mardi 15 novembre 2016

Les acteurs culturels appellent Patrice Talon au secours

Après 7 mois d’Ange N’Koué au Ministère du Tourisme et de la culture


Les relations ne sont pas des plus idéales entre Ange N’Koué, Ministre du Tourisme et de la culture, et les acteurs culturels. Le constat qui ressort du point de presse qu’a tenu, le 11 novembre dernier, la Plateforme des confédérations et fédérations d’artistes et d’acteurs culturels du Bénin, à Cotonou. Au menu, un vrai réquisitoire fait par les acteurs culturels de la gestion des affaires du Ministère de la Culture par Ange N’Koué, ce qui pousse ceux-ci, en dernier recours, à demander de l’aide au Président Patrice Talon.

Pascal Wanou

 Intégralité de la déclaration du Porte-parole, Pascal Wanou



PLATEFORME DES CONFEDERATIONS  ET FEDERATIONS D’ARTISTES ET D’ACTEURS CULTURELS DU BENIN
Tél. 97 98 34 74 / 97 64 62 01/97 78 03 48/
COTONOU
                                                                                             
                                                               Cotonou, le 11 novembre 2016


RENCONTRE AVEC LA PRESSE
-          Remerciements à l’adresse des hommes de la presse pour leur accompagnement depuis que la crise qui secoue le secteur a commencé.
-          Remerciements aussi aux artistes et aux acteurs culturels pour leur combativité.
Le présent point de presse sera axé sur trois points : les réformes dans le secteur, le projet de budget du Ministère exercice 2017, et la problématique du BUBEDRA.

