Dans une interview
accordée à notre Rédaction
Depuis la dernière semaine
du mois de juin 2017, l’artiste plasticien béninois, Meschac Gaba, est en
exposition à la Galerie ’’Tanya Bonakdar’’ de New York. De retour de cette ville américaine et, en marge d’une
interview qu’il a bien voulu nous accorder pour discuter de cette exposition, l'artiste montre un avis
complètement défavorable face à l’idée du Ministère béninois de la Culture de
soumettre les artistes et les acteurs culturels à un Fonds de bonification …
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Meschac Gaba |
Le Mutateur : Meschac Gaba, bonjour à vous. Vous
revenez de New-York où vous avez lancé
votre exposition à la Galerie ’’Tanya Bonakdar’’. Comment s'intitule cette
exposition ?
Meschac
Gaba : Cette exposition s'intitule ’’Solo Meschac Gaba’’.
Dans quel
cadre cette exposition a-t-elle été organisée à New-York ?
Cette exposition, comme c'est une galerie commerciale, je
travaille avec elle, elle travaille avec d'autres artistes. Donc,
tous les deux ou trois ans, les artistes qui travaillent avec elle, elle leur donne
l'opportunité de faire une exposition-vente. Ce n’est pas une exposition muséale
ou institutionnelle, c’est une exposition où les travaux seront vendus.
Ces
expositions vont durer combien de temps ?
Je pense, normalement, un mois, mais la Galerie peut
montrer ces travaux, ces œuvres dans des foires ou dans des musées.
Vous avez envoyé à cette galerie trois œuvres
fondamentales, trois œuvres qui interpellent. Est-ce que vous pouvez, une à une,
les prendre, donner leur titre et nous expliquer leur concept ?
Je vais commencer pas ’’Les perruques de Washington’’, une œuvre qui a
été réalisée à Cotonou et qui a été montrée en défilé au ’’Centre’’ de Godomey,
à Atrokpokodji.
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''Les perruques de Washington'' (Crédit photo : Meschac Gaba) |
Ce sont des perruques de Washington ; c'est dans cette ville
de Washington que je les ai faites en perruque. Je pense que ce travail n'est
plus nouveau pour quelqu'un ; ce sont des tresses, mais c'est des formes
de buildings qui se trouvent à Washington.
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''Reflexion room'' (Crédit photo : Meschac Gaba) |
La deuxième œuvre s’appelle "Reflexion room’’.
C’est une tente qui est faite avec les drapeaux déformés du monde ; ça
peut faire penser peut-être à l'Amérique où tu retrouves toutes les
nationalités, ou à une ville africaine, comme l'Afrique du Sud, pour ne pas
même épargner le Bénin, parce qu'à l'heure où nous parlons, je ne sais pas s'il
y a un pays nationaliste qui existe vraiment. Si un pays nationaliste existait,
on serait en train de faire cette interview en fon ; on la fait en
français, donc, d'une manière ou d'une autre, tous les pays du monde sont
devenus un peu internationaux. Si on parle de globalisation, on retrouve tout
le monde sous la même tente, avec le problème de chacun, car le Bénin ne peut
pas avoir les mêmes problèmes que les Etats-Unis et les Etats-Unis ne peuvent
pas avoir les mêmes problèmes que le Bénin.
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Et la troisième œuvre, s'il vous plaît ?
La troisième œuvre, c'est ’’Hommage aux noyés’’.
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''Hommage aux noyés'' (Crédit photo : Meschac Gaba) |
J'ai fait cette
œuvre par rapport aux réfugiés et aux immigrants qui, l'année passée, sont
tombés et, même, maintenant, tombent par centaines ou par milliers, dans la mer,
en prenant des bateaux de petite fortune, pour aller chercher quel bonheur ? On
ne sait pas … Le rêve de l'eldorado …, mais qui finissent beaucoup, noyés, dans
la mer. J'ai fait ça en hommage à ces réfugiés parce que comme je te l'ai
raconté, nous, à une époque, on a habité le quartier ’’Maro millitaire’’ (A
Cotonou, Ndlr). C'était proche de la mer.
Donc, il y avait beaucoup de noyades dans la mer. Les gens, nos parents ou
nos amis, ils mettaient du tissu et des lanternes à la mer quand un de leurs
proches était noyé, pour que son esprit ne vienne pas pleurer à la maison et
les déranger ; j'ai fait ça en hommage aux réfugiés. C’est pour ça qu’il y
a trois lanternes et beaucoup de draps ; c'est symbolique.
