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mercredi 20 juillet 2016

Jérôme Tossavi, sur le succès éclatant de la ''Nuit poétique'' : « […] on a visité tous les couvents de la bonne poésie … »

Dans le cadre d’une interview qu’il nous a accordé


La soirée du samedi 9 juillet 2016, à la petite paillote de l’Institut français de Cotonou, s’est trouvée entièrement dédiée à la poésie. Un public immense débordant de partout et occupant tout l’espace disponible et indisponible, assoiffé de déclamations chaudes et envolées, comblé ou dégoûté, selon le cas, par des noms désormais conventionnels de la poésie béninoise : Florent Eustache Hessou, Daté Atavito Barnabé-Akayi, Basile Dagbéto, Armand Adjagbo, Louis-Mesmin Glèlè, Marcel-Christian Ogoundélé, Constantin Amoussou, Jean-Paul Tooh-Tooh, Edwige Chekpo, Esther Doko, Djamile Mama Gao, Toussaint Djaho … Sous le couvert de ’’Poésie et engagement’’, le thème de la 2ème édition de la ’’Nuit poétique’’. Par ailleurs, les petits plats ayant été mis dans les grands, 20 minutes d’un spectacle vivant sur l’évolution de la poésie béninoise, de sa naissance à nos jours, présenté par l’Association ’’Katoulati’’, a planté le décor de la densité des effervescences et des effluves verbales, selon un fondement thématique d’une variété à défier les imaginations les plus fécondes, en cette soirée bénie des mots durs et forts, des paroles douces et condescendantes, venus du tréfonds des cœurs. Des anges de la musique, deux générations conciliantes, Dag Jack et Meschac Adjaho, ont fait monter la tension de l’esprit des spectateurs, tous sexes et tous âges confondus, les deux artistes, à la guitare, Bonaventure Didolanvi, de ’’Wood sound’’, à la batterie, l’homme de théâtre, Anicet Adanzounon, officiant à la platine … L’Institut français du Bénin, le Fonds d’aide à la culture et ’’Darimage’’, partenaires de cette réussite, devront se frotter les mains d’avoir fait confiance à l’Association culturelle, ’’Mignon-tourbillon’’, ayant orchestré l’existence de cette voix forte de la poésie béninoise, la ’’Nuit poétique’’, un événement par rapport auquel lequel Jérôme Tossavi, le manager principal, a accepté de partager avec nous ses idées …    

Jérôme Tossavi, Président de l'Association, "Mignon-tourbillon''

Journal ’’Le Mutateur’’ : Bonjour à vous, Jérôme Tossavi. Vous êtes le Président de l’Association ’’Mignon-tourbillon’’ qui a organisé la 2ème édition de  la ’’Nuit poétique’’, dans la soirée du samedi 9 juillet 2016. Cet événement a été un véritable succès, avec la déclamation musicalement accompagnée de près d’une quinzaine de poètes béninois parmi les plus talentueux, cette séquence de près de 3 heures de temps, précédée d’un spectacle d’une vingtaine de minutes sur l’historique de la poésie béninoise, sans oublier que les 8 et 9 juillet, un atelier de formation en écriture poétique a été offert aux lauréats de l’appel à textes, lancé dans le cadre du projet concernant la ’’Nuit poétique’’. En outre, la ’’Nuit poétique’’ a drainé un monde impressionnant à la petite paillote de l’Institut français de Cotonou, qui débordait de tous les alentours. Comment expliquez-vous ce succès retentissant ? Les Béninois sont-ils si férus de poésie ?


