Après
15 mois à la tête du Fonds d’Aide à la Culture
Blaise Tchétchao,
Directeur du Fonds d’Aide à la Culture, vient de passer 15 mois à la tête de
cette institution. Ayant accepté de partager avec nous ses analyses sur le
bilan de ses actions, il se révèle qu’il a largement dépassé les objectifs
qu’il s’était fixé … Lisez plutôt …
Blaise Tchétchao, un pragmatisme |
Stars du Bénin :
Bonjour M. Tchétchao. En tant que
Directeur du Fonds d’Aide à la Culture du Ministère de la Culture, de l’alphabétisation,
de l’artisanat et du tourisme du Bénin, vous venez d’effectuer un peu plus
d’une année à ce poste, y ayant été officiellement installé le 12 mars 2013.
Pouvez-vous risquer un bilan de vos actions ?
Blaise
Tchétchao :
Merci, M. le journaliste. C’est vrai, cela fait un peu plus d’un an, exactement
15 mois, que je suis à la tête de la Direction du Fonds d’Aide à la Culture.
Dès mon arrivée à ce poste, nous avons effectué une évaluation, une évaluation
des 5 ans du Milliard culturel ; elle nous a permis de comprendre que, dès
que le Milliard culturel a été mis en place, il y a eu l’éclosion des talents,
les demandes se sont accentuées, ce qui, naturellement, a amené au saupoudrage de la répartition de
la subvention à un moment donné : dès le début, des gens prenaient de gros
montants mais, quatre à cinq années après, pratiquement, la demande s’est
accrue et on est passé à de petits montants.
Après cette évaluation,
nous avons fait un tour dans le pays, nous avons effectué une tournée de prise
de contact avec les acteurs culturels. Au cours de celle-ci, beaucoup de choses
nous ont été dites, on en a tenu compte pour pouvoir intégrer cela dans les
réformes que nous avons entreprises sous l’impulsion du Ministre de la Culture,
M. Jean-Michel Abimbola.
Alors, nous avons
compris que nos acteurs culturels se déplaçaient de leur lieu d’origine,
pratiquement, vers Cotonou, avant toute information et pour le dépôt de leurs
dossiers. Nous avons donc décidé d’intégrer les Directions départementales de
la Culture dans le processus de la gestion du Fonds d’Aide ; deux agents
ont été désignés par chaque Direction départementale et ces agents ont été formés,
pour renseigner les acteurs culturels de leur département et pour recevoir leurs
dossiers. Nous avons aussi décidé de mettre des panneaux d’affichage dans
toutes les Directions départementales, pour que les informations que nous
affichons au niveau du Fonds d’Aide à la Culture, ici, à Cotonou, y soient
immédiatement relayées.
Après cela, nous avons
commencé à afficher les résultats des sessions, ce qui est très important. A un
moment donné, on ne connaissait pas le nombre d’acteurs culturels ayant été
financés, ni la nature de ces acteurs-là. Nous avons commencé à afficher pour
que les artistes voient, en leur sein, qui sont ceux qui bénéficient de la
subvention du Fonds d’Aide à la Culture.
Par
rapport à ces rencontres avec les artistes à travers les Départements du Bénin,
y a-t-il d’autres éléments relatifs aux attentes des artistes ?
Je vous ai dit, tantôt,
que les problèmes qu’ils ont posés sont ceux d’éloignement, d’information, plus
précisément. Il y en a beaucoup qui n’étaient pas informés, par exemple, qu’il
fallait se mettre en association pour bénéficier de la subvention des gros
projets du Fonds d’Aide à la Culture ; certains pensaient que le Fonds
devrait les détecter et leur donner des subventions, un peu, dans le Bénin
profond, comme le diraient les autres.
Précisément,
à votre prise de fonction, vous affirmiez : « Je place ma
nomination sous le signe de la transparence, de l’impartialité, de la justice,
de l’excellence et de l’espoir … ». Qu’en est-il, à ce jour ?