Mais, on
constate qu'à travers ces trois expositions, il y une couleur culturelle
purement béninoise, surtout quand on prend la dernière œuvre que vous avez
expliquée ; vous y avez utilisé le cru du Bénin, la mentalité béninoise …
Au fait, je suis Béninois, je suis né à Cotonou. Bien sûr que j'ai vécu
en Hollande, mais c’est quand j'avais 35 ans que j’ai voyagé pour ce pays. Donc,
la culture béninoise est ancrée en moi, mon travail ne peut pas échapper à ça,
mon travail reflète la culture béninoise.
Quels sont les artistes que vous avez côtoyés à New-York, au cours de votre
exposition qui devrait durer un mois ?
Il y avait quelques artistes dont Mark
Dion ; c'est un artiste américain. En
dehors de lui, il y avait de jeunes artistes que la galerie m’a présentés. Avec
Mark Dion, on était dans le même dîner. Dans l’exposition, j’ai aussi rencontré
des curateurs et des directeurs de musées, des consultants d’art. Et puis, je
connais d'autres artistes ivoiriens qui étaient à New-York, mais j’étais trop occupé
à montrer mon exposition, pour aller leur rendre visite. Ce sera pour une autre
exposition.
Quand on imagine les perruques et les lanternes, est-ce que cette exposition
a été difficile à monter ?
Non. Dans une galerie, on dispose d’au
moins cinq assistants. Donc, comme j'étais là pour cinq jours, cela a été monté,
dans les délais ; je ne peux pas
dire que c'était difficile, c'était ok, c'était bon.
De quelle
manière les Américains chez qui vous avez exposé ces trois œuvres ont récupéré cette
mentalité béninoise ? Est-ce que vous avez réussi à leur inculquer toute cette
réalité qui vient du Bénin et qui vous a vraiment inspirée ?
C'est une bonne question. Tu sais, quand je fais mon
travail, je pense que je suis artiste, je ne suis pas un artiste nationaliste, je
suis un artiste international, je fais mon travail que chacun interprète à sa
manière, mais je ne fais pas un travail en ne pensant qu'au Bénin, je fais un
travail en pensant au monde entier, parce que le problème que le Bénin a peut
dépendre du monde ; on ne gagne rien en se renfermant et, il n'y a plus
aujourd'hui, dans le monde entier, un pays qui a un problème qu'il peut gérer
tout seul, donc, mon travail est plus ouvert sur le monde que renfermé sur le
Bénin. Alors, dans mes expositions, je ne mets pas un accent grave sur le Bénin,
mais le Bénin fait partie de l'histoire de mon travail.
On constate que vous n'avez pas changé
votre tendance cosmopolite, votre tendance internationaliste qu'on a vue à
travers des expositions, comme ce que vous avez fait lors de la Biennale
’’Regard Bénin’’ de 2012. On avait vu beaucoup de drapeaux et on constate que
votre tendance vraiment universaliste est permanente et, pourtant, il y a des
pays qui refusent de recevoir des réfugiés, il y a des pays qui rejettent les
étrangers, il y a beaucoup de pays en Europe qui ont opté, à travers les
élections, pour des partis purement nationalistes, hostiles à l’entrée des
étrangers sur leur territoire ...
Je pense que ça va passer ; c'est des trucs qui ne
marchent pas. Je pense que, d'une manière ou d'une autre, ces petites histoires
de nationalistes, ça ne va pas durer un temps, ça ne va pas aller loin parce
que le monde sera le monde. Tu sais, si
tu prends l'histoire de la Chine, c'est le marché mondial, c'est là où les gens
ont fabriqué tout, donc, il n'y a plus de pays aujourd'hui qui puisse se
renfermer sur lui-même. Le reste, c'est pour attirer des élections populaires.
C'est tout, ça s'arrête là !
Avez-vous la même interprétation par rapport aux
États-Unis qui ont voté pour Donald Trump, un républicain archi-nationaliste ?
(Gros rires) Tu vois, c'est une question qu’on se pose : est-ce que
cette personnalité ne joue pas ? Est-ce qu'on connaît vraiment cette personne ?
