La nuit du samedi 8
décembre 2018 s’est révélé grandement mouvementée au quartier de Hèvié, au
domicile du monument de la musique béninoise, le Roi du ’’tchink system’’, Stan
Tohon. En effet, il s’y déroulait une nouvelle édition du Festival lié à ce rythme
musical qu’il a mis au point, ce qui a permis au public d’assister à deux
manifestations, de manière simultanée, dont la présentation de son héritier
musical.
De gauche à droite, Stan Tohon et Prince Guédessi, sur scène, à Hèvié |
Prince Guédessi. Le nom
d’artiste du jeune chanteur béninois que la vedette Stan Tohon a présenté comme
son héritier artistique au public qui a fait massivement le déplacement du
Festival du ’’Tchink system’’, financé avec le concours du Fonds des Arts et de
la culture, qui s’est déroulé de la profonde nuit du samedi 8 au petit matin du
dimanche 9 décembre 2018, à l’Espace ’’Tohon Stan Ibitosh’’, logé au sein du
domicile de l’artiste, ceci dénommé ’’La forêt sacrée’’, dans le quartier de
Hèvié, de la Commune d’Abomey-Calavi.
« J’ai une importante
révélation à vous montrer », avait annoncé à quelques journalistes, qu’il avait
accepté de rencontrer, Stan Tohon, s’engouffrant dans une certaine stratégie
pour donner au suspense toute sa place et sa force. En effet, le Festival 2018
du ’’Tchink system’’ a, sur l’initiative de son promoteur, ouvert une lucarne
sur une manifestation de reddition d’hommage. L’heureux élu n’était personne
d’autre que le compatriote béninois qui, après avoir passé plusieurs années en
France, en était revenu avec, en mémoire, son système de distillerie d’alcool,
qu’il a appliqué au Bénin, ce qui a contribué à donner naissance à l’alcool local
qui, depuis, porte son nom : le ’’Sodabi’’. Il y en avait donc, sur les tables
dressées en face du podium des spectacles, à déguster à profusion, moyennant
une certaine somme d’argent, de même que des produits de la Société béninoise
de brasseries (Sobébra) puis d’autres
marques d’alccol importé et de la viande grillée !
En outre, dans un
programme bien élaboré, ’’Papy Grande’’ avait laissé le soin à son équipe
d’organisation de faire défiler, au micro, une bonne brochette d’artistes de la
chanson ; ceux-ci avaient en commun la pratique du ’’tchink system’’, à part un
orchestre de doyens à qui fut donné l’honneur d’ouvrir la succession par du
’’massègohoun’’ pur, de la Vallée de l’Ouémé, très apprécié par le public dont
plusieurs membres n’hésitaient pas à aller décorer le front des chanteurs qui
les impressionnaient le plus de toutes sortes de coupures de billets de banque,
selon la fortune de chacun. Même le propre rejeton de l’immense Yédénou
Adjahoui, a pu démontrer de la présence en lui d’une relève artistique de
qualité, à travers sa pratique vocale d’une originalité paternellement inspirée, éveillant une forte nostalgie chez plus d’un.
« De quelle révélation
s’agissait-il ? », s’interrogeait-on dans certains rangs spécifiquement
journalistiques. La réponse se faisait désirer pour révéler son contenu et les
jeunes ’’tchinkeurs’’ se succédaient au podium, eux parmi lesquels il fallait
compter une artiste chanteuse béninoise bien expérimentée : Gisèle Ash qui, par
son nouvel album en préparation, marque sa connexion avec le rythme sorti des
entrailles d’inspiration du Roi, avec un atout de taille, l’onction du Papy !
Dans la nuit s'approfondissant plus que jamais, colorée, à l’intérieur de la ‘’forêt’’, et d’un noir
redoutable, à ses alentours extérieurs, il sonna une heure du matin quand sonna
le glas de l’absence de Stan Tohon. Les liquides alcooliques coulaient à flots,
humidifiant les papilles, rinçant les gosiers, déliant les langues, euphorisant
les mouvements, certains venant produire de vigoureux pas de danse au-devant de
la scène. Les dents écrasaient des morceaux rebelles de viande de cochon ayant,
au début, rimé opportunément avec le ’’massègohoun’’ de service, les mâchoires
restaient en harmonie avec la bougeaille.
En une tenue de
concert, scintillante et claire, le très attendu finit par faire son
apparition, se baignant, en même temps, dans l’un de ses anciens morceaux, en
play-back, de sa grosse voix. Des applaudissements nourris l’accueillirent. De
morceau en morceau, il s’assit, d’abord à même le sol puis, progressivement,
dans un siège. Mise en place du dernier acte de la soirée, du Festival : la
stratégie paternaliste. Un jeune était venu, entre temps, interpréter avec lui
des chansons cultes : Prince Guédessi. Finalement, il le présenta et dévoila :
« Voilà mon héritier ». Et, c’était parti pour des duos entre père et fils
spirituels. Prince Guédessi venait d’être adoubé.
Prince Guédessi, dans
ses états
De son vrai nom
Christian Adahè, Prince Guédessi, qu’on peut désormais appeler le fils
spirituel de Stan Tohon, est originaire du quartier d’Adandokpodji à Abomey,
comme, d’ailleurs, le Feu Riss Cool avec qui il entretenait des liens
fraternels, surtout qu’ils partageaient la pratique du ’’tchink system’’
originel de son inventeur, chacun l’adaptant à son ressenti spécifique : le
tchinké dance’’, pour le défunt, une variante à laquelle Prince Guédessi
s’accroche plus que jamais, comme pour continuer à faire vivre Riss Cool, comme
pour l’immortaliser dans le monde, pour « immortaliser son concept ». Repéré
par le Roi, ce jeune chanteur, qui pratique la musique depuis deux paires
d’années, trouve à son actif l’expérience de festivals, de concerts et du
Conavab. Armé du ’’klobo music’’, sa version du rythme de son père spirituel,
le voilà face au défi de sa grande responsabilité artistique.
Marcel Kpogodo
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