Nous avons démarré,
nous avons commencé à travailler par rapport à cette vision, si je peux m’exprimer
ainsi. Vous avez constaté, je l’ai dit tantôt, que nous avons commencé à
afficher les résultats ; nous sommes beaucoup plus en contact avec les
acteurs culturels : quand ils viennent ici, nos portes leur sont ouvertes.
Cela ne nous empêche pas d’être rigoureux.
En
prenant service, vous avez promis le toilettage des textes de l’institution que
vous dirigez, plus précisément, « la relecture et la mise en exécution
effective du manuel de procédures », ensuite, « le renforcement de la
visibilité du Fonds d’Aide à la Culture », « le raffermissement des
relations entre le Fonds d’Aide à la Culture et ses usagers ». Quel état
des lieux faites-vous par rapport à ce cahier de charges que vous vous étiez
donné ?
Tout cela a été
réalisé, pratiquement à 100% : le manuel de procédures est relu, je l’ai
devant moi, vous pouvez le constater ; depuis mars 2014, ce document a été
relu. Comme vous le savez, le manuel de procédures est un outil de gestion, un
outil qui contribue à la transparence de la gestion, un outil qui contribue à
l’efficacité. Ce manuel de procédures a été réalisé.
Pour ce qui est du
renforcement de la visibilité du Fonds d’Aide à la Culture, nous communiquons
beaucoup. Naturellement, nous sommes en train de mettre en place le site
Internet du Fonds d’Aide à la Culture, www.dfac.bj,
qui sera définitivement mis en ligne, je pense, à la fin du mois de juillet.
Vous voyez bien que c’est un très bon outil de communication ! Et, c’est
en même temps un outil qui va servir aux artistes, qui va leur faciliter encore
plus la tâche ; ils n’auront plus à se déplacer pour venir chercher des
dossiers avant de postuler, ceux qui savent se connecter à Internet pourront
directement y télécharger des formulaires, ils pourront facilement nous poser
des questions, nous envoyer des mails, ils n’auront plus besoin de se déplacer
nécessairement. A part ce qui a été réalisé dans les Départements, voilà encore
un élément complémentaire pour faciliter la tâche aux artistes.
Concernant le
raffermissement des relations entre le Fonds d’Aide à la Culture et ses
usagers, nous sommes régulièrement en contact avec les acteurs culturels, nos
portes leur sont très ouvertes ; quand ils viennent ici, même si ce n’est
pas sur rendez-vous, je les reçois quand je peux et, je pense que c’est le plus
important. Nous les écoutons aussi et nous tenons compte de leurs points de
vue, si ceux-ci sont objectifs par rapport aux différentes réformes que nous
menons.
A
votre prise de service, le 12 mars 2013, vous disiez aussi : « Il est
temps que l’artiste vive de son art ». Pensez-vous qu’on est,
actuellement, au Bénin, en voie vers cela ?
C’est difficile … Après
avoir fait l’état des lieux, malheureusement, c’est difficile de dire que
l’artiste peut vivre, à moyen terme, de son art si les artistes doivent
s’auto-produire, parce qu’ils pensent qu’ils n’ont plus de producteurs. Je dis
bien qu’ils pensent qu’ils n’ont plus de producteur. Quand nous fouillons et
que nous constatons qu’il y en a qui sont des producteurs mais, aujourd’hui, qui
démissionnent, à cause de la piraterie, c’est difficile de dire que l’artiste
va vivre de son art. Mais, nous nous battons, avec les différentes réformes qui
sont menées au niveau du Ministère de la Culture, pour corriger progressivement
cet état de choses.
Pouvez-vous
donner quelques précisions sur ces réformes qui seront salutaires pour les
artistes ?
Je vous remercie. Le
statut de l’artiste est déjà une réalité.
