jeudi 27 août 2009

68ème anniversaire de cesaria evora


Attention: Sur ce blog, nous avons choisi de ne parler que des artistes béninois. Mais, ce 27 août, nous faisons une petite exception, étant donné qu'un grand nom de la musique africaine fête son 68ème Anniversaire: Cesaria Evora. Hommage à elle!!!! Merci de votre compréhension ...
Spécial 68ème Anniversaire


Cesaria Evora, on peut réussir à tout âge



Aujourd’hui, 27 août 2009, c’est le 68ème anniversaire de celle que le monde entier s’accorde à appeler affectueusement "la diva aux pieds nus" . De nationalité capverdienne, Cesaria Evora est née dans la ville de Mindelo. A cette heureuse occasion, nous vous proposons de revisiter la vie de cette femme, exceptionnelle, en ce sens que c’est à un âge très avancé qu’elle a connu la réussite, la prospérité et la gloire, rompant ainsi avec plusieurs décennies de dénuement.


68 ans est un âge auquel elle peut se permettre de s’acheter tout ce qu’elle désire et de voyager vers n’importe quelle destination du monde, parce qu’elle est mondialement connue aujourd’hui et très fortunée. Pourtant, il n’en est pas ainsi pour beaucoup de personnes de son âge et, il y a près d’une vingtaine d’années, elle ne se prévoyait peut-être pas ce destin : Cesaria Evora, comme la majorité des gens de la planète, a connu la grande pauvreté et l’alcoolisme.


Une épreuve porteuse



Quand elle avait sept ans, son père qui est un musicien violoniste, décède prématurément, par excès d’alcool, avouera-t-elle. Alors, sa mère qui a beaucoup de mal à élever ses sept enfants, confie la petite Cesaria à l’orphelinat de la localité, où elle apprend à chanter dans une chorale ; elle quitte cet endroit à l’âge de treize ans. Cette mère, cuisinière de métier, qui lui a fait effectuer cette expérience de l’orphelinat, lui a donné, sans le savoir, le moyen de se tracer une vocation dans le domaine de la chanson et de vivre de quelque chose.



Une adolescence artistique et libertine



A seize ans, elle fait la connaissance d’un marin, Eduardo, son premier grand amoureux ; il est l’un de ceux qui lui apprennent à interpréter les anciennes chansons de rythmes typiquement capverdiens, à savoir les coladeras et les mornas qui, en l’occurrence, sont très mélancoliques. Durant son adolescence, elle gagne sa vie en se produisant à travers les bars de sa ville natale et, sur l’île de Sao Vicente, elle se fait un minimum d’argent, boit de l’alcool et fume puis, paradoxalement, se perfectionne dans son art musical. La vie d’artiste est vraiment libre et, Cize – pour les intimes – y prend goût ; elle côtoie plusieurs musiciens de son quartier. A cette époque, le Cap-Vert n’était pas encore un Etat indépendant, et tout le pays vibrait au rythme des coladeras et des mornas, toutes deux qui sont un héritage de l’ère de la traite négrière que les ancêtres de Cesaria ont subie jusqu’au XVIIIème siècle. Une coïncidence bizarre est que le plus grand compositeur de mornas au Cap-Vert s’appelle Francisco Da Cruz (1905-1958) et est le cousin direct du père de Cize ; voilà donc le fondement de l’héritage de la diva. La morna est, en fin de compte, le rythme qu’elle pratique le plus, ce qui lui fait véhiculer des thèmes tels que la souffrance, la mélancolie et l’exil.


Le cap très éprouvant de la trentaine-quarantaine



Une période très dure matériellement pour Cesaria. C’est aussi l’époque de l’assassinat du héros du nationalisme africain lusophone, Amilcar Cabral, en 1973. Mais, elle n’est plus une inconnue dans l’Archipel du Cap-Vert ; elle ne cesse de chanter à travers les pianos-bars. Grâce à la radio et à quelques disques de 45 tours qu’elle a sortis, elle devient prophète chez elle. Etant dans un pays pauvre, la misère ne la quitte pas pour autant ; elle vit au quotidien la mélancolie et le désespoir de ses chansons, la pauvreté et l’alcool sont ses parents les plus indéfectibles. Son pays n’est pas mieux loti et, plus de cinq cent mille capverdiens s’exilent à l’étranger. Au niveau de Cize, les difficultés sont si tenaces qu’elle décide d’en finir avec la vie très dure d’artiste ; raccrochant pendant dix ans, elle a traversé le désert, même sur le plan amoureux, accumulant déception sur déception. Son chagrin profond et récurrent, elle le confie à l’alcool ; elle s’y réfugie.


La sortie de crise



A 44 ans, le destin frappe banalement à sa porte : grâce au soutien de Bana, le parrain des musiques capverdiennes, exilé au Portugal, une association de femmes invite, en 1985, Cesaria à Lisbonne pour donner une série de concerts, et pour enregistrer un premier album, confidentiellement, dictature capverdienne oblige. Dans cette ville, elle rencontre Jose Da Silva, un jeune Français d’origine capverdienne, qui lui propose d’enregistrer cet album à Paris ; elle lui répond ’’oui’’ et cela lui ouvre la porte vers la consécration et la gloire mondiales.
En effet, Da Silva, qui devient ainsi son producteur, sort l’album ’’La Diva aux pieds nus’’, de sensibilité ’’coladera-zouk’’, qui remporte un succès immédiat. C’était en 1988. Cet opus est immédiatement suivi d’un concert qu’elle donne au New Morning, dans la capitale française ; elle en devient la révélation. Un autre album suit : ’’Destino Di Belita’’ en 1990. Les deux disques tranchent véritablement par l’arrangement original dû à la spécificité des rythmes typiquement capverdiens dont ils sont les porteurs. En bref, Cesaria rompt du jour au lendemain avec la vie âpre qui était la sienne et, tout le monde veut l’avoir à soi. Ainsi, elle parcourt, pour des prestations scéniques chaque fois redemandées, la France, l’Europe, la Scandinavie, l’Asie, l’Amérique latine, les Etats-Unis, le Canada, le Moyen-Orient, l’Afrique du Nord. Au cours de ces concerts, elle fait salle comble ; elle garde les pieds nus, en hommage aux pauvres de son amour de Cap-Vert.


