samedi 7 avril 2012

Ella Justine Irikié au Fitheb 2012

Fitheb 2012

Comédienne au-delà des déboires


Dans ses perspectives les plus urgentes, elle veut créer une pièce d'auteur, avec un très bon metteur en scène. A cet effet, son chevet de lit s'orne de quatre pièces de théâtre parmi lesquelles elle entend opérer son choix. Même si elle se refuse à nous soumettre les titres concernés, elle garde profondément enfouie en elle la détermination à s'améliorer en tant qu'artiste, de façon à faire du théâtre le métier à partir duquel elle pourra tout s'offrir dans la vie. Se rapportant à son jeu proprement dit sur scène, elle préfère toujours qu'on lui dise la vérité. Si, contrairement à ce comportement de franchise, celui ou celle qui n'a pas aimé sa prestation se met à la couvrir de fleurs en sa présence pour finir par la dénigrer en son absence, elle s'en trouve blessée ; elle n'aime donc pas l'hypocrisie mais apprécie beaucoup les petits gestes qui touchent, la vraie et grande gentillesse. Avis donc à ceux qui rêvent de conquérir son coeur à prendre, mère qu'elle est d'un garçonnet de cinq ans, gardé par sa grand-mère en son absence professionnelle. Un charmant gamin qui, très récemment, l'a épanouie, elle, en lui annonçant avoir occupé la deuxième place dans sa classe de CP1. Cette séquence scolaire lui rappelle ce qu'elle ne souhaite jamais à son fils : avoir arrêté ses études en 1ère.
Heureusement, les couleurs de la vie sont aussi réjouissantes. Par conséquent, elle a très tôt participé à de nombreux stages de formation, qui lui ont permis de mieux appréhender le métier théâtral, déjà que, dès le CM2, elle organisait, avec ses amis, des moments de retrouvailles et de montage de petites pièces qu'ils jouaient pendant les ''Concours Miss'', dans les quartiers. Une véritable vocation donc que le théâtre pour elle !
Dans la logique du perfectionnement de soi, elle a fini, en décembre dernier, au Burkina Faso, la première phase d'une formation dans la marionnette, ce qu'elle justifie par la nécessité de toucher à tout, de compléter son art, de maîtriser tout le contenu de celui-ci. Concrètement lié au jeu qu'elle manifeste depuis le 28 mars dernier dans la pièce par laquelle elle participe au Fitheb 2012, un fait retient l'attention : dans ce spectacle, elle joue un rôle qui se révèle aux antipodes de sa personnalité réelle. S'ouvrant sur les secrets de sa réussite du jeu, elle confie que, dans ce cas de figure où elle doit incarner une psychologie contraire à son moi, elle ne fait rien d'autre que de regarder ; elle observe profondément des personnes en rapport avec son personnage, les approche, communique avec eux et s'imprègne de leur état d'âme, de leur personnalité, de leurs comportements.
Déjà participante au Fitheb 2010, elle se réjouit de son actuelle présence à Cotonou, félicitant au passage les organisateurs du Festival, version 2012, surtout lorsqu'elle comprend que ce n'est pas facile ni évident, dans un contexte où, dans son pays, les festivals sont annulés depuis au moins 5 ans, et que, la crise mondiale sévissant, ils se battent pour maintenir le Fitheb en vie ! Elle leur suggère donc de prendre en compte les suggestions d'amélioration que leur feront les participants.
Cette comédienne, membre de la Compagnie nationale de Côte d'Ivoire, dont les yeux s'embuent momentanément d'amertume lorsqu'elle peint le tableau artistiquement désolant de son pays d'après-guerre, s'exprime ainsi d'une voix claire, dans sa trentaine en fleur, s'épanouissant dans le vert, le bleu, le rose et le blanc. Armée de sa taille modeste domptant toute réticence, elle lance à l'univers son avis d'une totale disponibilité à travailler avec des metteurs en scène présents dans la capitale économique du Bénin. Présente à Cotonou grâce au Cercle de recherches et d'échanges en scénographie et arts de la scène (Cresas), elle a incarné la froide Mademoiselle Atlantie, dans la pièce ''Les convives de la Maison Sapézo'': Ella Justine Iriké, sur scène, le 4 avril dernier, dans la Salle de spectacle du Fitheb.