La même personne qu'on dit qu'elle est archi-nationaliste, avant de descendre
au Bénin, j’ai lu, sur les réseaux sociaux, que ce Président a proposé un
décret pour que les Congolais viennent en Amérique sans visa. Donc, c'est un
peu ambigu. Tu comprends ! Je pense qu'on doit faire un peu attention, pour lui
donner un peu de temps, parce que Trump, il vient de commencer, ça fait à peine
deux ou trois mois, donc, il faut lui donner du temps : un an
ou deux ans. Oui, pour qu'on puisse vraiment le juger, parce que, moi, j'étais
choqué et embêté de voir un président qu'on dit très nationaliste mais qui dit
que les Congolais peuvent venir en Amérique sans Visa.
Parfois, ces personnes jouent pour gagner les élections. Alors, si ce Président
dit que les Congolais peuvent entrer en Amérique sans visa, ça veut dire
qu’il n'est vraiment pas contre les Africains. Maintenant, s’il y a des pays
qui ont des dettes économiques à régler avec l'Amérique, c'est leur problème ;
ce n'est pas l'Afrique qui a ce problème à régler avec l'Amérique.
Vous vivez, le plus clair de votre temps, en
Hollande, mais vous êtes au Bénin actuellement. Est-ce que vous permettez qu'on
parle politique ?
Ouais, c'est une bonne question. Je ne connais pas trop la
politique béninoise et, c'est ce que tu connais que tu peux critiquer. On entend,
dans la rue, les gens qui se plaignent un peu. Moi, je ne me plains pas. Tu
comprends ? Et, si je veux parler de la politique béninoise telle que je la
comprends, pour le Président, il faut donner encore un an ou deux ans pour voir,
parce qu'il a hérité d'un pouvoir. Si tu hérites d'un pouvoir, il y a beaucoup
de choses à corriger et, je ne sais pas s'il a hérité d'un pouvoir où l’on a
laissé beaucoup d'argent ou d'un pouvoir où il y a beaucoup de dettes. Si c'est
un pouvoir où il y a beaucoup de dettes, même si l’on dit qu'il est
milliardaire, il ne va pas donner tout son argent pour régler le problème d'un
pays. Son argent ne peut pas devenir l'argent de la trésorerie béninoise. Alors,
il faut lui donner un peu de temps pour voir. Maintenant, si on n’est pas
satisfait, comme il a dit qu'il va faire cinq ans, il va les faire et il saura qu'il
a mal dirigé, mais on ne va pas se mettre à le bouder, à le critiquer. C'est
difficile de diriger, hein, même une petite entreprise !
Meschac Gaba, votre dernière exposition au Bénin,
c'était le 4 février 2017, au ’’Centre’’ de Godomey, situé au quartier
Atrokpokodji. Cela vous a permis de rencontrer beaucoup d'autres artistes
béninois, à travers le vernissage qui a eu lieu. Quels sont les retours que
vous avez eus par rapport à cette exposition, quelques mois auparavant ?
Les retours ? Tu sais, c'est un travail expérimental que j'ai fait
par rapport aux peintures et, des journalistes ont produit des articles
là-dessus ; je ne connais pas l'opinion du public concernant ce travail, mais
je sais qu'il y avait du monde. J'étais heureux que le public béninois s'y soit
intéressé et puis, il y a une galerie sud-africaine que cela a aussi intéressé,
et deux quand même de ces peintures exposées ont étés vendues à la Foire
de Bâle de 2017, mais à un très bon prix ! Donc, je pense que cela a été
positif pour moi. Tu vois ? On n’a même pas fini l'année et j’ai commencé à
vendre ces peintures sur des marchés internationaux. Donc, je remercie ’’Le
Centre’’, qui m’a donné l'opportunité de faire cette exposition parce que,
quand tu veux expérimenter quelque chose, tu as besoin d'un espace aussi pour le
montrer. Cet espace qu’est ’’Le Centre’’ m’a permis d'expérimenter quelque
chose ; ça me permet de continuer dans ce sens, avec les peintures.
On peut dire que votre jardin privé d'où vous
avez tiré vraiment la substance de ces tableaux si extraordinaires que vous
avez réalisés, ce jardin privé que vous nous avez donné le privilège de visiter
vous a porté chance …
Ouais, je peux le dire ! Cela m’a porté bonheur. Tu a vu que quand
tu es entré tout à l'heure chez moi, j’y étais … C'est un jardin que j'aime et
qui m'inspire, donc, je suis tout le temps en train d'arranger les plantes.
Quelles
sont vos relations avec les artistes d'art contemporain qui sont au Bénin ? Qui
sont ceux que vous fréquentez le plus ? Qui sont ceux qui viennent vous voir,
vous qui êtes souvent en Hollande ?