1-      Les réformes en cours
-          Les acteurs culturels sont déçus ; ils ont le sentiment d’avoir été floués, abusés :
·         Voici 7 mois que la nécessité de mettre en place des réformes au MTC, en général, et au FAC, en particulier, a été exprimée ; une nécessité partagée par tous ;
·         7 mois que des réflexions ont été menées, de part et d’autre ;
·         7 mois que tout le secteur est paralysé ; la raison, c’est la gouvernance du Ministre Ange N’KOUE, basée sur les « 3 M », M signifiant mépris, à savoir :
→  mépris des hommes, en général, et des artistes et  des acteurs culturels, en particulier,
→  mépris des textes, des règles et des réalités du secteur,
→    mépris de la vérité et de l’intelligence de l’autre,
le tout sur fond de démarchage de certaines têtes d’affiches du secteur en les soudoyant et en répandant des sabotages sur les responsables de faîtières et du FAC, dans le but de les décrédibiliser et de démobiliser les acteurs.
·         Pour étayer ce qui précède, il convient de rappeler la rencontre du 09 août dernier avec le Ministre, et le scénario mis en œuvre. En effet, sous pressions diverses, le Ministre N’KOUE a dû décider de convoquer les artistes et les acteurs culturels, dans une sorte d’assemblée générale qui ne dit pas son nom. Il a choisi lui-même la cible. A la surprise générale, au lieu de nous soumettre à des échanges sur les propositions de réformes, le Ministre nous a plutôt soumis à une présentation magistrale du Fonds des Arts et de la Culture (nouvelle appellation du FAC). La vérité, c’est qu’il usait de ruse pour nous faire valider ses soi-disant réformes, afin de s’en prévaloir devant le Gouvernement comme étant la caution des artistes à ses réformes. Ayant compris le subterfuge, les artistes ont demandé 72 heures pour étudier minutieusement le document et pour en formuler les contre-propositions, au besoin. C’est ainsi qu’ils se sont éclatés en ateliers de travail sur la base des différents corps de métiers. Après étude du document, réunis en plénière, les artistes ont unanimement regretté le caractère vide dudit document, et dénoncé le piège qui leur était tendu. Toutefois, ils ont décidé de saisir cette opportunité pour mener une réflexion collective sur les réformes à opérer au FAC. Durant 02 semaines, ils ont dont travaillé d’arrache-pieds, mettant sur la table toutes les divergences de points de vue et, dans une autocritique sévère, ils sont parvenus à formuler, de façon consensuelle, des propositions de réformes acceptées de tous, en s’appuyant sur les règles universellement connues, en matière de financement culturel, notamment, sur les règles de l’Union Européenne, connues pour leur rigueur. Le document de propositions de réformes a été déposé au Ministre le 26 août 2016. Depuis lors et, contrairement à son engagement à nous rappeler, dans les 72 heures, pour une harmonisation, le Ministre s’est installé dans un mutisme total, teinté de mépris. Silence radio, le Ministre refuse de communiquer et de discuter avec les acteurs, mais, préfère agir en solo et en catimini, de sorte à mettre les acteurs devant le fait accompli. C’est dans cette  optique qu’il a préparé et soumis au Gouvernement, pour validation, une communication portant AOF du FAC, donc, faisant état de nouvelles mesures dites de réformes. Personne n’a été associé à ça ; pire, contrairement aux prescriptions légales, le Conseil d’Administration du FAC n’a pas été associé, il n’a jamais vu le document, il ne l’a donc pas validé avant sa transmission au Conseil des Ministres, ce qui ouvre, par conséquent, la voie  à une contestation devant les juridictions compétentes.
·         Est intervenu ensuite le dossier d’abattement du budget du FAC : même attitude du Ministre face aux propositions formulées par les acteurs : absence de communication, préférence pour les actions solitaires et pour le dilatoire ; aucune prise en compte des réalités et des règles. Au lieu d’un abattement de 25% annoncé par le Gouvernement, le Ministre N’KOUE a préféré opérer un abattement de 52,60 %, privant le FAC de ressources pour financer les projets déjà retenus et objet de contrats. La conséquence, c’est la mise au chômage forcé de centaines d’artistes, et les problèmes sociaux et de survie dans lesquels des milliers de familles sont plongées. Le Ministre Ange N’KOUE ne s’en préoccupe pas, il s’en fout.
·         Le choc a été très dur et révoltant d’apprendre que l’une des décisions de réforme, qui a été retenue, contraint désormais les artistes à ne contracter que des prêts  auprès du FAC ;
·         L’analyse de cette mesure nous a amenés à un autre constat de violation de la loi, ainsi que des conventions internationales signées par le Bénin ;
→ en effet, cette mesure nouvelle, qui fait office de réforme, suscite 02 problèmes d’ordre juridique, qui nous poussent désormais à prendre des dispositions pour la défense de nos acquis, au regard des textes en vigueur, vu que nous n’avons plus d’interlocuteur avec qui discuter : 1èrmt, au regard des prescriptions de la loi 91-006 du 25 février 1991, d’une part, des attributions du FAC, définies par le Décret portant création, attributions, organisation et fonctionnement du FAC, et du Décret 94-009 du 28 juillet 1994 portant création, organisation et fonctionnement des offices à caractères social, culturel et scientifique, d’autre part, le FAC est-il habilité à opérer comme une institution de microfinance  ou de micro-crédits ? Le FAC est-il un office à caractère commercial ?
2èmt, la mission du Fonds des Arts et de la Culture est-t-elle différente de celle du Fonds d’Aide à la Culture ?
 → Si la réponse à ces deux questionnements se trouve être NON, comme nous le pensons, alors il urge de renoncer à ces mesures dites de réformes, d’arrêter le processus d’adoption du nouveau décret portant AOF du FAC et de le faire valider par le CA/FAC,  sous peine d’une bataille juridique sans précédent devant les juridictions de la République. Nous pensons, pour notre part, que le Bénin du nouveau départ n’a pas besoin d’un tel bras-de-fer.