Nous avons, aujourd’hui, au niveau des associations, une certaine
organisation : elles doivent avoir, au-delà du Récépissé de la Préfecture
et du Journal officiel, la reconnaissance du Ministère de la Culture ;
elles doivent s’adresser à la Direction de la Promotion artistique et
culturelle pour avoir un agrément.
Au niveau des artistes,
ils prenaient jadis l’attestation d’artiste, valable pour 6 mois. Aujourd’hui,
c’est la carte professionnelle d’artiste, valable pour 2 ans. Donc, cela soulage les artistes.
Au niveau des
promoteurs culturels aussi, les réformes sont en cours pour que ceux-ci soient
beaucoup plus professionnels, toujours avec la Direction de la Promotion
artistique et culturelle.
Mais,
il y a aussi des éléments de plainte venant des artistes, surtout quand ils ont
l’occasion de parler aux journalistes ; ils disent ne bénéficier du Fonds
d’Aide à la Culture que d’un financement largement en-deçà du minimum dont ils
ont besoin pour réaliser leur projet. Qu’en est-il, depuis votre gestion ?
Je vous ai dit tout à
l’heure que nous avons fait une évaluation et que le nombre de demandes de
financement s’est régulièrement accru. Il faut constater qu’ici, on ne finance
pas à 100% les projets des artistes ; on a parlé d’un fonds d’aide, c’est
un fonds qui vient appuyer. Donc, ce Fonds ne peut pas prendre à 100% en compte
les demandes de financement. Il faudrait que les artistes, que les acteurs
culturels puissent se pencher vers d’autres sources de financement pour pouvoir
réaliser leur projet à 100% ; ici, c’est seulement un appui qui est donné.
Nous
avons ouï dire que vous vous battez pour faire passer le milliard culturel à 3.
Est-ce vrai ? Où en est le projet ? Aurons-nous bientôt une issue
favorable ?
Nous aurons une issue
favorable, si tout va bien, si la gestion est toujours transparente. Alors,
l’année dernière, nous étions à 1 milliard ; cette année, nous sommes déjà
à 1,3milliard. Nous passerons bientôt à 1,5 milliard et à 3milliards. C’est le
lieu de remercier le Chef de l’Etat, qui aime les artistes ; il aime si
bien les artistes, le Docteur Thomas Boni Yayi, qu’il a décidé, entre l’année
dernière et ce jour, de faire augmenter la subvention du Fonds d’Aide à la
Culture. C’est une très bonne chose.
Des
informations nous parviennent selon lesquelles une bonne partie du Fonds d’Aide
à la Culture serait affectée à la gestion des administrateurs du Fonds, ce qui
prendrait un fort pourcentage dans ce Milliard culturel. Qu’avez-vous à
répondre à cela ?
Les administrateurs du
Fonds d’Aide à la Culture n’ont pas de fonds à prendre, ils ne prennent pas de
salaire, ils prennent des jetons de présence qui ne représentent même pas 1% du
Milliard culturel ; les textes sont clairs là-dessus, cela n’a pas été
inventé par les administrateurs, c’est prévu par les textes et, c’est par
échelle que ces fonds sont répartis. Donc, que les gens n’intoxiquent
pas ! La gestion est claire et les gens peuvent venir réellement se
renseigner sur les chiffres ; les administrateurs ne prennent pas
grand-chose ici.
Nous
avons aussi appris que vous vous attelez à réfectionner les salles de cinéma du
Bénin ? Qu’en est-il ? De quelle manière cela se passe-t-il et dans
quel but ?
Après avoir constaté
qu’il manque des salles de diffusion des œuvres de nos artistes, nous avons
initié, sous l’impulsion du Ministre Jean-Michel Abimbola, la réfection de nos
salles de cinéma.
Les travaux de
réfection de la salle du cinéma ’’Concorde’’ sont à la phase d’achèvement ;
nous allons bientôt lancer ceux de la salle du cinéma ’’Le Bénin’’, au cours de
cette année. Les études sont actuellement en cours de réalisation pour ’’La
maison de la Culture’’ de Ouidah, les salles de cinéma, ’’Le Borgou’’ de
Parakou et ’’Sabari’’ de Djougou.
