Face à la courageuse initiative de Wily Mignon
Le Noudjihou, une danse de plus?
Depuis plusieurs mois, il se généralise la pratique d'un nouveau style de danse au Bénin: le noudjihou. A l'initiative du jeune artiste-musicien béninois, Wily Mignon, un certain mouvement d'ensemble embarquant quelques musiciens de la scène béninoise, vise à faire du noudjihou une danse à la mode, une qui devrait mobiliser tous les Béninois autour d'elle. Mais, avec ce que l'on a vu devenir le tchink system et le soyoyo, peut-on donner cher de la peau du noudjihou?
Ne soyons pas pessimistes! Le noudjihou a de grandes chances de naître au Bénin, de s'imposer, de se développer, de conquérir la sous-région ouest-africaine, l'Afrique et le monde. Mais, pour que ce rêve, cette vision se réalise, il faut travailler, ne serait-ce qu'un tout petit peu.
Remarquons qu'il n'y a rien de plus noble qu'un talentueux chanteur béninois tel que Wily Mignon cherche à mettre en place une nouvelle danse ''Made in Benin''. Son but est peut-être de faire s'exprimer une voix de gestuelle corporelle, opposable au coupé décalé qui a déjà embrasé l' Afrique et le monde; ce sera une danse typiquement béninoise que Wily serait fier de danser, sans se sentir extraverti culturellement. Ceci est un bon combat, et il nous a été permis de voir qu'il est en train d'embarquer dans son expérience une autre voix qui, de plus en plus, s'enracine dans l'univers musical de notre pays: Dossi.
Le combat pour réaliser le rêve de faire du noudjihou une danse planétaire commence par ici : emmener tous les chanteurs béninois de la place qui ont un certain succès dans le coeur des mélomanes, et même ceux qui ne l'ont pas encore et qui ambitionnent d'atteindre ce rang, à pratiquer le noudjihou comme fondement de danse dans leurs inspirations de chansons. Les Afafa, Ignace Don Metok, Jac'oho, Zeynab, Zoulé Sangaré, Fifa, H2O Assouka, Vision, Pari Alex, Yémandja le messager, Apouké (version Fikira et Kékéli), All Baxx, Diamant Noir, Ardiess, Espoir, Okine, Jean Adagbénon, Aifamily, Jospinto, Belmonde Zed, Pélagie la vibreuse, Kèmi, Valérie Mignon, Madou, Jolidon Lafia, Frères Kouda'koll, notamment, doivent être amenés à sacrifier leurs spécificités de danse pour cette cause de la promotion et de l'édification du noudjihou au statut de danse béninoise internationale.
C'est l'une des conditions fondamentales qui amènera les observateurs qui vont s'interroger sur ce qui identifie le Bénin en matière de danse, à un moment donné de son évolution, de constater que le noudjihou fait l'unanimité auprès de nombreux artistes béninois et, donc, élire cette danse comme représentant la culture béninoise.
C'est le défi que doit relever Wily Mignon. A défaut de convaincre tout ce beau monde par le verbe, il pourrait d'abord commencer par se faire l'exemple de ce rythme, à travers albums et chansons à succès, ce qui réellement n'a rien de rationnel. Cependant, même en cas de réussite de cette stratégie, pour ne pas subir le sort des Tohon Stan et Robinson Sipa qui, avec le temps et malgré leur succès, se sont retrouvés esseulés dans le tchonk et le soyoyo, il devra se faire un véritable pédagogue, auprès de ses pairs, et produire un impact sur eux de façon à faire fondre en eux cet ego béninois qui veut que, d'une part, lorsque cela ne vient pas de soi, on ne puisse pas s'y engager, même si cela présente d'énormes avantages, et que, d'autre part, l'on lutte farouchement pour avoir sa propre tendance à défendre, dans le but malsain et égotiste de voir propulser son seul et unique nom. Wily Mignon a du boulot!
Marcel Kpogodo