2-      Le projet de budget général de l’Etat exercice 2017
En tant qu’Organisations de la société civile, et en dépit d’une certaine volonté de nous tenir à l’écart de l’élaboration de sa section 38 relative au Ministère du Tourisme et de la Culture, nous nous sommes appropriés le contenu du projet de budget du Ministère.
            Du décryptage que nous en avons fait, il ressort une très grande déception, et un sentiment de révolte.
·         Comment comprendre en effet, que le budget du Ministère soit revu à la hausse, dans une très grande proportion, passant de 6. 576. 982. 000 F à 35. 755. 346 000 F, et que le budget du FAC  soit maintenu à son niveau remanié de 2016, soit 2.400.000.000 F ???
            Nous ne voyons aucune explication plausible à cette situation qui frise de la méchanceté. Rien ne peut justifier cela, vu la mission assignée au FAC, et le niveau de dotation déjà atteint par le passé (5 milliards).
·         Pire, poursuivant le décryptage du projet de budget, nous nous sommes aperçus, tout simplement, que le Ministère a procédé à des détournements d’attributions grâce à une gymnastique habile et rusée qui a consisté à s’accaparer certaines activités relevant des attributions du FAC, et à les ériger sous la forme de projets, massivement alimentés de crédits colossaux. Cela représente plus de 7 milliards de francs que le Ministre veut gérer directement. C’est ici le lieu de vous faire une révélation ; souvenez-vous de la position du Ministre face aux IDM, il a tout le temps proclamé son indignation et son refus de voir se poursuivre ce système de financement où c’est le Ministre qui distribue directement les financements à qui il veut. Cependant, il en a distribué lui-même, il y a trouvé du plaisir allant jusqu’à dépasser l’enveloppe prévue. Il y a tellement trouvé du plaisir que dans le projet de budget 2017, il a soigneusement créé des « IDM nouvelle génération » à travers ses projets, et pour 7 milliards de francs. Et, pour assouvir son dessein, il interdit le lancement de la saison artistique. Comment peut-on comprendre qu’un ministre en charge de la Culture, puisse déclarer fièrement qu’il n’y aura plus de saison artistique ? On ne saurait comprendre une telle attitude qui frise de l’aberration.
            En d’autres termes, le Ministère a choisi de mettre la main sur les trois quarts des ressources destinées au FAC, et pour justifier cela, il décrète des projets dont les activités relèvent, en réalité, du FAC. Nous ne pouvons l’accepter, et ne l’acceptons pas.
            Tout comme nous ne comprenons pas pourquoi le projet phare du Ministère jusqu’en 2016, celui de la construction du Grand théâtre du Bénin, n’est pas pris en compte. Dans le même ordre d’idées, des structures dont les activités assurent le rayonnement de la culture béninoise, comme le FITHEB et l’Ensemble Artistique National, sont dépourvues de ressources.
Il y a tellement d’injustices à corriger dans ce projet de budget, que nous avons décidé de ne pas rester les bras croisés pour subir, mais plutôt d’agir au plus vite.
Au risque d’envenimer la crise, il urge de faire tout de suite les corrections qui s’imposent. C’est dans cette perspective que nous avons saisi différentes commissions de l’Assemblée Nationale, et nous avons été auditionnés par la Commission des Finances en présence de députés d’autres commissions. C’est la seule façon de résoudre la crise actuelle. Tout est encore possible à l’heure actuelle ; nous avons formulé des propositions dans ce sens.
Se sentant donc sous pression, le Ministre a finalement reçu le monde culturel le jeudi 10 novembre. Mais, au lieu d’aborder le sujet qui nous préoccupe, il a préféré, comme à son habitude, faire dans le dilatoire, en nous soumettant à la présentation du Programme d’Action du Gouvernement, pensant ainsi détourner notre attention. La réaction des acteurs a été prompte et unanime ; nous l’avons ramené sur les sujets principaux, à savoir les Réformes et le budget. Mais il n’a trouvé d’autre réponse que de nous renvoyer à attendre le vote du budget par l’Assemblée, restant ainsi fidèle à son mode de gouvernance.
Dans ces conditions, nous n’avons d’autres choix que de nous adresser au Chef de l’Etat, car dans son projet de société, le Chef de l’Etat, parlant du FAC, a fait un diagnostic en 02 points, à savoir :
-          Insuffisance de ressources financières,
-          Mal gouvernance.
Ce qui est tout à fait juste.
Les solutions proposées tiennent donc en 02 points :
-          Renforcer et accroître les ressources du FAC,
-          Améliorer la gouvernance du FAC, grâce à des réformes.
C’est fort de cela que nous, artistes, l’avons suivi et avons travaillé à l’avènement du nouveau départ. Nous le supplions donc de prendre ses responsabilités, au regard de la gouvernance que fait le Ministre N’KOUE du secteur de la Culture, qui risque de susciter des troubles sociaux. Les artistes sont fatigués et en ont marre de cette gouvernance et de ces décisions à l’emporte-pièces qui ne font que mettre à mal le secteur. Nous implorons le Chef de l’Etat d’arrêter cela ; c’est du jamais vu dans ce secteur qui ne vit plus.