Se
rapportant aux artistes victimes de maladie, cela fait souvent polémique au
Fonds d’Aide à la Culture. Qu’est-ce qui est prévu pour régler ce problème au
niveau de votre institution ?
Pour les cas de maladie
et de décès, qui appartiennent à une même rubrique, des ressources sont prévues
par le Conseil d’Administration pour faire face à ces charges : 20
millions de Francs pour chaque année. Depuis que le Milliard Culturel a été mis
en place, ce montant n’a pas varié. Nous, au niveau du Fonds d’Aide à la
Culture, nous sommes autorisés seulement à sortir, au maximum, 200 mille. Si
nous nous amusons à faire de petits calculs, si nous donnons ce montant aux
artistes et que nous supposons qu’il n’y a pas eu de mort, cela veut dire qu’on
ne peut servir que 100 artistes. Chaque fois qu’un artiste souffre même du
paludisme, il écrit au Fonds d’Aide à la Culture. L’essentiel est que, quand
ils fournissent les papiers, on leur donne ce à quoi ils ont droit. L’année
dernière, en 2013, en septembre déjà, les artistes ont fini la cagnotte qui a
été mise à leur disposition ; tous ceux qui ont écrit d’octobre à
décembre ont vu leur dossier renvoyé pour 2014. Donc, vous voyez qu’il n’y a
rien de caché.
Cette allocation ne
peut donc pas servir à faire des évacuations sanitaires pour les artistes
malades.
Je voudrais ici
remercier, une fois encore, le Chef de l’Etat qui a pensé au Régime d’assurance maladie universelle (Ramu), solution crédible pour toute la population
béninoise, en général, et pour les artistes, en particulier.
Quelle
marque de votre personnalité pensez-vous être en train d’appliquer au Fonds
d’Aide à la Culture ?
C’est la rigueur et la
transparence dans la gestion comme le Ministre Jean-Michel Abimbola a
l’habitude de nous l’imprimer.
Votre
poste actuel vous passionne-t-il ou donneriez-vous tout pour en conquérir un
autre ?
Oui, il me
passionne ; je suis avec les artistes et, avec eux, rien n’est prédit
d’avance. Avec eux, tout peut changer, tout peut être bon comme tout peut être
mauvais. Cela me passionne bien, c’est très formateur.
Avez-vous
un mot de fin pour clore cette interview ?
Je pense que vous
faites une très bonne chose, au niveau du site du Portail Culturel du Bénin,
vous vous déplacez pour vous informer ; c’est une très bonne chose. Cela
contribue naturellement à la promotion de notre culture. Je voudrais juste
demander aux acteurs culturels de continuer à nous faire confiance. Bientôt,
entre la fin du mois d’août et le début du mois de septembre, nous allons
lancer les gros projets pour l’exercice 2015.
A cet effet, je tiens à
préciser que les textes stipulent que sont concernés par ce prochain appel les
associations d’artistes et les promoteurs culturels. Les premiers doivent
détenir le Récépissé de la Préfecture et le Journal officiel, et se mettre à
jour avec la Direction de la Promotion artistique et culturelle. Les promoteurs
culturels, quant à eux, doivent avoir leur carte de promoteur culturel et être
à jour avec les impôts et la Caisse nationale de sécurité sociale. Ces deux
catégories peuvent postuler pour les gros projets. En plus de cela, au niveau
de l’administration, les directions qui s’occupent de la promotion de la
culture du Bénin peuvent aussi postuler pour les gros projets. Voilà ce que les
textes ont prévu.
J’invite donc les
acteurs culturels à se mette à jour par
rapport aux réformes qui sont en cours et que des projets fédérateurs soient
conçus pour, qu’enfin, une plus-value soit apportée à l’économie de notre pays.
Merci beaucoup.
Propos
recueillis par Marcel Kpogodo