lundi 26 mars 2018

Grand hommage à Cheikh Anta Diop


Dans le cadre de manifestations commémoratives de son œuvre


Le célèbre historien et anthropologue sénégalais, Cheikh Anta Diop, a été l’objet d’un vibrant honneur, en novembre 2017, à Dakar, au Sénégal, à l’occasion d’une impressionnante manifestation artistique.

De gauche à droite, Erick Ahouansou et Ana Vicky Castillo
58 œuvres dont une cinquantaine de photos de pharaons imprimées, et 8 toiles originales parmi lesquelles se trouvent 7 portraits de pharaons et, un autre, de Cheikh Anta Diop. L’arsenal artistique qui a été déployé dans le Hall du Grand théâtre national de Dakar, capitale du Sénégal, pour le compte du vernissage d’une exposition, qui s’est déroulé le 24 novembre 2017, à l’initiative du Professeur Ana Vicky Castillo.
Plusieurs personnalités ont honoré de leur présence l’événement : la marraine de l’exposition, Mariétou Diop, Présidente de la Fondation ’’Cheikh Anta Diop’’, Omar Danfakha, Représentant du Ministre sénégalais de la Culture, Boubacar Barry et Diallo Diop, Professeurs d’Histoire et, surtout, Massamba Diop, Docteur en Médecine et fils de Cheikh Anta Diop, sans oublier une personnalité Vip, l’Ambassadeur des Iles des Comores près le Sénégal.


Les Noirs, une origine prestigieuse

Ana Vicky Castillo, d’origine colombienne, Professeur d’Espagnol et Docteur en Histoire, vivant aux Etats-Unis, est partie des travaux de Cheikh Anta Diop, de ses recherches et de ses révélations sur la culture africaine et ses fondements, pour se rendre compte de la portée inestimable de ses travaux, ce qui l’amena à décider d’en faire la révélation à travers l’exposition indiquée, qui avait un thème bien précis : « L’apport de l’ancienne civilisation africaine ». Ainsi, pour cette universitaire, il s’agissait de diffuser, de vulgariser les idées du très respecté chercheur sénégalais, selon lesquelles l’Egypte antique, ayant rayonné dans plusieurs secteurs tels que les mathématiques, la médecine, la mécanique, les sciences en général, la musique, le calendrier, l’art et la culture, notamment, cette Egypte était composée de la civilisation noire, celle-ci qui est la toute première ayant régné pendant l’âge d’or de la civilisation contemporaine. 

Une exposition qui a drainé du monde ...
Et, à en croire les analyses d’Ana Vicky Castillo, développées au cours de la conférence qu’elle a animée le 25 novembre 2017, des vues inspirées des résultats des recherches de Cheikh Anta Diop, la civilisation noire s’est même retrouvée en Amérique du Sud, à travers les Mayas, les Astèques, entre autres. Par ailleurs, l’égyptologue sénégalais  trouvait que l’histoire de l’Egypte n’était pas séparable de celle des Noirs, et elle a inspiré beaucoup de savants qui étaient allés s’instruire dans ce pays. Ainsi, la validité de l’histoire africaine dépend de sa liaison avec celle de l’Egypte, d’où une déduction simple émanant de Cheikh Anta Diop et relevée par Ana Vicky Castillo : « L’histoire de l’Afrique noire sera écrite dans l’air jusqu’à ce que les historiens africains osent la relier à l’histoire de l’Egypte ». Cette réflexion prouve à quel point les puissances occidentales ont réussi la basse œuvre de démolition de l’image des Noirs par l’anéantissement des preuves de leurs racines avec la resplendissante civilisation de l’Egypte antique.


Des collaborations déterminantes  

L’exposition indiquée, qui a clos ses portes le 30 novembre 2017, est la manifestation phare ayant permis de lancer les activités d’une institution culturelle crée aux Etats-Unis et dont la Fondatrice et Présidente n’est personne d’autre qu’Ana Vicky Castillo : l’ ’’African diaspora museum of Chicago’’ (Admc) ; cette personnalité est aussi à l’origine de la création de l’ ’’Afrolatino historical society’’. Prévue pour être montrée à travers les pays du monde depuis le 7 février 2018, cette exposition, qui n’est que le commencement du processus de révélation par Ana Vicky Castillo des fondements authentiques de l’histoire des Noirs, n’a pu connaître une véritable réussite sans un certain trio d’artistes : le Colombien Julio C. Montano M, l’Américain Gary Taylor et, surtout, le Béninois Erick Koffi Ahouansou dont la partition précise a été, notamment, la réalisation des sept portraits de pharaons et de celui de Cheikh Anta Diop. 


