Dans le cadre de son
insertion dans le Bim
En matière de
résurrection artistique, on ne peut trouver plus indiqué, actuellement,
qu’Amessiamey. Après un bon nombre d’années de silence, cette artiste
chanteuse, depuis peu, a refait surface, le Projet ’’Bénin international
musical’’ (Bim) ayant permis de l’entendre à nouveau chanter, de la voir à
nouveau se produire sur scène, le vendredi 12 janvier 2018. Portrait d’un
esprit artistique ayant surnagé du marais …
Amessiamey |
Un visage rondelet noir
qui brille par de la lisseur, un visage dont le noir se rend bien éclatant par un
maquillage discret, impeccable, une tête surmontée d’une épaisse et soyeuse
touffe rousse de cheveux se raréfiant sur les côtés, un visage que prolonge un
corps qu’enveloppe un accoutrement de scène : un simple corsage rose, vu de
loin, dans lequel des motifs sombres entretiennent le contraste, un corsage à
la base en dents de scie, sur un pantalon en tissu dit africain, d’un fond vert
parsemé de dessins de fleurs, un pantalon s’élargissant après les genoux, pour
se terminer en pattes d’éléphant, un genre de « bas d’elphe », d’une
certaine époque. Les yeux fermés, les mains jointes, Amessiamey vit son
morceau, le chœur dans lequel ses lèvres s’enfoncent harmonieusement, sur cette
scène du Théâtre de verdure de l’Institut français de Cotonou, le 12 janvier
2018, lors du grand concert de sortie des artistes du très radiophonique Projet
du ’’Bénin international musical’’ (Bim). Bien avant, presqu’un mois plus tôt,
le 15 décembre 2017, elle se produisait en un concert solo, à la Paillotte du
même Institut.
Vingt-quatre ans de
carrière sont passés par là ; ils ont façonné ce qui est devenu une voix
claire dont l’ardeur se construit au fil des morceaux qu’elle chante ; ces
vingt-quatre ans de carrière dans la musique béninoise ont fabriqué la voix
éclatante qu’est aussi Amessiamey, elle qui a matérialisé ses débuts dans le
fameux groupe ’’Alafia music’’, lequel, dans sa fureur du début des années
2000, a fait danser les Béninois dans les espaces convenus à cet effet, sur une
salsa, copieuse à souhait, qui avait la particularité de décrisper par sa
chaleur et de faire tendre le pied à ceux qui n’en étaient pas amateurs. Elle
intègre ce qui s’est imposé comme un ensemble de trois membres en 1994, trois
ans après sa mise en place.
Entre-temps s’amorce la
traversée de désert du Groupe, Amessiamey se met à son commerce et, un fait
marquant l’amène à s’extérioriser : « Ma famille est plus moi que
moi ». Oui, ses collègues d’ ’’Alafia music’’ et, surtout, des membres de
sa famille, étant donné ce qu’ils l’ont vue artistiquement démontrer, se sont
lancés dans des encouragements qui ont produit un effet d’une efficacité
intéressante : elle trouve du temps pour se mettre à nouveau au
travail ; elle écrit elle-même ses morceaux, elle trouve désormais à son
actif un clip et quatre chansons audio. Une figure représentative de cette
famille très motiveuse : Pauline Kiti, sa grande sœur, artiste danseuse,
ancienne membre des ’’Muses du Bénin’’, disponible pour la coacher, dotée
qu’elle avoue, d’une force d’intuition, d’un talent pédagogique. Des
conséquences s’en réalisent. Définition de rythmes de travail, de rythmes
traditionnels : le ’’gazo’’ et l’ ’’élézo’’. Adoption de rythmes
typiquement africains : le hi-life et l’afrobeat ! Elle se projette
donc pour un album de douze titres, se démarquant par un élément de
singularité : ce sera, confie-t-elle, de la « musique de salon »,
ses thèmes préférés en étant « l’amour fraternel, le positif, la paix dans
la société, dans les foyers ». Ses langues de prédilection : le mina
et le fon.
Celle dont les
vingt-quatre ans de carrière se sont aussi forgés avec des ’’jam’’ au ’’So
what !’’, à ’’Acropole’’, notamment, manifeste un processus atypique
d’évolution : de son groupe de musique, elle est passée à une expérience
en solo, pour aboutir au Bim, une véritable structure-orchestre de promotion de
la musique béninoise, avec des canons rythmiques internationaux, pour des
canaux puissants de diffusion, étant le réseau des radios de ’’Radio France’’
et de leurs partenaires, disséminés dans le monde entier.
Amessiamey, deuxième position, de gauche à droite, au cours du concert du Bim, du 12 janvier 2018 |
Un succès, pour
Amessiamey, d’avoir pu être sélectionnée pour participer à officier dans cette
messe, une porte étroite. Un rude casting a révélé qu’elle pouvait en être, du
fait de certains atouts : « une capacité hors pair d’improvisation
sur n’importe quelle grille donnée », « sa voix qui accroche le
public, qui est capable de se déployer dans tout registre, en alto, en soprano
ou en aigu », notamment, explique Aristide Agondanou, ancien membre et
manager des ’’Gangbé brass band’’, la tête pensante du Bim. De même, elle a
démontré sa capacité rapide à concevoir des textes, à créer des mélodies.
A en croire, toujours,
les réflexions de cet homme des grands festivals internationaux de musique et
des réseaux influents afférents à ce domaine, ce système qu’est le Bim
« apportera une communication de masse au projet personnel
d’Amessiamey ». Et, « le carburant, l’énergie » dont elle a besoin
pour évoluer et pour se surpasser et rayonner, Aristide Agondanou sait en
produire les mots et les actes de motivation : « c’est un défricheur,
un détecteur, un développeur », reconnaît de lui cette star en devenir, ce
qui n’empêche pas cet esprit d’humilité, qu’est le patron de la structure de
promotion, ’’Awo-négoce’’, de bien vite remettre les choses à leur place :
Amessiamey « s’est personnellement trouvé sa voix, son style, sa musique,
son identité ». Ainsi, le talent affermi de celle-ci reste le soleil au
zénith, qui a en secoué et calciné le boisseau porteur de léthargie et
d’extinction artistiques. La trentaine ferme, monolaise, Amessiamey, de son
nom, à l’état-civil, Brigitte Kiti, prend son envol, avec ses collègues du Bim,
dès le lundi 12 mars 2018, pour la soumission de son être artistique aux
sensibilités françaises, européennes et occidentales. « Amessiamey », «Tout le monde », en langue mina, est peut-être porteuse d'un sens de l'unanimité, du consensus, qui lui portera bonheur hors du Bénin.
Marcel Kpogodo