Dans le cadre du
concert du Groupe à Cotonou
La Paillotte de
l’Institut français de Cotonou a été grandement secouée dans la soirée du
vendredi 13 avril 2018. C’est à la faveur du concert qu’y a donné le Groupe
franco-burkinabé, ’’Sabwana orchestra’’. Alors, le public a vibré au rythme de
la forte vitalité instrumentiste, véhiculée par les membres de l'orchestre de jazz.
Le ''Sabwana orchestra'' (De gauche à droite, David Yaméogo, Jessie Ouédraogo, Sosthène Ouédraogo, Colin Mousser et Petit Solo Diabaté) |
Vingt-et-une heures
tapantes et des notes de balafon lancent un concert qui va durer
quatre-vingt-dix minutes environ, dans une atmosphère d’embrasement du public
pour un peu plus d’une dizaine de morceaux : ’’Blakyne’’, ’’Sabwana’’,
’’Curyse’’, ’’Ylop’’, ’’Débora’’, ’’Naaba Naaba’’, ’’E djè ka djo’’,
’’Sababou’’, ’’Célestia’’, ’’Night in Bobo’’, ’’Badenya’’ et ’’Zigribiti’’. Le
délice musical qu’ont savouré les spectateurs le vendredi 13 avril 2018, en
soirée, au concert qu’a donné le Groupe ’’Sabwana orchestra’’, sous la Paillotte
de l’Institut français de Cotonou. Colin Mousser, qui va se révéler un
saxophoniste vivant à fond chaque son que son souffle lui permet de générer,
entre en scène en émergeant du public ; les deux guitaristes, Sosthène
Ouédraogo, l’ ’’électriste’’, et Jessie Ouédraogo, le bassiste, font leur
apparition des coulisses, de même que le batteur, David Yaméogo, puis, voilà
Gautier Gêne, prenant le contrôle de la régie, qui répartit une lumière rouge
et claire sur la scène : le morceau introductif donne le ton d’un concert
engagé qui va donner du tonus.
Cette tendance se
confirme au fil du déroulement. Une musique rendue jazz par l’agencement mesuré
des coups de baguette sur les différentes cymbales, avec les coups harmonisés
que reçoivent les styles de tambours, une rythmique qu’intègrent les notes que
dégagent les deux guitares dont les cordes sont grattées ou secouées, selon que
se stabilise ou monte l’intensité de la fièvre du message que ressentent les
manipulateurs de ces instruments de musique. Et, une affinité de taille :
celle que développe Petit Solo Diabaté, le joueur de balafon, avec le batteur à
partir de l’accord lointain de qui il fait entrer en symbiose les notes douces
qu’il laisse échapper de sa machine héritée de la séculaire tradition musicale
mandingue. Spectaculaire et polyvalent, ce balafonniste ne varie en rien son
comportement de quête d’entente avec David Yaméogo lorsqu’il se déporte sur ses
percussions dont les battements communient étrangement avec les coups de
batterie. Avec Petit Solo Diabaté, le jazz vire à l’afro, ce qui épanouit ceux
dans le public qu’enchantent la grande capacité de provocation de remuement du
corps de la part de la musique africaine, très dansante, qui a fait se lever et
bouger beaucoup de spectateurs, tantôt spontanément, tantôt sur demande des
musiciens.
Le côté purement jazzy
du Groupe, c’est aussi la place laissée, dans la plupart des morceaux, à
l’expression des instruments ; ’’Sabwana’’, ’’Naaba Naaba’’,
’’Sababou’’
et ’’Badenya’’
sont alors les seuls dans lesquels David Yaméogo, Jessie Ouédraogo, Petit Solo
Diabaté et Colin Mousser auront fait découvrir leurs bonnes capacités
chorales.
Particulièrement, Colin
Mousser s’est parfaitement intégré à cette belle ambiance, manifestant la
partition de son précieux souffle à travers la mélodie de son saxophone, dans
laquelle tout se trouvait engagé en lui, que ce soit son âme, son esprit et,
très visiblement, son corps qui, se propulsant, à des moments donnés, au-devant
de la scène, se courbait, se pliait en deux, sous l’impulsion d’une fougue
intérieure, donnant l’impression que le musicien allait se retrouver au sol.
Impresario de service, faisait luire son visage la satisfaction qu’il éprouvait
de se donner entièrement au spectacle, pour un public qui suscitait en lui une
simple ambition : le combler.
De toute évidence,
l’homme de la soirée aura été Petit Solo Diabaté, dans le déploiement, d’abord,
d’une énergie physique bien répartie, totalement généreuse, pour les besoins de
la cause du comblement du public, de la manifestation de la spécificité dansante
et remuante, émouvante de la musique africaine ; il se distribuait amplement
entre son balafon et trois tambours de percussions, sans pour autant donner
l’impression d’en ressentir de la fatigue, ses mains battaient ardemment la
mesure sur ceux-ci, et son visage en rayonnait, il prenait du plaisir à
procurer du plaisir …
Ensuite, Petit Solo
Diabaté jouait juste et bien, faisant voyager l’esprit, en dépit de l’ambiance
surchauffée du concert, par le doux son multiforme qui émanait de son balafon
que balayaient des baguettes manipulées par ses doigts si agiles.
Enfin, le Groupe, dans
son emble, aura davantage impressionné quand, à la fin du concert, devant un
public qui en redemandait, les membres de l’orchestre n’ont eu d’autre choix
que de concocter une improvisation acoustique mettant à l’honneur le gong
géminé de chez nous, fusionnant avec de la percussion ! Un signe de la
capacité du ’’Sabwana orchestra’’ à intégrer des instruments musicaux
spécifiques, des rythmes locaux.
Segun Olabissi |
A accompagné le
’’Sabwana orchestra’’, celui qu’il est devenu ordinaire d’appeler le ’’plus
Béninois des Nigérians’’, Segun Olabissi. Bête de scène, sa voix tonnait, il y déambulait,
stimulant le public à accompagner le mouvement.
Engagement et écologie
De longues branches de
palmier décoraient de part et d’autre la scène, laissant pressentir chez les
musiciens une tendance écologiste, et même d’engagement, surtout qu’une
certaine uniformité a frappé, en ce qui concerne leur accoutrement de scène :
faisait l’unanimité, au niveau d’eux tous, la cravate multicolore en tissu dit
africain, ainsi que le pantalon jeans. Celle-ci distille le message de la
fusion entre l’Afrique et l’Occident, la cravate étant culturellement de lui,
le tissu, du continent des Afro-descendants, en grande majorité. Du côté du
jeans, il symbolise le travail acharné sans quoi rien ne s’acquiert ni ne se
conquiert, ce travail dans lequel s’engagent les membres du ’’Sabwana
orchestra’’, pour donner corps à leurs objectifs, à leur vision. Se rapportant à
la chemise, elle est de couleur kaki chez certains, verte, noire ou rouge chez
d’autres, ce qui témoigne de la variété, de la multiplicité des choses, des
cultures, de leur complémentarité.
Et, à en croire Jessie
Ouédraogo, porte-parole de circonstance, sur la scène, le ’’Sabwana
orchestra’’, né depuis quatre ans, s’implique, au fil de son évolution, dans le
développement durable, pour plus de justice et d’équilibre dans le monde
contemporain.
Marcel Kpogodo