Les albums et les thèmes



Entre 1988 et 2003, une dizaine de disques voient le jour, aussi savoureux les uns que les autres, avec, en moyenne, un tous les deux ans. Elle a été nominée six fois et a remporté un Grammy Award ; la France l’a faite Officier des Arts et des Lettres. Du côté de son pays, une telle consécration internationale ne pouvait rester non marquée. Ainsi, elle hérita, de la part du Gouvernement, d’un passeport diplomatique. Du côté des organismes humanitaires, elle a été consacrée Ambassadrice contre la Faim pour le PAM ; c’est la première fois pour une vedette africaine.
Quant aux sujets qu’elle aborde, c’est la rupture avec les thèmes du registre triste qu’on lui connaissait. Désormais, elle chante ses racines capverdiennes et développe un grand optimisme, en ce qui concerne l’avenir de sa patrie dans laquelle elle s’est construit une colossale maison où elle reçoit parents, petits-enfants, amis, voisins, et ne manque pas de partager convivialement avec eux du bon ’’catchupa’’, le plat traditionnel du pays, et de distribuer de l’argent.
Un signe supplémentaire de la réussite de Cesaria est la participation de grands musiciens instrumentistes à l’accompagnement musical de ses chansons. A près de soixante-dix ans, elle reste infatigable, accumulant tournées sur tournées.
Cesaria Evora est la preuve vivante qu’on peut réussir sa vie à tout âge. Feu Gnonnas Pedro n’avait-il pas chanté qu’ « il n’est jamais trop tard » ?


Marcel Kpogodo

mercredi 26 août 2009

Kam's, musicien au Bénin




Musique hip-hop au Bénin


Kam’s : « En 2019, j’espère atteindre le niveau de P-Square, de 2 Face, de Fally Ipupa »



Mince, taille un peu au-dessus de la moyenne, allure très simple, figure toute fraîche de la musique, il a accepté de se prêter patiemment à nos questions, révélant une assise dans le hip-hop béninois, un esprit qui pétille et de grandes ambitions de réussite dans l’art et dans le social : Kam’s, à cœur ouvert, pour vous …



Marcel Kpogodo : Bonjour Kam’s. Tu es un jeune artiste de 24 ans, vivant au Bénin, admirateur de Shaggy et de Sean Paul, et tu viens de lancer ton deuxième single. Est-ce que tu peux nous en parler un peu ?



Kam’s : Merci d’abord pour l’interview. Je viens de lancer mon dernier single intitulé ’’Bouge-toi’’, qui est très accessible à tout le monde, surtout aux jeunes, parce que je suis un jeune. Je me dis que pour toucher la jeunesse, il faut qu’on soit dans les normes, dans le même style. Même si le morceau du titre est ’’Bouge-toi’’, si vous l’écoutez, vous sentez qu’il y a toujours le message qui dit à la jeunesse de ne pas baisser les bras, de continuer à se battre, quoi qu’il arrive : je me considère comme un ambassadeur de la jeunesse africaine.



Pourquoi as-tu choisi de faire passer un message relatif à l’espoir ?



Au fait, le message de l’espoir parce que, aujourd’hui, quand je regarde la jeunesse béninoise, je regarde aussi la jeunesse africaine et je trouve que la jeunesse souffre ; moi-même qui en parle, je sais ce que j’endure pour faire sortir mes sons. Aujourd’hui, beaucoup de jeunes africains n’ont plus d’espoir ; ils se disent : « Même si tu termines et que tu as ton diplôme, est-ce que tu auras un emploi ? Tu vas aller chercher un emploi et tu n’en auras jamais ». Beaucoup se lancent dans le banditisme ; les filles, n’en parlons même pas, peut-être, dans la prostitution et autres. Ce que, moi, je leur demande, c’est d’avoir de l’espoir, parce que, sans l’espoir, je ne pense pas qu’on peut vivre ; je leur demande de se dire : « Demain ou après-demain, le soleil brillera pour tout le monde ». On voit des exemples en Afrique : un groupe comme Magic System ; quand vous regardez leur début, ils se sont bâti leur début, c’était comme tout le monde, comme tous les jeunes en Afrique. Aujourd’hui, ils sont sur la scène internationale et, cela a été un des groupes africains qui a été invité à L’Elysée, ce qui n’est pas donné à n’importe qui. Aujourd’hui, cela va sur eux, pourquoi ? Parce qu’ils ont gardé l’espoir. Donc, c’est tout simplement ce que je demande à la jeunesse africaine, à la jeunesse béninoise, et de se battre pour ce qu’elle a choisi de faire, de se mettre à fond la caisse là-dedans, comme on le dit.