L'affiche de l'événement
En outre, d’autres collaborateurs ont apporté leur pierre à l’édifice de ce succès : Jean-Claude Ahouansou, Ba Dethié, Owen Leroy, M. Sambou et Mme Gassama, tous émanant de la Maison de la Culture ’’Douta Seck’’ dont la seconde est la Présidente.
Les participants à la manifestation culturelle ont visité l’Ile de Gorée et la tombe de Cheikh Anta Diop.

Marcel Kpogodo

samedi 17 mars 2018

Charly Djikou, l’appel suppliant au ’’dialogue’’ salvateur entre Gouvernement et enseignants


Dans le cadre d’une exposition au Centre culturel chinois


Depuis le samedi 24 février 2018 se tient au Centre culturel chinois de Cotonou une exposition permettant à quatre artistes plasticiens béninois de faire valoir le fruit de leur inspiration concernant un sujet très simple : le ’’dialogue’’. Particulièrement, l’un d’entre ces créateurs, le sculpteur sur pierre, Charly Djikou, fait de cette situation de démonstration une opportunité pour s’inviter dans l’actualité du débrayage prolongé dans le monde de l’éducation ; par le biais d’une de ces œuvres, il appelle le Gouvernement et les enseignants à fumer le calumet de la paix pour que le pire soit évité à notre pays.

De gauche à droite, ''Awakpokpo'' et Charly Djikou
« ’’Awakpokpo’’, je l’ai fabriquée spécialement, à Savè, pour inviter le Gouvernement et les enseignants à s’entendre, afin que l’année scolaire soit sauvée ». Les yeux pathétiques, tournés vers le soleil comme s’il le suppliait de chasser, de sa lumière, les ombres de la grève, Charly Djikou, embrassant ’’Awakpokpo’’ de ses grosses mains d’ouvrier de la pierre, comme accroché à une bouée de sauvetage, s’exprime depuis l’entrée de la cour principale du Centre culturel chinois de Cotonou, où se déroule une exposition qu’il anime, avec trois de ses collègues artistes contemporains, depuis le 24 février 2018, sur le thème du ’’dialogue’’.
« Les artistes plasticiens ont leur mot à dire dans la société, au même titre que les hommes politiques, la société civile et les travailleurs », justifie l’artiste, enfonçant sa logique d’engagement : « Il faudrait utiliser le chemin du dialogue, car c’est lui qui apporte la paix, la compréhension, l’écoute de l’autre », avant de conclure : « Les artistes écrivent l’histoire de la civilisation d’un peuple, c’est ce qui me pousse à tenir compte de la crise que nous traversons au Bénin ».
Selon Charly Djikou, ’’Awakpokpo’’, le titre de l’œuvre porte-flambeau de son actuelle exposition au Centre culturel chinois de Cotonou, signifie ’’ensemble’’, en langue nagot. ’’Assemblée’’ est alors l’explication circonstancielle que sélectionne, de ce mot, en langue nationale, ce maître de la pierre, pour une très récente création qui matérialise une grande réunion, par les nombreux visages à la bouche ouverte, jalonnant tous ses côtés, ce qui fait, au décompte, pas moins d’une douzaine de personnages embarqués dans une concertation stratégique, peut-être celle entre les ministres représentant le Gouvernement Talon et les secrétaires généraux des centrales, des confédérations syndicales et des regroupements des syndicats d’enseignants. Surprise : un personnage, en bas, se trouve piétiné par tous les autres ! « C’est le sage », interprète Charly Djikou, «  il supporte tout, ce pour quoi il doit avoir le dos large », sanctionne-t-il. Ce sage est-il le Président de la République, Patrice Talon, que l’artiste appelle à l’acceptation de l’inacceptable, pour éteindre la crise scolaire actuelle ?