Marcel kpogodo

Souleymane Bah, metteur en scène guinéen

Fitheb 2012


Le gros ’’menteur’’


Pleins feux sur une personnalité d’un type particulier, émanant de la troupe théâtrale guinéenne présente au Fitheb 2012 ! Contrairement aux attentes, cet homme, d’un teint clair franc et d’une taille un peu au-dessus de la moyenne, n’est pas à 100% un homme de théâtre. Discrètement drapé dans son Doctorat en Sciences de l’Information et de la communication, Consultant de plusieurs institutions spécialisées des Nations-Unies, il est Professeur de Sémiologie et d’Analyse des médias à l’Institut supérieur de l’Information et de la communication de Guinée. Au soir de la représentation de sa pièce, il se montre en débardeur blanc, en lunettes et portant un simple chapeau

Cet homme est un profil digne d’une personne profondément conformiste ; il lui échoit à lui qui aime se repaître dans la contestation et la remise en question perpétuelle et il avoue ne pas aimer les choses établies et s’épanouir dans la dénonciation, ce au titre de quoi il anime une chronique satirique dans un journal guinéen.

Densifiant davantage sa carte de visite, il devrait s’honorer d’avoir été, pendant la dernière élection présidentielle dans son pays, le Conseiller à la Communication de Cellou Dalein Diallo, challenger du second tour et premier opposant de l’actuel Président de la République. Intellectuel bon teint et complètement décalé, il se donne les moyens de sortir de sa douillette carapace sociale et de communier avec la société dans sa diversité. C’est ainsi qu’on le retrouve dans le théâtre, âgé actuellement de 38 ans et père de deux filles. Frottant avec le milieu des planches depuis 1990 et, metteur en scène quatre années plus tard, il en est, avec celle qu’il joue au Fitheb, ce mercredi 4 avril en soirée, à son 9ème spectacle joué sur scène.

La pièce, Les châteaux de la ruelle, dans laquelle il s’est impliqué, en dit long sur son caractère d’insoumis. Ayant fait le choix de faire évoluer, sur la scène du théâtre de verdure de l’Institut français de Cotonou, en ce mercredi soir, six acteurs qui finissent par en incarner successivement vingt sans sortir de la scène, il justifie son choix, non principalement par le fait de vouloir faire de économies mais, surtout, par la volonté de montrer comment l’histoire de la pièce est fondée sur le mensonge. Entrant dans le jeu de cette comédie, il décide de se faire aussi menteur comme Samba qui, informé du décès de son frère en France, s’embarque pour ce pays, feignant une grande souffrance mais, préoccupé par l’héritage à encaisser et par la femme du défunt à épouser. Pris au piège de sa douleur factice, il se trouve nez-à-nez avec un ghetto, en guise de châteaux, et avec Clémentine, cette épouse qui n’est personne d’autre que le compagnon homosexuel de son frère mort.

Se vautrant dans cette atmosphère sordide qui lui permet de montrer de quelle manière l’idée de l’Eldorado occidental est fausse, notre homme utilise l’humour, le décalage et la dérision pour appeler les jeunes africains à comprendre, en se distrayant, que, dans leur pays d’origine, ils peuvent vivre mieux lotis qu’en France.


Koffi Kwahulé


S’imposant l’Ivoirien Koffi Kwahulé comme unique modèle, il pense s’engager prochainement dans la mise en scène de L’enfant noir de Camara Laye et de Sur la pelouse, pièce d’un jeune auteur guinéen sélectionné pour ce Festival burkinabé des Recréatrales. Lauréat de la bourse ’’Visa pour la création’’, de l’Institut français, Maison mère, il pense se lancer dans la création d’un spectacle ayant comme socle cinq pièces de théâtre de Koffi Kwahulé, mettant en vue le désir et la sexualité. De son vrai nom, Souleymane Bah, ce metteur en scène d’un type particulier répond au pseudonyme, Soulay Thiâ’nguel.


Marcel Kpogodo