Tu considères Shaggy et Sean Paul comme tes repères, ce qui permet de prévoir que ta musique sera du rap, ragga, hip-hop …



Oui, je considère Shaggy comme un repère. Donc, vous allez le voir même déjà, dans les morceaux que j’ai eu à présenter au public, ’’Hop message’’ dont l’instrumental est reggae, et je chante aussi un peu reggae, le deuxième titre ’’Bouge-toi’’ qui fait danse-hall, comme je l’aime, et il faut dire que ma spécialité, c’est de beaucoup travailler sur le danse-hall. Donc, c’est ça qui fait cette musique tropicale danse-hall Jamaïque-Afrique, qui fait une collaboration de ce que vous écoutez dans ce deuxième morceau.



Pourquoi avoir choisi de faire ce genre de musique ?



J’ai choisi de faire ce genre de musique parce que, déjà, à l’époque, quand j’avais commencé la musique, j’étais pas un raggaman, j’étais un rappeur quand j’étais dans le groupe ’’Apokaliptik’’. Mais, après, j’ai été beaucoup influencé en écoutant le danse-hall, en écoutant du reggae comme avec Bob Marley ; j’ai beaucoup été influencé parce que, par exemple, quand vous prenez quelqu’un comme Bob Marley, il avait des textes très très engagés. Je pense que le reggae et le ragga, on trouve un peu le chant là-dedans, ce qu’on ne trouve pas dans le rap pur. Ceci fait que beaucoup de gens sont vraiment repoussés par le rap, qui est ciblé pour un certain public, et non pour tout le monde. Donc, quand c’est du reggae, tout le monde peut l’écouter, parce que ce sont des mélodies chantées ; je pense que les sons chantés, ça passe plus que le rap, tout le monde se retrouve dedans, c’est accessible. C’est ça qui m’a beaucoup influencé, sans oublier aussi l’arrivée des Neg’Marrons au Bénin, pour le Festival Hip-Hop Kankpé organisé par Ardiess ; quand ils ont joué et que je les ai suivis en live, ça m’a donné vraiment la détermination, puisque, eux aussi, c’est des gars qui ont été beaucoup influencés par la musique jamaïcaine, que ça soit du reggae, du danse-hall et tout. Donc, ça m’a beaucoup plu, et je me suis dit que si des Français font de la musique jamaïcaine en français et non en anglais, c’est réussi et que moi aussi je peux le faire. J’ai essayé et ça donne ce que ça donne aujourd’hui.



Ton premier single s’intitule comment ?



’’Hop message’’.



Tu l’as lancé en quelle année et quel en a été l’impact sur le public ?



J’ai lancé le single ’’Hop message’’ en fin 2007 jusqu’en 2008 ; ça a tourné sur toutes les chaînes de télévision et de radio, et ça continue de tourner sur Golfe FM. Au début, il s’agissait pour moi de donner une image d’ambassadeur de la génération consciente. Pour moi, c’était d’amener la jeunesse béninoise voir en Kam’s un représentant de la jeunesse africaine, et il y a beaucoup de gens qui m’ont appelé et qui m’ont dit : « Toi, on s’est retrouvés dans ton son parce qu’il nous a remontés ». Je me dis que ça ne sert à rien de faire un morceau – je ne veux indexer personne – un morceau qui passe et qui ne dit rien de beau ; je pense que lui qui est à la télévision, nous qui avons la chance de passer à la télévision, à la radio, il faudrait qu’on apporte, qu’on envoie des messages un peu conscients au moins, même si nous avons nos problèmes, parce que chacun de nous a toujours ses problèmes. Il y a des fois où on est dans des jours noirs et tout, tu allumes la télé et, au moment où les clips défilent, tu entends un gars qui te dit : « Ouais, il faut garder l’espoir … ». Tu vas te dire que si lui, il dit ça, c’est que, peut-être, on peut toujours garder espoir. Donc, c’était ça le beat ; à mon niveau, même si ce single n’a pas donné ce que je voulais en tant que tel, cela a donné à son niveau.


Est-ce que tu as un album en vue ?



Oui, j’ai un album en vue que je prépare vraiment beaucoup. Cet album, pour moi, ça sera dédié à tous les artistes, ça sera dédié à toute la génération consciente et à toute l’Afrique surtout, parce que, aujourd’hui, quand on voit le nom Kam’s, il y a l’Afrique qui est d’abord en avant, ça signifie beaucoup : c’est que ça représente l’Afrique et tout.



Et, tu penses faire sortir cet album quand, avec combien de titres ?



Je pense sortir cet album en fin 2009. Les titres, pour le moment, je suis en train de travailler dessus. Donc, je ne peux pas encore donner des titres précis. On verra avec le travail, on verra comment ça va se faire avec les moyens aussi qui vont avec, parce qu’il faut aussi les moyens qui vont avec.



En dehors du thème de l’espoir, quels sont les autres sujets que tu aimes aborder sur tes productions ?



Déjà, le prochain single sera lancé ; ’’Bouge-toi’’, c’est une promotion jusqu’en décembre. Après décembre, janvier, il y a un autre morceau qui sera lancé mais, là, quand même, je reviens sur un côté sentimental, parce qu’il faut reconnaître que c’est un truc auquel personne n’échappe dans le monde ; il n’y a personne qui va dire qu’il n’a jamais été amoureux. Donc, je vais présenter un morceau où je raconte une partie de ma vie, à l’époque où j’avais 18 ans, l’histoire d’une fille qui m’a marqué jusqu’à maintenant ; je vais chanter un peu de l’amour. C’est un peu ça. A part l’amour, vous allez trouver des sons engagés, parce que je suis quelqu’un qui suit beaucoup l’actualité au niveau politique, même si je me critique plus souvent. J’aimerais bien donner un peu seulement mon point de vue sur la politique africaine. Moi, je suis pour ce que le Président Kadhafi initie, l’Union africaine, les Etats-Unis d’Afrique ; même s’il y a des blocages aujourd’hui, l’Afrique unie, ça va faire mal demain, comme le dit Tiken Jah Fakoly.



