, toujours de cet autre Sulpice Oscar Gbaguidi, que tu as dignement remplacé lorsqu’il est parti en voyage,
Vu ta langue parfois acerbe et impartiale, intelligente et gênante,  
Vu tout ce que tu es de bon et qui faisait que tout le monde se scotchait sur Canal 3, très tôt, tous les matins,
Vu l’excellence que tu es – Et, je ne te flatte pas, pour me complaire dans les basses et hypocrites exigences de l’oraison funèbre,
Vu ce que tu es, en tant que François Mensah et que personne ne sera jamais,

Penses-tu que tu serais décédé, laissé à toi-même, au Centre National Hospitalier et Universitaire Hubert Koutoukou Maga, ce mouroir dont la célébrité est faite en la matière pour les causes de coma profond, si tu étais né sous un autre nom ?
Penses-tu que tu serais décédé, laissé à toi-même, si tu avais été le fils de l’un de ces puissants qui viennent, un à un, signer le livre des condoléances, qui passent te rendre hommage, à titre posthume, quand l’irréparable est fait, certains poussant l’ignominie jusqu’à laisser des enveloppes financières pour ta fille, Maéva, maintenant, comme pour se racheter de leur crime de non-assistance à personne en danger ?
Penses-tu que tu serais décédé, laissé à toi-même, si tu étais l’un des thuriféraires ’’ventrocrates’’, du régime en place du Docteur Boni Yayi ?

Si tu étais dans l’un ou l’autre de ces trois cas de figure, on t’aurait évacué, en un tourne-main, mon Frère et, d’un de ces pays où les soins de santé inspirent respect, confiance et salvation de la vie humaine, on aurait eu, peut-être, en direct, de tes nouvelles d’une santé en reconstruction,

On ne se serait pas contenté de demander qu’on prie pour toi …

François, je te le dis, du fond du cœur, nous sommes tous des criminels, tout ce peuple qui t’adulait tant pour ton courage de langue et d’intellect, tout ce peuple qui ne t’aimait pas pour tes qualités d’ ’’aiguillonneur’’, d’objecteur de conscience, tout ce peuple est criminel ! On devrait, autant les dix millions de Béninois que nous sommes, nous arrêter un à un et, comme les policiers savent si bien le faire, nous déférer devant un juge et nous faire mettre en garde-à-vue, en attendant que notre culpabilité soit effectivement établie, que nous soyons, chacun, jugés et condamnés à une peine bien réfléchie de prison !

Nous sommes un peuple si méchant qui ne sait parfaitement gérer les situations que lorsque l’irréparable est fait …

Le peuple béninois !

Nous sommes un peuple qui excelle dans un métier formidable, celui du MEDECIN APRES LA MORT …

De mon côté, je te voyais, quelques fois, dans mon quartier ; tu venais y rendre visite à un ami qui est un peu devenu mon ami, parce qu’il était ton ami – Qui aurait laissé passer la grâce, la chance d’être l’un de tes amis, toi qui nous aidais beaucoup, professionnellement, en lisant, expressivement, la une de nos journaux, sur l’incontournable ’’Actu- Matin’’ – Que Dieu bénisse à jamais celui qui a inventé cette émission !

Que des messes soient organisées à l’intention de la protection et de la longévité de ce génial qui a inventé cette émission !        
Que des prières soient organisées dans tous les lieux de culte du pays pour ce créateur, pour le père de cette émission qui, désormais, appartient au quotidien ces Béninois, ingrats que nous sommes !
Que des messes de remerciements et des prières de protection soient organisées à l’intention d’Issa Salifou, de Malick Larry Gomina, des autres Berthe Cakpossa, André Dossa, Hermann Aniambossou, Barnabé Salanon, de tous les autres journalistes, de tous les techniciens, de tous les hommes de l’ombre comme de la lumière, pour la joie de vivre qu’ils nous donnent, par l’existence qu’ils font, au quotidien, de Canal 3-Bénin et de Canal 3-Monde !

Ce n’est pas seulement le Docteur Boni Yayi qui mérite les messes et les prières …

De mon côté, donc, je te voyais, quelques fois, dans mon quartier ; tu venais y rendre visite à un ami qui est un peu devenu mon ami, parce qu’il était ton ami … Ai-je jamais eu le courage de te parler ? Pour contribuer à ce que tu ne t’enlises pas et que tu vives 33, 45, 65, et même 120, 132 ans ?

Je ne crois pas … Ma pensée n’a jamais pu se matérialiser à travers des paroles bien mûries, pour me faire entendre de toi.

Je peux dire que je suis responsable de ta mort …
Et, je te le dirai, très vulgairement : « Nous sommes tous dedans … Nous sommes tous dans ta mort … »
Et, c’est regrettable. Peut-être que ton départ pour la vie nous édifiera, édifiera beaucoup de gens …

Tu n’es plus là, mais, contrairement à ce que tous croient, contrairement à ce que tes détracteurs de tous ordres qui jubilent croient, tu es plus vivant que jamais !
Du lieu de lumière où tu nous vois, du lieu de gloire où tu liras cette lettre, vois-tu tous les hommages à ta personne de 32 ans ?
Vois-tu déjà ton nom inscrit au fronton du Studio de la chaîne de télévision où tu officiais courageusement, d’où toute ton équipe et tes collègues de travail continueront à émerveiller le peuple béninois ?

C’est cela, la vie, la vie éternelle …

Je crois que tu vis plus que jamais, même si, à regret, je ne te verrai plus venir voir ton ami, dans ma rue …

A toi, François, qui me faisais le plaisir de lire sur ’’Actu-Matin’’, la une de mon journal, le Quotidien ’’Le Mutateur’’ … Nous, tes confrères de la presse écrite, te rendons un hommage particulier, pour ce service publicitaire que tu as continué à nous rendre, jusqu’à une date plus que récente …

Merci, François …


Marcel Kpogodo