Pour la Plateforme des Conféderations  et fédérations d’artistes et d’acteurs culturels du Bénin,

Le Porte-parole,


Pascal Wanou

Sylvestre Amoussou plus que jamais avant-gardiste

Dans le cadre du sujet de son nouveau film, ’L’orage africain’’


La fin d’après-midi du jeudi 27 octobre 2016 a permis au réalisateur béninois, Sylvestre Amoussou, de donner à voir la toute première de son nouveau film, ’’L’orage africain’’. C’était au Centre culturel ’’Artisttik Africa’’. Cette nouvelle production se démarque de la ligne que s’est toujours tracé le cinéaste, celle de l’anticipation sur le futur.

Sylvestre Amoussou, à la présentation de son film aux journalistes béninois
1h 26 mn. La durée du nouveau long métrage du cinéaste béninois vivant et travaillant en France, Sylvestre Amoussou. Intitulé ’’L’orage africain’’ et, sous-titré ’’Un continent sous influence’’, il relate la classique aventure d’un dirigeant africain, Ezo Essogbé, Président du Tangara, qui a conduit son pays à la nationalisation des entreprises occidentales d’exploitation des richesses du sous-sol avec, à la clé, la volonté de renoncer à la monnaie commune instaurée par l’ancienne puissance dominatrice. Ceci a conduit aux secousses sociales fondées sur la résistance de ces représentants étrangers voyant leurs intérêts stratégiques menacés, leur manière de marquer leur désaccord étant, notamment, d’acquérir à leur cause des responsables politiques proches du cercle d’Ezo Essogbé, de provoquer des troubles et des tueries en actionnant une main sous-régionale de mercenaires. Contrairement au dénouement tragique auquel on est habitué de l’assassinat du dirigeant insoumis aux anciennes puissances colonisatrices, l’homme fort de Tangara survit pour mettre aux arrêts les intrigants de son entourage et pour se voir aduler par son peuple.

Sandrine Bulteau
Première raison de satisfaction : ce film a été tourné au Bénin. Deuxièmement, il a connu la distribution d’un nombre important de comédiens originaires du pays de Béhanzin : Akambi Akala, Florisse Adjanohoun, Abiath Oumarou, Sandra Adjaho, Serge Yéou, Claude Balogoun, Alfred Fadonougbo, Nicolas Houénou de Dravo, Arsène Kocou Yémadjê. Parmi les acteurs étrangers, il a fallu compter avec Sandrine Bulteau, la ’’Madame Afrique’’ de l’histoire. En outre, la tenue locale dont sont tous vêtus les personnages ’’tangarais’’,a le mérite de lancer un message fort, la nécessité pour l’Africain de rompre avec le mimétisme et de s’approprier les atouts vestimentaires locaux. Enfin, la détermination d’Essogbé et le soutien international à sa cause, restent des éléments fondateurs de la capacité des pays d’Afrique à gérer par eux-mêmes leurs ressources du sous-sol. Reste à savoir si l’exemple asiatique n’est pas l’école la plus rassurante pour atteindre cet objectif de développement.

Marcel Kpogodo