Quel est ton parcours dans l’univers du hip-hop béninois ?



Le monde du hip-hop béninois, j’y ai beaucoup de relations, je m’entends avec tous les artistes. En réalité, j’ai commencé d’abord par le Ccf (Ndlr : Centre culturel français) de Cotonou, avec les Duels cruels, auxquels j’ai participé. Après, j’ai fait un featuring avec le chanteur PK, dans un premier morceau qu’on a présenté aux Duels cruels, qui y a été beaucoup apprécié, et qui tournait en ce moment sur Radio Tokpa ; on a présenté le morceau et ça a pris, c’était Ma dernière demeure. Pour moi, c’était une expérience, c’était la première fois que j’entrais en studio ; j’en profite pour faire un clin d’œil à l’ingénieur du son, qui est très connu dans le monde hip-hop, Sam Seed. Le travail était vraiment dur, et on doutait du morceau, au fait. En présentant le morceau, c’est là où on a eu encore de la hauteur, j’ai eu encore la détermination, surtout, de pouvoir faire mieux. Au début, quand on présentait le morceau, le public nous regardait, tout le monde nous regardait tranquillement, comme ça. Mais, après, vers la fin, tout le monde a commencé à acclamer et, vraiment, ça avait pris ce jour-là ; je me suis dit : « Si ça prend comme ça … ». C’est là où j’ai eu à connaître beaucoup d’artistes du hip-hop béninois, j’ai eu à les connaître au niveau des Duels cruels, on a sympathisé, parce que, à chaque fois, tout le monde venait là, toute la génération du hip-hop béninois, en tout cas.



As-tu d’autres références ?



Il y a, par exemple, Rap Rnb, qui était organisé, à l’époque, par Joao, l’ex-membre d’Ardiess, c’étaient mes débuts. A part ça, dernièrement (Ndlr : le 04 juillet 2009, à l’Espace Tchif), j’ai fait la première partie du concert acoustique de Zeynab, j’ai participé même au Projet du Ministère de la Culture qui était de promouvoir un peu les artistes ; l’idée du Ministre, c’était qu’on nous voit à la télévision, mais le public n’a pas toujours la chance de nous voir en contact avec lui. Même en cas de concert, c’est payant et tout le monde n’arrive pas à venir. Ce qu’il avait organisé était gratuit, ouvert à tout le monde ; j’ai participé à ça, j’ai fait beaucoup d’autres trucs, j’ai fait Miss Eneam, j’ai fait beaucoup de choses, beaucoup de podiums, qu’il y en a même qui m’échappent.



Ayant entrepris des études en Télécommunications, qu’est-ce qui t’a conduit à la musique ?



J’ai adopté la musique comme métier, tout simplement parce que je trouvais que c’est ma manière de pouvoir communiquer avec les gens. C’est pour partager, avec les gens, certaines réalités que moi-même je vis ; j’ai trouvé que la musique, c’est la meilleure manière de communiquer, parce que ta promotion est jouée et tout le monde t’écoute, tout le monde écoute ton texte forcément. Donc, c’est là où je me suis lancé dans la musique. A part ça, aujourd’hui, moi, je ne fais pas la musique pour le business, je ne fais pas la musique pour me faire voir à la télévision, je fais la musique par passion, parce que j’aime vraiment la musique. Désormais, à part que je peux partager mes textes avec les gens, désormais aussi, vraiment, quand je chante, c’est la plus belle chose pour moi ; quand j’écoute mes sons, quand je vois ce que j’ai eu à faire aujourd’hui, quand je regarde mon parcours jusqu’à maintenant, même si je ne suis pas encore satisfait de ce j’ai eu à faire, je me dis que c’est le chemin que j’ai choisi aujourd’hui, coûte que coûte, vaille que vaille.



Quel est l’objectif que tu espères atteindre d’ici à 2019 ?



D’ici à 2019, si ça continue comme ça avance maintenant, aujourd’hui, j’espère atteindre le niveau de P-Square, de 2 Face, des artistes qui ont décollé internationalement. Pourquoi pas comme Fally Ipupa ? Pour moi, sur les singles à venir, je réserve beaucoup de surprises ! C’est que, ça va frapper d’une façon où tout le monde va s’étonner : « C’est lui qui a fait ça ? » Donc, voilà pourquoi je me dis, je serai peut-être comme ces artistes que je viens de citer, comme Magic System. Voilà.



Comment fais-tu pour financer tes activités artistiques ?



Pour le moment, c’est très dur, il faut le dire. Je profite de l’interview pour pouvoir lancer un appel à un producteur professionnel, à un promoteur qui peut aider, qui sent que la musique que je fais lui plaît, qui peut mettre la main à la poche pour pouvoir accompagner ce que je fais. J’appelle tout le monde, et je remercie encore le seul partenaire que j’ai pour le moment, Monsieur Sam, qui est le Directeur de Master Prod à Cotonou ; lui, qui, jusqu’à aujourd’hui, est en train de beaucoup faire vraiment. J’invite aussi tous les autres partenaires à pouvoir se joindre à lui, pour qu’on puisse réaliser ce que je t’ai dit en quelques mots.