Je fréquente Dominique Zinkpè. Je pense qu'il est un peu occupé
maintenant, donc, je le fréquente moins : il gère deux structures, il a
son propre travail, il doit être très occupé. Pour le reste, on se retrouve sur
les réseaux sociaux, comme avec Charly d'Almeida, Bello, puis, il y a aussi
Gratien Zossou, Koffi Gahou et Kouass, qui sont des amis à moi et, quand on a
l'occasion de se rencontrer, de créer des situations, on le fait. Maintenant,
il y a d'autres jeunes dans mon quartier qui ont un café à côté ; quand je
passe, je leur dis bonjour.
Vous
voulez parler du ’’Parking bar’’ de Fidjrossè ?
Ouais.
Vous avez
sûrement entendu parler de la polémique des réformes au Ministère de la Culture,
des réformes au niveau du Fonds d'aide à la culture. Tout à l'heure, vous avez
parlé de Koffi Gahou. Avez-vous appris qu’il a publié une Lettre ouverte au Président
de la République sur le Fonds d'aide à la culture ?
J'aimerais bien la lire ... Après l’avoir lue, je vous en donnerai mon
point de vue.
Que
dites-vous de la polémique sur les réformes au Ministère de la Culture, et qui
font que tout est bloqué actuellement ?
J'en ai entendu parler. Je sais qu'il y a une crise économique dans le pays.
Peut-être que c'est ça qui en est à l’origine. On ne le dit pas directement,
mais on est en train de réajuster le Fonds d'aide à la culture. Peut-être qu’il
y a une crise économique derrière ça et, quand il y a une crise économique,
dans un pays, la première victime, c'est la culture.
En Europe, on connaît ça ; le sport, les gens le tolèrent, parce que le sport ramène de l'argent. Mais,
la culture, ça ne ramène pas beaucoup à l'État. Tu vois ? Donc, la culture
est la première victime. Maintenant, si ce n'est pas qu'il y a une crise
économique, alors, c'est qu'il y a un problème à résoudre ; ça veut dire
que nos dirigeants ne sont pas intéressés par la culture. Mais, si c’est qu’il
y a une crise économique, il faut que les artistes soient tolérants avec eux.
Maintenant, je ne connais pas ce qui est à la base du blocage, parce que si je
te donne l'exemple de la Hollande, beaucoup de professionnels de la culture ont
perdu leur travail, beaucoup de musées se sont fermés.
C'était
en quelle année ?
Ce n’est pas loin ; il y a trois ou quatre ans. En Hollande, ils
ont pas mal de musées ; ils ont renvoyé beaucoup d'employés. Je ne sais
pas si c'est le même phénomène qui se passe ici.
En matière de réformes, le Ministère
de la Culture veut revoir le système de d'octroi de l'aide aux artistes,
il veut qu'il y ait un Fonds de bonification qui soit là pour rembourser les
intérêts des prêts qui auront été faits aux artistes …
Pour faire des prêts !
Oui, désormais, les artistes bénéficieront de prêts
qu’ils rembourseront après la réalisation de leurs projets …
L'idée est bien quand il y a un marché de l'art, l'idée est bien quand
il y a un marché de musique. Si le Ministère de la Culture veut créer une
banque pour les artistes, je ne trouve pas ça mauvais.
On a parlé d'un Fonds de bonification …
Je ne sais pas ce que le Ministère
appelle ’’bonification’’. Et si les artistes ne remboursent pas ?
Il semble que lorsque l'artiste fait le prêt et que l'Etat est là pour garantir
les intérêts, c’est lui qui va prendre en compte les intérêts générés par ce
prêt. Mais, l'artiste doit venir rembourser intégralement ce qu'il a pris …
Dans tous les pays du monde, l’art est inclus
dans les organisations à but non lucratif ; est-ce que le Ministère va prêter aussi de
l'argent à ces organisations à but non lucratif ?
Apparemment, oui …
Et, comment une organisation à but non
lucratif peut payer, peut rembourser ? Puisque c'est une organisation qui ne
fait pas de bénéfices, elle va rembourser comment ? Tu vois qu'il y a un problème
qui ce pose.
Donc, ça veut dire que les gens qui gèrent
la culture, ce ne sont pas des gens qui connaissent le système. Ils doivent
mettre des gens qui connaissent le système, qui connaissent la culture, les
gens qui ont de l'expérience, parce que ce truc est complètement erroné et faux.
