samedi 29 septembre 2018

Franck Hantan : « Je veux révéler les valeurs culturelles, cultuelles et historiques de mon pays, le Bénin […] »

Dans une interview accordée à notre Rédaction

Franck Hantan est un artiste béninois tenturier, peintre et sculpteur. Dans sa démarche de travail, il franchit ses paliers, traversant des étapes, explorant, chaque fois, de nouvelles phases, pour un but à deux bras, qui, lui, manifeste sa persévérance : l’immersion dans la pratique séculaire de la tenture par ses ancêtres d’artistes, et la remise au goût de l’actualité de pratiques que la religion africaine, dénommée le ’’vaudun’’, retient comme salvatrices pour l’homme. Ce second aspect, qui valorise la démarche artistique de ce créateur, fonde une nouvelle affinité de toiles que Franck Hantan soumet à la découverte du public : ’’La série des initiés’’. Plus de détails dans cette interview …

Franck Hantan
Le Mutateur : Bonjour Franck Hantan. Vous êtes un artiste peintre et, un peu sculpteur, qui s’affirme par la pratique modernisée de l’art de la tenture, hérité des ancêtres, ce qui s’est rendu remarquable par votre dernière exposition du 21 octobre 2017 à Cotonou, intitulée ’’Succès’’. Presqu’un an après cet événement, quel bilan pouvez-vous faire de cette exposition ? A-t-elle été un succès ?

Franck Hantan : Ma dernière exposition du 21 octobre 2017, à Cotonou, intitulée ’’Succès’’, était déjà un succès avant d’être car, le succès, pour moi, est l’avancement dans ma création et l’ouverture qu’elle m’apporte. Je peux donc dire que cette exposition a été un succès car elle m’a permis de décrocher d’autres expositions en Europe.


En mars 2018, vous avez tenu une autre exposition à Paris. Dans quelle galerie l’avez-vous organisée ? Quel en était le thème ? Quelles œuvres pouvait-on y voir ?

Le 26 mars 2018, j’ai tenu une autre exposition à Paris, sous la direction de la Galerie ’’Arts Design Africa’’. Le thème de cette exposition était ’’Houindonomboua’’, ce qui veut dire, en langue fon,  « La culture ne s’éteint jamais ». On pouvait y voir quelques œuvres de ma collection ’’Succès’’ et de ’’La série des initiés’’.


En ce début du mois de septembre 2018, la Page Facebook de la ’’Galerie Hantan’’ laisse admirer de nouvelles œuvres, celles de ’’La série des initiés’’. Une nouvelle démarche semble se dessiner, celle de la rentrée. Pouvez-vous nous expliquer ? Pouvez-vous nous décrire cette nouvelle démarche ?

’’Les initiés’’ est une série sur laquelle je travaillais avant l’exposition du 26 octobre 2017. Cette inspiration vient des divers aspects de Gbôzunmê, la forêt sacrée où vivaient mes ancêtres avant d’être capturés comme esclaves par le roi Agadja, et aussi de mon attachement à l’environnement sain, au terreau.


Apparemment, ces œuvres abordent des réalités historiques et culturelles typiquement béninoises. Pouvez-vous les évoquer ?

« La culture nous apparaît comme la connaissance de ce qui a fait de l’homme autre chose qu’un accident de l’univers », a affirmé André Malraux, pour signifier l’importance de la culture en chaque être humain. 


''Le temple des pythons'' et ...
Platon ira plus loin en affirmant qu’ « une culture est le mode de vie d’une société ». Chaque individu, chaque peuple n’existe donc qu’à travers sa culture. La culture étant vaste et très diversifiée, surtout, dans mon pays aux multiples facettes comme le Bénin, il paraît judicieux de l’aborder au travers d’un de ses pans les plus importants, notamment, le ’’vaudun’’.


''Place Agondji'', deux toiles de ''La série des initiés''
Quel message voulez-vous faire passer par ces œuvres ?

Dans cette série, je veux expliquer que l’initiation dans le vaudun comporte plusieurs étapes : l’isolement, l’initiation, les initiés, la danse des initiés et, les jumeaux, qui sont un peu spéciaux.


Elles vous ont demandé combien de temps de travail ?

Il m’a fallu environ trois mois pour les réaliser.


Pour vous qui vivez et travaillez en France, quel est le sens de votre recours à ces réalités historiques et culturelles typiquement béninoises ? Nostalgie ? Excitation de vos compatriotes à un retour aux sources ? Rappel historique ?

Je veux révéler les valeurs culturelles, cultuelles et historiques de mon pays, le Bénin, pays de l’Afrique de l’ouest, à travers le monde entier.


Ces œuvres montrent l’abandon de l’art modernisé, à votre goût, de la tenture. Cet abandon est-il momentané ou définitif ?

Non, ce n’est pas un abandon, car il y a toujours la présence de l’histoire des tenturiers, Hantan et Zinflou, dans chaque œuvre créée. Les fils tissés que j’applique sur mes œuvres constituent l’héritage que j’ai gardé de l’art de mes aïeux.


Il nous a semblé que vous vous lancez simultanément dans la sculpture. Qu’en est-il ?

Oui je fais aussi de la sculpture à partir de mes pots de colle et de peinture. Je sculpte surtout quand je n’ai pas beaucoup d’inspiration pour peindre.


Avez-vous des projets pour le Bénin ? Lesquels ? Dans quelle durée ?

En août dernier, j’ai été reçu par Madame Gaëlle Baujean qui est conservatrice au Musée ’’Jacques Chirac’’, à Paris. Lors de cette rencontre, j’ai découvert trois tentures réalisées par mes ancêtres vers les années 1800. Reprendre ces tentures, dans une nouvelle technique, puis en faire une grande exposition itinérante, en commençant par mon pays, est mon objectif. Le sens de cette exposition sera une plongée dans l’histoire du Danhomè. Et, je pense la faire vers la fin de 2019.

Propos recueillis par Marcel Kpogodo

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