Un dernier mot pour ceux qui lisent cette interview …



Je dis à tout le monde de me soutenir, pas parce que, peut-être, c’est Kam’s, mais de me soutenir par rapport aux projets aussi que j’ai derrière moi. Je ne fais pas la musique parce qu’il faut faire de la musique ; il y a beaucoup qui ont chanté comme moi, qui ont chanté des morceaux d’espoir, mais, aujourd’hui, quand on regarde concrètement, ils ont fait ça pour du marketing. Mais, moi, je ne fais pas du marketing, parce que, en décembre, à part mon album qui est prévu, il y aura aussi un projet intitulé ’’Hop Message’’, qui va réunir tous les artistes de la place et pour recueillir des fonds d’aide pour les enfants orphelins, ceux qui sont dans les Ong, qui passent souvent le 25 décembre, comme ça, dans le noir, alors que, qu’est-ce qui me coûte, moi, de faire trois morceaux sur scène, sans qu’on me paye, pour ces enfants soient heureux ? Cela ne me coûte rien. Qu’est-ce que ça coûte à Zeynab, à Ardiess, à tout le monde ? Cela ne coûte rien de venir faire ce podium pour que, avec toutes les entrées qu’on aura, on puisse aider ces enfants. Donc, c’est ça le projet que j’ai pour montrer que je ne dis pas le message de l’espoir parce qu’il faut le dire dans la bouche ; je le dis et il faut aussi réaliser les choses concrètes qui vont avec.


Propos recueillis par Marcel Kpogodo


Pour joindre l'artiste directement: franckparis10@yahoo.fr / kevinvirgal@yahoo.fr / Tél.: (00229) 96.14.71.00





Don emiliano, musicien béninois


Vicissitudes de la musique au Bénin


Une sirène traquée appelle au secours !


Il aura bientôt 42 ans. Qui peut croire que, dans un pays comme le Bénin, reconnu pour sa démocratie, il puisse y avoir encore des exilés ? Il en est un mais, sur le plan musical. La particularité de sa situation est que la persécution dont il se plaint d’être la victime, le pousse à restreindre ses mouvements dans tout le pays et à se recroqueviller à Lokossa. Ce n’est pas un moindre nom qu’il clame dès qu’il faut placer un auteur sur les tracasseries dont il se plaint. C’est à la limite du cauchemar !
Il a sorti son premier album de six (6) morceaux, en 1998, qui porte le titre ’’Zon mi ma wa’’ et qui danse sur plusieurs rythmes musicaux, dont la salsa originale et le « sinhou », issu du « tchinkoumè », ce qu’il se plaît à appeler la musique aquatique. Selon lui, le succès de ses titres sur les radios, au début des années 2000, a suscité la fougue de son persécuteur qui semble lui reprocher de pratiquer le même rythme que lui, et même mieux ! D’où, la chasse de ce baobab de la musique béninoise contre lui ; le nec plus ultra de cette persécution a été l’annonce de la mort de ce musicien qui, en ce moment, était vraiment très jeune. Sur certaines radios donc, sa mort fut annoncée tambour battant, alors qu’il était bel et bien vivant.
Notre artiste va jusqu’à affirmer qu’il a dû aller se cacher à Lokossa, pour se faire oublier. Il vit de prestations musicales ponctuelles qu’il exécute sur les places publiques, dans les marchés et partout où il se sent capable de réunir un petit monde pour l’écouter.
Ce jeune, qui appelle au secours, et qui voudrait bénéficier d’une protection de la part même des plus hautes autorités de l’Etat, s’appelle Don Emiliano, de son vrai nom, Emile Constantin Akodossoudé.



Marcel Kpogodo

samedi 22 août 2009

Hodall Béo et Boni Yayi


Selon Hodall Béo qui parle de Boni Yayi


« Le Chauffeur [doit être] assez vigilant, parce qu’il y a des pièges à l’intérieur de la voiture, comme sur la route … »

Quand le Programme de soutien aux initiatives culturelles décentralisées (Psicd) s’invite dans la bande dessinée, c’est pour financer l’édition d’une bonne dizaine de bédéistes béninois. Hodall Béo, qui est l’un d’eux, a accepté de se confier à nous, à ce propos, ce qui n’a empêché d’aborder avec lui beaucoup d’autres sujets d’un intérêt certain, même ceux les plus inattendus.

Marcel Kpogodo : Hodall Béo, cela fait un peu longtemps qu’on a entendu parler de toi ; on est curieux de ce que tu deviens. Est-ce que tu es toujours à Cotonou, ou, est-ce que tu as effectué un voyage sur l’Etranger ?

Hodall Béo :
Non, je suis toujours à Cotonou et je continue d’exercer dans l’art plastique, dans le graphisme, en général, puisque, je ne suis pas seulement peintre, je ne suis pas seulement bédéiste, je ne fais pas que l’illustration, je suis aussi dans le montage vidéo, dans la réalisation. C’est beaucoup de secteurs d’activités déjà, que j’embrasse à la fois, c’est beaucoup de travaux qui me cachent énormément parce qu’ils sont demandeurs de ma présence et d’une certaine disponibilité.

On peut donc conclure que tu as abandonné la peinture …

Non, je n’ai pas abandonné la peinture. En fait, tout art se mûrit, se magnifie d’abord au cœur de l’artiste, donc, dire que j’ai abandonné, ce serait peu dire … Actuellement, dans mes activités, je n’ai pas suffisamment de temps pour m’adonner à la peinture mais, je fais quand même des peintures sur commande ; il ya des commandes qui me viennent, j’exécute des toiles et je les livre. Pour l’instant, la peinture conceptuelle qui consiste à penser l’art d’une certaine manière, qui vient de mon cœur, j’ai d’abord un peu arrêté cette forme de peinture mais, je continue de concevoir des toiles qui seront exécutées, je continue de planifier ce que l’avenir de ma peinture serait, ce qui est très important parce que, aller au pifomètre dans le domaine de la peinture, c’est œuvrer pour voir, un jour, son œuvre disparaître ; je ne suis pas dans cette logique-là. Je crois que l’artiste doit penser son travail et, c’est à cela que je m’attelle.