On ne peut pas prêter de l'argent à un
artiste qui a un marché. Un artiste qui a un marché n'a pas besoin du Ministère
de la Culture, il peut s'adresser directement à une banque. Donc, si le Ministère
béninois de la Culture veut faire des prêts, je pense que c'est erroné. Je
pense qu'il faut leur dire d'arrêter avec cette histoire.
S'il y a un artiste qui a les moyens, qui
a besoin de prêt, il va à une banque. Il y a des banques primaires comme les
Clcam (Caisses locales de crédit agricole mutuel, Ndlr), mais il n'ira pas emprunter
de l'argent au Ministère de la Culture. À la rigueur, la structure bancaire
peut demander à l’artiste de lui donner une peinture ou un tableau, pour en
faire un musée, demain. Mais, demander à un artiste de venir emprunter de
l'argent, je peux garantir que ça ne marchera jamais. C'est clair et net !
Alors, c'est une idée complètement fausse.
Moi, j'ai de l'expérience ; j'ai
sillonné le monde : même les galeries commerciales postulent à des fonds
d'aide parce qu'elles payent beaucoup et, parfois, elles ne savent si elles
vont faire des ventes.
Par exemple, la galerie qui m'a invité,
c'est elle qui a acheté mon ticket, c'est elle qui m'a hébergé à l'hôtel, c'est
elle qui a payé le transport de mes œuvres. Donc, si elle ne fait pas des
ventes, elle va faire des pertes. Même les fonds d'aide, en Europe, aident un
peu les galeries commerciales, pour couvrir les frais de transport, les frais
d'hôtel, les frais de restauration. Par rapport à ce que dit le Ministère de la
Culture, je lui propose d’envoyer ses cadres faire des stages en Europe, en France,
pour savoir comment ça se passe, au lieu de rester ici et d'improviser des
choses. Ils ont vraiment besoin d'expérience ; c'est ce que je pense.
Avez-vous quelque chose, une initiative pour les artistes d'art contemporain,
qui vivent au Bénin, qui aiment bien vos expériences, qui se rapprochent de
vous, qui ont envie de profiter un peu de vos expériences, qui ont envie que
vous les aidez à aller l'international ?
Toute artiste jeune qui a besoin de
conseils, c'est gratuit. S'il m'approche, j'ai un peu d'expérience que je peux
partager avec lui, ça ne me gêne pas. Même des gens qui ont des problèmes avec
le Fonds d'aide, s’ils ont besoin de conseils, je peux leur en donner.
Et, vous savez, c'est pour la première
fois j'entends parler d’un ministère de la culture qui veut prêter de l'argent
aux artistes ; cela, c'est complètement incroyable. Il peut, à la rigueur,
acheter des œuvres, s'il ne veut pas jeter son argent pour aider
l'artiste ; ça se fait en Europe où on donne et on reçoit aussi quelque
chose. C'est comme ça qu’on gère un fonds d'aide, mais on ne prête pas un fonds
d'aide aux artiste, ça va finir par un bagarre. Le Ministère de la Culture ne
peut pas mettre en prison, parce que l'art, c'est de la passion, ce n'est pas
un travail qui a un but lucratif. Nous, les artistes, sommes heureux qu'on
puisse gagner de l'argent avec l’art, mais les galeries invertissent de
l'énergie pour que cela soit le cas. Ce n'est pas qu'elle met l’argent dans une
petite chambre et qu’elle s'asseoit, c'est qu'elle voyage dans des foires où elle
loue des stands à 20 mille, 10 mille ; elle a un personnel à qui payer son
salaire.
Quand vous parlez de 20 mille, de 10 mille, c'est en euros ou en dollars
?
En euros, si c’est en Europe et, en
dollars, chez les Américains. Ce sont des gens qui invertissent beaucoup. Déjà,
dans un pays où il n'y a pas de musées, l'État doit coopérer avec les artistes,
au lieu de les pénaliser et de les empêcher de travailler.
Avez-vous un mot à dire à nos lecteurs pour clore cette interview ? Quels
sont vos projets ?
Dans le mois prochain, j'irai en Afrique
du Sud, pour faire un projet sur une pièce qui s'appelle ’’Détresse’’, avec les
phares de voiture. Et puis, je vais faire une exposition, en septembre, à Paris,
dans une galerie et, éventuellement, je vais passer pas Londres pour préparer
un projet pour l'année prochaine.
Merci beaucoup, Meschac Gaba !
Recueil des propos : Marcel Kpogodo
Transcription : Frumence Djohounmè
Correction : La Rédaction