Jérôme Tossavi : Ce succès que vous évoquez est le fruit d’un travail acharné pour offrir une belle vitrine à la poésie béninoise en léthargie. L’association ’’Mignon-tourbillon’’, que je pilote, a simplement voulu offrir aux spectateurs la ’’Nuit’’ de tous les frissons. Ce désir ardent nous a poussés à braver toutes les obstacles pour asseoir une vraie foire aux mots et aux maux, autour de l’idéologie de la poésie et de l’engagement. On pensait avoir affaire à un projet de grande faisabilité. Mais, très vite, nous nous sommes aperçus de la grande difficulté à porter ce rêve commun en réalité. Du coup, on a visité tous les couvents de la bonne poésie pour faire le difficile casting des plus brillants poètes de notre terre et ciel. Puisqu’on tenait à la qualité, nous avons subi une forte pression dans la programmation mais, au finish, nous nous sommes entendus sur la vaste projection de notre slogan qui prise la nuit de tous les rêves. C’est ainsi qu’on a pu réunir sur la même scène et, autour du même micro, une douzaine de poètes tous engagés et enragés, pour porter la plaie d’une société en pleine chute. Cette deuxième saison nous a particulièrement motivés à aller plus de l’avant, vu la forte mobilisation nationale constatée pour porter au pinacle ce projet de grande valeur humaniste. En initiant cette soirée unique de rêves et d’émotions, nous étions loin d’imaginer qu’elle déboucherait sur une telle effervescence nationale. Mais, en toute surprise, nous avons reçu l’appel du peuple à cette ’’Nuit’’ qui n’a pas fermer les paupières de la soirée. Nous avons vu des enfants, des adolescents, des jeunes comme des personnes âgées, qui ont résisté à l’insomnie de la ’’Nuit’’. Pour nous, c’est une vraie réussite, car parvenir à rassembler le peuple béninois, mutilé par les problèmes sociaux autour de la parole, relève, à notre avis, d’un vrai mérite. Deux raisons fondamentales justifient ce succès éclatant que vous évoquez si bien. La première est relative à la grande envie étouffée des Béninois de plus en plus assoiffés de vraies distractions jouissives, faute de canaux de loisirs artistiques, en manque terrible dans le pays. La deuxième est liée à la méconnaissance totale du répertoire poétique béninois. Je pense que la ’’Nuit poétique’’ a gagné cette bataille en misant sur ces deux aspects de la réussite de tout grand événement qui doit chercher à être ludique et utile.



Quelles perspectives vous tracez-vous pour la 3ème édition de l’événement, l’année prochaine ?

D’abord, nous nous donnons comme prochaine priorité de parvenir à positionner la ’’Nuit poétique’’ sur l’échiquier international. Pour une telle réalité, il nous faut davantage habiller l’événement et le rendre plus consommable. Et, sur ce plan, nous comptons désormais créer et mettre à profit un site web entièrement dédié à la manifestation. Ceci nous assurera la nette visibilité, au plan mondial, car beaucoup de poètes, à travers le monde, nous écrivent pour réserver leurs places pour la 3ème saison qui se tiendra en mars 2017.
La 3ème saison sera encore plus belle, avec une large ouverture sur l’international. Nous attendons une forte délégation de poètes africains et européens. Et, sur le sujet, nous avons déjà une forte demande de participations de grands poètes français, canadiens et africains, de tous les cabanons. Nous ferons le nécessaire pour mettre en scène les grandes voix de la poésie béninoise encore vivantes, et pour rendre les hommages les plus mérités aux poètes béninois qui ont rendu l’âme, plume et verbe dans la bouche. Le volet ’’Formation et initiation en techniques d’écriture poétique’’ sera encore au rendez-vous, lors de la 3ème saison. La ’’Nuit poétique’’ prendra, ainsi, de plus en plus, l’allure d’un grand festival international, avec la prochaine construction, à Sékou (à quelques encablures de Cotonou) de la première résidence internationale des poètes du monde. La ’’Nuit poétique’’ se servira donc de cette résidence pour mettre en place la première maison d’édition entièrement dédiée à la poésie, en Afrique.



L’Association ’’Mignon-tourbillon’’ est l’organisation par laquelle vous avez tenu la ’’Nuit poétique’’. Pouvez-vous définir le concept ’’Mignon-tourbillon’’ ?

L’Association ’’Mignon-tourbillon’’ est d’abord une plateforme de diffusion et de promotion des œuvres littéraires et poétiques, au Bénin et en Afrique. Elle se présente comme un conglomérat de jeunes dynamiques et engagés dont le seul objectif est de parvenir à révolutionner le milieu littéraire et poétique béninois, par des actes très positifs. Elle vient de voir le jour et dégage déjà une forte température d’adhésion, de partout. Elle privilégie la créativité fertile autour des œuvres littéraires et artistiques bénéfiques, pour l’avancée de notre culture. L’association ’’Mignon-tourbillon’’, dont je suis le Président, s’investit aussi dans le domaine éducatif et social, à travers son concours d’excellence littéraire en milieu scolaire, dénommé ’’Challenge les amis du livre’’, qui sera à sa quatrième édition, en mars 2017. Elle est apolitique et ouvre ses portes à toute bonne volonté épousant les mêmes réalités que nous.



Propos recueillis par Marcel Kpogodo

samedi 30 novembre 2013

Concert d’hommage à GG Vikey et à Gnonnas Pedro


Décalage contre décalquage

Des membres du public en liesse, dansant sur la scène, sous l'interprétation du duo Gilles Gnonnas-Dag Jack ...

La commémoration du cinquantenaire de l’Institut français du Bénin a donné lieu, le samedi 23 novembre 2013, au théâtre de verdure de la structure, à un concert d’hommage à deux icones défuntes de la musique béninoise : Gnonnas Pedro et GG Vikey. La lourde responsabilité artistique de leur imitation a été assurée respectivement par Gilles Gnonnas, le fils du premier, et par Dag Jack. Deux factures différentes de réussite.