Que devient la série des « Zémidjans » ?

La série des « Zémidjans » continue. Entre temps, j’ai fait « Les Zémidjans protestent », « Les Zémidjans persistent » ; j’avais cassé le tout par « Assoclé et Bonou », qui est une bande dessinée humoristique parlant de deux jeunes adolescents, dans leurs tribulations à travers la ville de Cotonou. Actuellement, je me tourne vers la suite des « Zémidjans », c’est-à-dire le troisième volet de la saga, afin de faire une trilogie qui va donner naissance à cette série qui titre sur l’environnement de la circulation béninoise, avant de m’attaquer à d’autres personnages, pour faire prospérer davantage ma bande dessinée.


Il y a actuellement en circulation « Faoussah, la petite vidomègon » …

« Faoussah, la petite vidomègon » est, en fait, une idée que j’ai eue, c’est un projet de bande dessinée que j’avais déjà depuis très longtemps. Cela a vu le jour, grâce à l’aide du Psicd (Ndlr : Programme de soutien aux initiatives culturelles décentralisées), sous le couvert de ce financement européen dont a bénéficié l’Association des bandes dessinateurs du Bénin, et qui a su nous accompagner, qui a permis à tous les bédéistes béninois d’avoir, aujourd’hui, sur le marché, une bande dessinée au moins, dans les rayons. Donc, c’est à cette occasion que j’ai finalisé les dessinés. « Faoussah, la petite vidomègon », c’est l’histoire d’une petite fille qui est un enfant placé et qui connaît les sévices de sa famille d’accueil.

Il s’agit donc de ton engagement contre le trafic des enfants …

En fait, tout artiste, aujourd’hui, qui réfléchit sur les différentes situations que vivent les Béninois, doit se tourner vers des thèmes récurrents qui embrigadent, qui enchaînent nos sociétés. Moi, quand, par exemple, je me tourne vers le problème du zémidjan, ce n’est pas du tout pour encourager le phénomène, c’est simplement pour avoir un regard critique sur ce qui se fait, quand je me tourne vers les vidomègon, c’est aussi pour avoir un regard critique, tout en restant un tout petit peu humoristique, afin que le drame ne soit plus trop dramatisé, afin qu’on regarde plus le drame avec une plus grande hauteur, et qu’on prenne de la hauteur par rapport à ces situations-là, et qu’on en rit plutôt que d’en pleurer.

As-tu des projets immédiats ?

Oui, j’ai des projets dans la bande dessinée. Par exemple, le troisième volet de la saga des zémidjans doit sortir très très prochainement, je m’attèle à cela. Je me tourne aussi vers des projets cinématographiques que je ne peux dévoiler davantage ici. Je crois que l’avenir nous le dira ; on me verra donc, non seulement dans la bande dessinée, mais dans d’autres formes d’expression artistique.

Quel regard un artiste comme toi porte sur les trois années du régime du Changement ?

C’est un peu délicat de répondre à cette question. Vous savez, en matière de politique, c’est le choix, c’est l’engagement d’un leader qui a en face de lui des individus ayant des points de vue différents, parce que chacun voit les choses d’une certaine manière. Donc, pour pouvoir faire avancer la machine, - aujourd’hui, on parle du Chauffeur – si on doit rester dans le vocable du Chauffeur, pour que le véhicule puisse avancer, il faudrait que le Chauffeur soit assez vigilant, parce qu’il y a des pièges à l’intérieur de la voiture, comme sur la route. Tout ce qu’on peut dire, c’est que, quelque part, le Changement tant prôné est venu ; il y a eu des essais d’avancée mais je crois qu’il y a certains problèmes qui restent encore entiers quant au fait, par exemple, de savoir quelle est la place que l’art occupe dans le cœur du leader politique d’aujourd’hui ; est-ce qu’un jour, les artistes pourraient dire : « Tiens, on a une école de formation de laquelle on sort avec des compétences qu’on peut vendre à l’international » ? Si tant est que notre art n’est pas sous-tendu par une formation pure et dure, on ne saurait se présenter comme des individus ayant un certain savoir-faire dans l’art, on restera toujours des tâcherons ; tant que cela durera, on ne sera jamais professionnels, on ne sera jamais compétitifs sur l’échiquier mondial. C’est une situation que le Changement doit vraiment accomplir. Je crois quand même que, avec tout ce qui se fait, toutes les actions que le Chef d’Etat mène pourront peut-être, un jour, permettre aux artistes d’avoir un véritable idéal dans leur pays, sans forcément devoir voyager pour avoir cet idéal.

Un dernier mot ?

J’exhorte le Béninois à beaucoup plus d’attention vis-à-vis de l’art qu’il a autour de lui, parce que, les artistes apportent une dimension, une part de rêve à cette réalité-là qu’on vit ; il faudrait qu’il sache que ce n’est pas facile : l’artiste doit être encouragé, écouté, suivi. Le Béninois doit être moins indifférent à l’art que leurs frères essaient de mettre en exécution.



Propos recueillis par Marcel Kpogodo


peinture au Bénin

Arts plastiques au Bénin

« L’Etat doit organiser le domaine du social », selon Kaman Esso


Si, «aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre des années », la valeur relève aussi de l’accumulation des années, notamment, dans le domaine des œuvres de l’esprit. C’est, semble-t-il, ce qu’il est possible d’affirmer concernant l’artiste-peintre béninois, Kaman Esso. Sa sagesse, incontestablement, subtile, se révèle dans cet entretien, où il nous parle de lui, de sa pratique artistique, et du social, tel qu’il pense que l’Etat doit l’exercer.




