vendredi 22 juin 2012

Richard Korblah à l'Institut français du Bénin

Mise en valeur de la culture peuhl

Depuis le jeudi 14 juin, Richard Korblah présente une très osée exposition à l'Espace Kpobly de l'Institut français du Bénin. Huit sculptures bien hiérarchisées se partagent le cadre réservé à leur présentation au public. 
Farouk Abdoulaye
Sous l'inspiration du scénographe, Farouk Abdoulaye, le visiteur découvre l'histoire de la flagellation de la population peuhl vivant dans le Département béninois des Collines, à travers plusieurs contrées : Dassa, Glazoué, Pira, Tchetti, Savè, notamment. 
Par ordre d'importance, Alkaadi, le Père suprème, juché sur son piédestal, chef de la diaspora peuhl dans l'une ou l'autre des localités évoquées, autorise le déroulement de la cérémonie de flagellation ; elle permettra à des adolescents d'à partir de 15 ans d'obtenir leur ticket d'entrée dans la classe sociale des adultes. Et, c'est après avoir supporté héroïquement la séance d'une douloureuse bastonnade à l'aide d'un fouet de type particulier. Le petit Bamiire, lui, non loin du Père, assiste au spectacle, se préparant à le subir, peut-être, l'année suivante. Piiray, eux, constituent deux couples de jeunes qui sont à l'épreuve de la flagellation, qui la subissent. Ici, l'installation est majestueuse, subtile : chacun des couples semble représenter les deux jeunes hommes qui s'affrontent à l'épreuve de la bravoure amis, il n'en est rien ; celui qui tient l'autre le protège contre son adversaire. Donc, les deux couples comportent des flagellateurs qui se protègent l'un l'autre. Kellire 1, lui, dirige la flagellation, l'arbitre et donne le verdict. Baba Piiray, autre père de la flagellation, est chargé de valider ou non la sentence proposée. Inna Piiray est la mère de la flagellation ; elle ne prend partie pour personne, elle reste neutre.  Kellire 2 dirige aussi la séance ; il est chargé de vérifier la conformité occulte des fouets utilisés.
Richard Korblah

Selon les explications de Richard Korblah, un tel spectacle, en milieu peuhl, se déroule les mois de décembre et janvier de chaque année, c'est-à-dire en saison sèche. Par ailleurs, il justifie son intérêt pour l'univers très fermé de la flagellation chez les peuhls par sa volonté de montrer qu'il s'agit d'une ethnie nomade incomprise qui ne mérite pas d'être crainte, rejetée, détestée, comme elle l'est ; il a décidé de susciter la curiosité sur elle et de pousser le public à chercher à mieux la connaître. De son regard qui cherche dans le lointain les repères d'une présence au monde qui puisse se révéler utile sur le plan artistique et culturel, Richard Korblah, par cette exposition,  relance le débat de la tolérance envers ces peuples marginalisés qui, involontairement, suscitent méfiance, rejet, mépris, préjugés de tous gens, de façon à échouer dans tout processus d'intégration. Richard Korblah, en creusant dans la diaspora peuhl dans le Département des Collines, a vaincu le mythe de l'inconnu et de la méfiance injustifiée. Cette exposition à l'Institut français du Bénin, qui prend fin en septembre 2012, mérite d'être vue.

Marcel Kpogodo    

Fidèle Anato dans son nouvel album

Où est l'os, sur le marché cinématographique béninois

Depuis le 14 juin dernier, le comédien béninois, Le Baobab, de son vrai nom, Fidèle Anato, a publié Où est l'os, un album cinématographique du registre humoristique, qui dure 1 heure 10 minutes. Deux mille francs suffisent pour se procurer cette vidéo, inspirée du conte, L'os de Mor Lam de Birago Diop. 
En substance, l'histoire se déroule à Towéta, situé à Lalo dans le Département du Couffo, village d'origine de la mère de l'auteur qui, symbole possible de nostalgie, y a passé son enfance. Cette histoire est celle de Gbodja, avare, égoïste, qui refuse de partager son os et qui en a des conséquences tragiques.

Selon l'auteur, cette œuvre, éditée chez Gangan Prod, relève d'un processus laborieux comportant un casting, une formation des sélectionnés au jeu d'acteur, le tournage, la post-production et la promotion. Par ailleurs, la distribution laisse apercevoir un certain nombre de comédiens, entre autres : Fidèle Anato, lui-même, incarne un fou, Judicaël Avagbé, l'avare qui a pour épouse,Vovo, Edith Béhanzin, de son nom réel, Fiacre Anato, qui interprète Kpakpa, l'ami de Gbodja. 
Dans l'harmonie de leur jeu, ils permettent de faire ressortir une leçon forte, surtout en cette période que certaines langues veulent croire morose : il faut partager ce que l'on a avec les autres, surtout si l'on en a en surplus. Cet appel constitue le résultat d'un constat désolant effectué par Le Baobab : "Il existe un fossé entre les riches et les pauvres", ce qui l'amène à exhorter : "Décentralisez vos os, c'est-à-dire vos poches car, à force de ne pas donner, on court à sa perte." Poursuivant selon cette logique, son regard devient soudain grave : "Quand il y en a trop et que les gens meurent de faim, ils peuvent vous tuer pour s'en approprier." 
Cette œuvre relève d'une auto-production que des partenaires ont accompagnée : la télévision béninoise Canal 3, le Jus de fruits Xana, le Port autonome de Cotonou, la Société béninoise de manutention portuaire (Sobemap), la Société Afrique destination, notamment.
Après Ici, maître, sa première œuvre cinématographique humoristique, Fidèle Anato, Où est l'os sous les bras,  se lance à la conquête du public béninois et aussi de celui de la sous-région ouest-africaine.

Marcel Kpogodo