Irrésistible exposition

En réalité, ce maître de la pierre profite de l’exposition intitulée ’’Dialogue’’ pour prendre en otage, dans certains de ses espaces stratégiques, le Centre culturel chinois : à l’entrée principale, six œuvres, parmi lesquelles ’’Awakpokpo’’, se déploient autour d’une sorte de piscine décorative, deux autres ornent une autre entrée, celle de la résidence du maître des lieux, pendant que deux autres concèdent un message aux visiteurs voulant accéder au hall du Centre, d’autres encore vous assistent dans ce hall et, dans la galerie proprement dite, les toutes dernières vous surprennent par l’inattendu du message que les a chargés de transmettre leur père.
Si ’’Awakpokpo’’ est taillée à partir de la pierre extraite de la Cité aux trois mamelles, Savè, un matériau d’une « nature belle » dont le sculpteur laisse des parties intactes, vu sa dureté, sa résistance, sa « morphologie compacte », sa beauté à la finition, les autres pièces émanent de la pierre de la Commune de Dassa, des régions de Dan, dans le zou, ou d’Idadjo, à Ouèssè. Lorsque ces pierres de différentes origines contribuent à évoquer le ’’dialogue’’, l’artiste dénonce certaines circonstances de la vie qui le compromettent : ’’Akowé I’’ et ’’Akowé II’’ rejette le port hautain et vaniteux de l’intellectuel, qui l’amène à se bloquer à son entourage, ’’Ta vo I’’ et ’’Ta vo II’’, la vacuité intellectuelle, spirituelle, qui débouche sur la prétention, un objet de conflits avec les autres, ’’Zèle du roi’’, la même prétention, mais relevant de la promotion à un poste, l’état donnant lieu à de la vantardise, ’’Grande gueule’’, le comportement de celui qui « dit tout sans rien dire de concret », achève l’artiste.
Et, les quatorze autres sculptures  doivent aussi être vues, de quoi s’abreuver, d’une part, de l’expression des bons thèmes chers à Charly Djikou : le masque ’’guèlèdè’’, la belle tradition ancestrale, la force sociale de la mère, les valeurs du brassage, de la convivialité, du vivre ensemble, de la vie communautaire, de la sagesse, ces qualités qui, notamment, garantissent le dialogue. D’autre part, il est important de viter une telle exposition, afin de constater la capacité du sculpteur à la représentation de faits, de sentiments, de personnages.


« Je suis pierre … »

Charly Djikou manifeste de la familiarité, de la proximité, une profonde intimité avec la pierre, ce qui l’amène à ne pas la travailler extérieurement ni superficiellement ; à l’aide du burin, du marteau, de la meule avec disque diamanté, il lui dicte son inspiration, la lui inflige, la dompte de façon à lui imprimer le message qu’il lui tient à cœur de partager avec le public, il la sort de la nature, la magnifie et le rend désirable ; elle n’est donc plus un matériau, mais une partenaire, une amante et, finalement, une épouse avec qui il fait corps pour développer une vision de conquête du monde par son ’’modèlement’’, son façonnement, sa sculpture. Ainsi, fondu en elle, il est elle, d’où cette sourde déclamation : « Je sors d’une pierre. Donc, je suis pierre, je m’exprime en pierre, avec la pierre, pour la pierre. Donc, je suis la pierre, je ne peux qu’être pierre ».
De la même manière qu’elle se donne, se fusionne à lui, recevant de lui des semences d’inspiration, qu’elle développe et qu’elle enrichit, qu’elle immortalise, pour la gouverne de la postérité, il lui fait allégeance, comme à Dieu, de quoi lui imprimer son génie, de même que de puissants gènes plus qu’identificateurs.
Et, une telle symbiose avec la pierre, une communion si productive d’une analyse aussi pointue qu’inattendue de la vie, Charly Djikou avoue fièrement qu’elles ne sont nullement accidentelles, vu qu’elles viennent de son sang profond, ce qui l’amène à la référence à l’un de ses ascendants, son arrière-grand-père, à l’origine, fabricateur de meules de pierre, un outil, une unité de production, une entreprise qu’il a mise en place pour satisfaire le besoin de la population d’Agbangnizoun en écrasement de céréales. C’est ainsi que l’aïeul prophétisa, à partir d’une conviction qu’il fit vérité, d’où sortit le patronyme ’’Djikou’’ : « Dji na o kou o, axi na djè ! », ce qui signifie : « Même si la saison est mauvaise, le marché s’animera ! ». Ainsi, définitivement, existe, dans la Commune indiquée, du Département du Zou, le marché ’’Djikou Sèto’’, s’animant tous les cinq jours. Comme, alors inspiré par la veine ancestrale, Charly Djikou entretient de grands projets pierreux pour Savè, en dehors d’une initiative, lancée et tenue, du 12 au 17 février 2018, pour créer une relève certaine en sculpture de pierre.

Marcel Kpogodo