Marcel Kpogodo : Bonjour Monsieur, vous êtes artiste-peintre béninois. Nous vous avons découvert très récemment. Est-ce que vous pouvez vous présenter un peu ?


Kaman Esso : Merci Monsieur. Mon nom, c’est Houessou Lucien ; je suis de la famille Houessou, ressortissant d’Agonlin. C’est une famille qui a émigré à Pobè, dans le Plateau. Justement, je suis devenu artiste-peintre, mais, ce n’est pas une affaire qui vient de commencer, puisque cela fait très longtemps que j’ai exercé mon apprentissage en imprimerie et que je me suis donné à ce corps de métier. Déjà, depuis mon jeune âge, lorsque j’allais à l’école, je m’étais toujours donné au dessin. Le dessin, c’était toujours mon favori. Donc, je suis obligé de reprendre le pinceau aujourd’hui, parce que, nous savons très bien que l’homme ne vit pas seulement avec tout ce qu’il connaît, on ne doit pas toujours attendre ce que l’on cherche. Comme on le dit, à défaut de ce que l’on cherche, on se contente de ce que l’on trouve. Donc, je suis devenu peintre, si non, j’ai repris ma vie antérieure. Alors, le domaine que j’ai choisi, surtout, dans la peinture, c’est presque tous les domaines. Celui qui m’a le plus attiré est l’abstraction. Je fais aussi de la philosophie : tout ce que je peins aujourd’hui, c’est par rapport à ce que j’ai déjà dépeint dans mes articles. Il est vrai, je n’ai pas encore une édition, mais, j’ai une didactique qui me permet, aujourd’hui, d’envoyer mes messages à qui bien veut, parce qu’on dit souvent que la philosophie de chacun ne sied qu’à soi-même. Cela étant, je ne veux pas trop stationner sur les données philosophiques. Mais, je crois que c’est avec la peinture seulement que je peux m’exprimer aujourd’hui.

Avez-vous un nom d’artiste ?

Oui, je m’en suis donné. Avant toute chose, l’idéal veut que l’on se réfère à certaines circonstances de la vie. Donc, le nom que je me suis donné, après avoir beaucoup réfléchi, c’est « Connaissons nos limites ». En yoruba, cela signifie « Ka man esso » ; en fon, on dit : « Mi ni toun djrè mi ton ». C’est cela mon nom d’artiste.

Pourquoi avoir choisi ce nom ?

Ce nom ne s’apparente qu’à moi seul ; c’est tout singulièrement que je l’ai choisi. Je crois que, de par le monde, nous sommes confrontés aux mêmes difficultés, aux mêmes problèmes. Beaucoup de philosophes l’ont déjà dit : tout excès nuit ; lorsque vous exagérez sur quelque chose, que vous enviez quelque chose qui, tant bien que mal, vous parvient, il me semble qu’il ne faudrait pas en exagérer. C’est pour cela que je me suis dit que ce nom me satisferait plus que d’autres, parce que, je ne suis pas de nature à compliquer ma vie.

Quel est le message que vous voulez porter à la connaissance du public, à travers la peinture ?

Le message que je porte, c’est, comme je venais de vous le dire, à partir des didactiques que j’ai préparées, c’est sur le problème de la mentalité humaine, ce qui m’a toujours poussé à comprendre que, dans notre existence, nous nous sommes donné un caractère privilégié d’être humain, d’être humain, (expression ainsi répétée dans l’interview), c’est-à-dire, l’homme créé, en toute symbiose par la volonté d’un Dieu, un Dieu que nous chérissons, parfois, lorsque tout va bien, et que, d’un autre côté, lorsque cela ne va pas, nous n’hésitons jamais à incriminer des petits problèmes que nous nous fabriquons nous-mêmes. Donc, mon message est parti de là ; il me semble que, pour être sincère envers soi-même, le problème de la mentalité s’impose, parce que, le mental, c’est qui se confère au calcul. Si l’homme ne calcule pas, ne fait pas des analyses, je pense bien que tout ce qu’il promet de faire sera toujours des choses illusoires. C’est à partir de là que je me suis dit que, ce que je dois défendre, ce que je défends toujours, cela, ce n’est pas parce que j’ai repris la peinture aujourd’hui. C’est depuis très fort longtemps ; j’ai rencontré des déboires, c’est vrai, mais, je pense que, à partir de tout ce que j’ai rencontré, je me suis demandé si, en fin de compte, le problème serait de moi-même ou de quelqu’un d’autre. Alors, je me suis dit qu’il n’y a qu’une seule chose qui puisse justifier tout ce qui se passe, c’est le mental humain.

Quel type de peinture faites-vous ? Quels matériaux utilisez-vous ?

Je manipule toutes sortes de peintures. Mais, pour le moment, c’est de la toile que je peins ; qui dit ’’toile’’ parle de la peinture à huile, souvent. Si non, la peinture à eau n’est pas conseillée pour certains travaux. Les peintures qui se font sur des supports légers, comme le papier, et certaines qualités de tissus, par exemple, on peut les faire avec de la peinture à eau ; ces qualités d’œuvres n’ont pas besoin d’être exposées à la poussière, tandis qu’avec la peinture à huile, à n’importe quel moment, on peut les relaver, les reconstruire, et puis, cela passe. Si non, c’est la peinture à huile que j’exploite.

Est-ce que, aujourd’hui, vous vivez de votre art ? Parvenez-vous à faire connaître ce que vous faites au grand public ? A quelle étape êtes-vous actuellement dans la pratique de la peinture ?