 '’Agbadja’’, ’Vonvon non’’,’’Fini pavé’’, ’’Musique en vérité’’, ’’Midomiton’’, ’’Agan massi’’ et ’’Do winnin’’, d’une part, et ’’Gentleman Vikey’’, ’’Davi ré’’, ’’Que Dieu te bénisse’’, ’’Fais-toi plus belle’’, ’’Adowè’’, ’’Je te revois’’, ’’Le lac Ahémé’’, ’’Vive les mariés’’, d’autre part, sont les morceaux interprétés, chacun de son côté, par, respectivement Gilles Gnoonas et Dag Jack, en cette soirée du samedi 23 novembre 2013, au théâtre de verdure de l’Institut français du Bénin dont la commémoration du cinquantenaire était en jeu. Il s’agissait pour eux de faire revivre aux mélomanes nostalgiques des voix disparues de Gnonnas Pedro et de GG Vikey les élans de leur voix musicale qui les enchantaient tant, du vivant de ces baobabs de la musique béninoise.
Gilles Gnonnas en individuel ...
A l’arrivée, la voix de Gilles Gnonnas était appuyée par des balancements très enthousiastes des pieds et des bras, rythmés par l’agencement des instruments harmonieusement joués par les ’’Black santiago’’ de Cotonou, selon tel ou tel autre morceau de son père. Il manifestait une voix se moulant très difficilement dans celle forte et mélodieuse de son géniteur, d’où un décalage que le public lui pardonnait bien. En effet, il avait le mérite de replonger ces inconditionnels de l’ancien sociétaire des ’’Africando’’ dans l’ambiance instrumentale et thématique des chauds moments salsa et lyriques de ce Gnonnas Pedro qui avait fait bouger Cotonou, l’Afrique, l’Amérique latine et le reste du monde.
... de même que Dag Jack ...
... avec ses quatre garçons après le concert ...
Concernant Dag Jack, celui-ci était plus en réussite, dans son imitation de la voix de GG Vikey. La personnalité qu’il déployait se décalquait si bien dans celle de son mentor de circonstance, aussi bien dans la sobriété élégante de son allure vestimentaire que dans sa voix si tendre, si mélodieuse, si envoûtante, si lyrique, si vraie, que le public avait l’impression de se retrouver en face du vrai GG Vikey. Ceci poussa une spectatrice, fanatique plus que jamais à s’écrier : « Mais, c’est lui, il est de retour ! »
... où les Black santiago, saluant le public ...
Dans de telles conditions d’excellence vocale et psychologique, les huit morceaux que Dag Jack a exécutés, avec, aussi, l’appui instrumentale des ’’Black santiago’’, se sont déroulés trop vite, au goût du public dont certains membres se succédaient sur la scène, qui pour danser, qui pour donner un billet à l’interprète. La réussite de Dag Jack dans le décalquage de la voix de GG Vikey a révélé que l’homme était un expert en la matière lorsque, moulé dans un duo ultime avec Gilles Gnonnas, pour un morceau de Pedro, il a supplanté le fils putatif sur son propre terrain ; ses qualités de professionnel en matière d’interprétation n’ont donc plus fait l’objet d’aucune ambiguïté.
...  se sont raffraîchis.
Par rapport à son jeu, Dag Jack a donc occasionné une terrible confusion, suscitant, dans sa tenue sur scène, le questionnement au niveau des spectateurs : « S’agit-il de GG Vikey lui-même? », « Celui-ci est-il ressuscité ? » Sa posture droite, le geste rare mais bien calculé, le visage impassiblement rêveur, nostalgique des rives du fleuve Mono, un visage parfois empreint d’une tristesse amoureuse, d’une langueur décisive, le timbre de voix parfaitement décalqué sur celui du vrai GG Vikey, voilà autant de faits de réussite ayant nettement travaillé à créer l’effet d’un réel décalquage de l’image de Dag Jack sur celle de ce célèbre chanteur béninois originaire de Bopa. Au terme de l’effet psychologique d’illusion analogique, c’est le retour de tous sur terre. Les éléments de réussite précédemment évoqué ont, par ailleurs, placé Dag Jack au-dessus de Gilles Gnonnas, même s’il ne s’agissait pas d’un concours d’interprétation de morceaux de chanteurs béninois.
Pour un concert d’hommage de commémoration du cinquantenaire de l’Institut français du Bénin, ce fut une occasion pour le public de mesurer la qualité du travail artistique se réalisant en sourdine chez Gnonnas Gilles et Dag Jack. 

Marcel Kpogodo