Toute ma vie, je l’ai passée dans l’imprimerie ; je ne viens que de reprendre le pinceau, comme je viens de vous le dire à l’instant, je ne me suis pas encore fait connaître du grand public. Si non, ce n’est que récemment même que j’ai commencé à peindre dehors ; tout ce que je faisais, c’est à l’intérieur que je travaillais. Je ne me suis pas encore fait connaître du grand public parce que, il me semble que, l’économie est le point afférent de tout ce que l’on peut programmer à faire ; on ne peut pas se lancer comme cela, vu l’âge qu’on a. Pour les jeunes, bon, d’accord, on peut se lancer et chercher des sponsors par-ci, par-là ; lorsqu’on a un certain âge, c’est difficile d’avoir les sponsors. Donc, j’attends ; si, toutefois, j’arrive à faire quelques tableaux, je pourrai trouver des endroits et les exposer, c’est tout ce que je pourrai faire, pour le moment.



Vous avez donc un appel à lancer …

Bien sûr que je ne me confie pas à lancer un appel ; je vous ai parlé de la question de l’âge et des moyens. L’argent est toujours le bienvenu à tout moment mais, je ne peux lancer un appel, alors que nous savons très bien que cela ne va pas un peu partout. Autant continuer seulement à me défendre comme cela ; avec le peu de moyens que j’ai, je paie mes produits, je suis en train de réunir mes tableaux. Cela dépend, si, toutefois, il y a des personnes avisées qui peuvent s’intéresser à ce que je fais, c’est tant mieux, on ne peut que le souhaiter ; s’il y a quelqu’un qui peut me venir en aide, d’accord. Si non, je crois que, malgré mon âge, je me sens toujours jeune ; je suis jeune. En ce qui concerne l’attente, je ne suis jamais pressé ; je ne peux pas me prononcer sur un appel quelconque.
Cependant, si appel il y a, c’est un appel que je pourrais peut-être me permettre de lancer, à l’endroit de nos autorités, en ceci que, franchement, notre social est en train de régresser ; ce n’est pas hier, ce n’est pas avant-hier, cela fait déjà des années. Nous sommes tous conscients de ce qu’il y a jusqu’à aujourd’hui. Maintenant, nous parlons d’une nouvelle récession économique, de crise par-ci, de crise par-là. En ce qui me concerne, si j’ai dit, au préalable, que j’avais fait l’imprimerie pendant des années, et que les circonstances n’étaient pas réunies, je ne peux pas dire que j’ai eu de la malchance, j’ai toujours la chance d’avoir du travail. C’est que, nos autorités, - qu’elles me le permettent, je leur demande des excuses, chacun se défend tant bien que mal dans son domaine, - elles font tout ce qu’elles peuvent, c’est vrai, mais, concernant les points essentiels auxquels elles doivent s’attacher, moi, je leur demanderai de s’occuper du social, parce que tous ces petits problèmes que nous avons aujourd’hui, c’est parce qu’il y a manque de quoi faire. Si l’on dit ’’manque de quoi faire’’, c’est parce que qu’il n’y a pas un exergue portée vers la chose. C’est comme qui dirait : « Fais ce que je te dis, mais ne fais pas ce que je fais ».
Il me semble qu’à l’heure qu’il est, nos autorités doivent prendre le devant des choses, aller à la rencontre des populations à la base ; nous ne sommes pas tous convaincus de ce que nous pouvons faire ; ce que l’on peut faire, il y en a, mais, si les gens ne sont pas habitués à le faire, dès le départ, et que personne ne leur a montré ce qu’il faut faire, ils vont toujours passer à côté. Alors, on sera toujours en train de se replier sur soi-même, croyant que le monde est déjà perdu comme cela, et que nous avons tout perdu, alors que tout est à côté de nous. Il me semble que, à côté de tout ceci, il faut une grande prise de responsabilité, en ce qui concerne le social. Lorsqu’on parle du social, on a tendance à penser qu’il faut aller donner de l’argent aux populations, que c’est de l’argent qu’on attend. Non, ce n’est pas une question d’argent, c’est une affaire d’organisation parce que, lorsqu’on n’organise pas le social, que l’on décrète des lois, que l’on vote des lois, cela ne pourra jamais marcher. On souhaiterait que cela marche mais, je demande que l’on vienne à réfléchir sur pourquoi cela n’a pas marché. C’est parce qu’il n’y a pas d’organisation, à l’instar d’autres pays.
Pendant les 22 ans que j’ai passés dans deux pays étrangers africains, j’ai vu que c’est l’organisation. Si l’on n’organise pas un peuple, une population ou même un groupe d’individus, il y aura toujours dérapage, parce que, ce groupe d’individus, cette population, ou ce consensuel aurait une décision de nommer des gens à sa tête, qui puissent l’orienter ; ce n’est pas nous tous qui allons nous asseoir dans le fauteuil présidentiel. Je vais, par là, me référer aux propos d’une personnalité à qui je confère mes révérences ; il s’agit de Monsieur Robert Dossou qui n’a pas manqué de dire que ce n’est pas obligatoirement dans le fauteuil présidentiel, dans le haut lieu qu’on doit rester pour aider son pays ; il en a donné l’exemple sur lui-même. En me référant aussi à un certain souvenir d’Eustache Prudencio, il disait que nous ne pouvons pas vivre sans être dans notre propre mêlée, sans être ensemble. Je crois que, lorsque nos autorités prennent le devant des choses et disent que ceci doit être ceci, cela doit aller.

Si ce n’est pas trop indiscret, peut-on connaître votre âge ?

J’ai déjà presqu’atteint ma soixantaine.

Nous vous souhaitons beaucoup de chance …

Merci.



Propos recueillis par Marcel Kpogodo